Des empreintes de mains sur les parois de Pech Merle à celles de Yenikapi en Turquie, des girafes gravées dans le désert du Sahara aux pétroglyphes géants d'Hawaï, des temples de Göbekli Tepe aux signes énigmatiques dans les grottes marines du Salento, Silvia Ferrara nous entraîne dans un extraordinaire voyage sur les traces graphiques de l'humanité. Nous voici soudain face à des dessins d'hommes et de femmes, d'animaux disparus, mais aussi face à des figures géométriques et sans légendes. Comment naissent des symboles, des icônes, des signes, des mots ? Qui les crée, et pourquoi ? Et qui les comprend ?
Dans ce « saut » vers l'abstraction s'exprime la capacité humaine à façonner le réel et à lui donner vie. En déchiffrant ces écrits d'avant l'écriture qui nous parviennent depuis le fond des millénaires, les questions restent parfois en suspens. Mais la puissance de l'imagination continue de nous émerveiller et de nous parler.
Silvia Ferrara est professeure de philologie mycénienne à l'Université de Bologne. Elle est responsable du programme de recherches européen INSCRIBE (Invention of Scripts and their Beginnings) consacré aux inventions de l'écriture.
Notre siècle a totalement transformé le statut de l'homme ; celui-ci est désormais un membre d'un ensemble qui le dépasse, et dont il ne peut s'échapper. il vit dans un monde où la technique prend de plus en plus d'importance, et où le politique s'impose sans possibilité d'écart ou de fuite. Ce monde est également celui des pires violences, de la barbarie généralisée. Hannah Arendt commence ici sa réflexion sur l'originalité radicale de notre époque. Elle pose les bases d'une réflexion qui permettra, peut-être, de se donner les moyens d'éviter les dérapages vers la violence aveugle, en comprenant en profondeur la dimension de "l'homme moderne". Un nouvel humanisme ?
Lors du décès d'une tante sans descendance, Annette Wieviorka réfléchit aux traces laissées par tous les êtres disparus qui constituent sa famille, une famille juive malmenée par l'Histoire. Il y a le côté Wieviorka et le côté Perelman. Wolf, l'intellectuel yiddish précaire, et Chaskiel, le tailleur taiseux. L'un écrit, l'autre coud. Ils sont arrivés à Paris au début des années 1920, en provenance de Pologne. Leurs femmes, Hawa et Guitele, assument la vie matérielle et celle de leurs enfants.
Dans un récit en forme de tombeaux de papier qui font oeuvre de sépultures, l'historienne adopte un ton personnel, voire intime, et plonge dans les archives, les généalogies, les souvenirs directs ou indirects. Par ces vies et ces destins recueillis, on traverse un siècle cabossé, puis tragique : d'abord la difficile installation de ces immigrés, la pauvreté, les années politiques, l'engagement communiste ou socialiste, le rapport complexe à la religion et à la judéité, puis la guerre, les rafles, la fuite ou la déportation - Paris, Nice, la Suisse, Auschwitz - et enfin, pour certains, le difficile retour à la vie marqué par un autre drame.
Tout l'art consiste ici à placer le lecteur à hauteur d'hommes et de femmes désireux de bonheur, de joie, de liberté, bientôt confrontés à l'impensable, à l'imprévisible, sans certitudes ni connaissances fiables au moment de faire des choix pourtant décisifs. C'est ainsi que des personnages très attachants et un monde disparu retrouvent vie, par la grâce d'une écriture sensible et précise.
Pourquoi elle ?Pourquoi une biographie de Jacqueline de Ribes ?Je ne m'étais intéressée jusque-là qu'à des vies dont l'art était le coeur battant. Des vies dont l'essentiel fut de peindre, écrire ou sculpter.C'est sa propre vie qui est l'oeuvre de Jacqueline de Ribes. Une vie qu'elle a magnifiée, sublimée, mais qui garde à mes yeux sa part de mystère.Quelle femme et quels secrets se cachent derrière la légende de papier glacé ?Figure de la jet-set des années soixante. L'un des «Cygnes» préférés de Truman Capote et de Richard Avedon. Amie d'Yves Saint Laurent et de Luchino Visconti. Elle est devenue une icône du style et un symbole de l'élégance française. Une reconnaissance mondiale illustrée, en 2015, par une magistrale exposition au Metropolitan Museum de New York. Son visage a été projeté en pleine lumière sur l'Empire State Building.Ce destin, qui voit s'achever l'ancien monde et apparaître de nouveaux codes, des innovations stupéfiantes, j'ai tenté d'en déchiffrer l'énigme.D. B.
2 octobre 1925 sur la scène du Théâtre des Champs Elysées, le public, venu en nombre, découvre Joséphine Baker dans La Revue nègre Elle a 19 ans, c'est un triomphe Très vite, Joséphine fascine ce Paris des Années folles, avide de liberté, de nouvelles musiques, d'exotisme, de cultures inconnues et semble cristalliser les attentes d'une société à peine sortie du cauchemar de la Première Guerre mondiale Jouant sur les stéréotypes associés au corps féminin noir, elle devient une icône d'ébène et s'impose comme une star internationale Gérard Bonal, dans une approche personnelle, nous entraîne sur les traces de ce personnage, de l'enfance pauvre à Saint Louis, Missouri, jusqu'à la lutte pour les droits civiques aux côtés de Martin Luther King On embarque avec elle en 1925 sur le paquebot qui l'emmène vers l'Europe pour fuir la misère et la ségrégation On l'escorte dans le Paris nocturne de l'entre deux guerres, celui des théâtres de music hall le Casino de Paris, les Folies Bergère des night clubs de Pigalle, au bras de ses amants, Georges Simenon ou Giuseppe Abatino dit Pepito, son impresario et mentor pendant dix ans Durant la Seconde Guerre, on la suit lorsqu'elle s'engage, dès 1940 dans la Résistance Femme d'idéal, militant inlassablement pour la fraternité universelle, elle adoptera après la guerre douze enfants venus du monde entier, sa fameuse « tribu arc en ciel », qu'elle installera dans le château des Milandes en Dordogne À sa mort, le 15 avril 1975 des funérailles nationales sont décrétées « Elle est la deuxième femme, après Colette, à être ainsi célébrée » Aujourd'hui, c'est au Panthéon qu'elle s'apprête à entrer Elle sera la première femme noire à reposer dans ce mausolée républicain
« I'm sorry. I'm Russian. » À la chute de l'URSS, c'est ainsi que les Russes exprimaient avec ironie le sentiment d'appartenir à un peuple de perdants.
Vladimir Poutine a décidé de pallier cette humiliation et restaurer la « grandeur russe ». Il a rédigé un roman national fait de succès et de triomphes, nourri par un désir de revanche. Tant et si bien que la guerre déclenchée contre l'Ukraine le 24 février 2022 a été accueillie avec enthousiasme par une grande partie de la population.
Comment en est-on arrivé là ? Par la propagande et la répression, démontrent Veronika Dorman et Ksenia Bolchakova. Du lavage de cerveau patriotique jusqu'à l'exaltation militariste, ce document exceptionnel décrit les rouages d'un endoctrinement géant, celui de tout un peuple.
En regardant leur pays d'origine droit dans les yeux, les journalistes racontent aussi une part d'elles-mêmes, dont elles se sentent désormais amputées.
Les femmes ont une histoire de luttes pour leurs droits, conquis, arrachés, défendus. Sur les pas de Louise Michel, de Gisèle Halimi, mais aussi de tant d'autres invisibilisées, comme Pauline Léon, Malika El Fassi ou encore les colleuses de Stop féminicides, Mathilde Larrère, historienne, retrace les combats féministes de la Révolution française jusqu'au mouvement #MeToo. À l'histoire, le livre mêle des récits, des documents, des chansons et des slogans, reflétant l'ardeur et la détermination de celles qui n'acceptent pas l'inégalité des sexes, les discriminations, montrant combien elles se tiennent la main au-delà des siècles.Une bonne leçon d'histoire et un opportun avertissement. Car si l'époque semble avoir pris à bras-le-corps le combat féministe, il serait bien imprudent de croire que les droits des femmes sont acquis. Libération.Cet essai enlevé est un joyeux appel à la résistance. L'Obs.Illustrations de Fred Sochard.
Dans Le Pouvoir au féminin, Élisabeth Badinter nous a fait redécouvrir la figure fascinante de l'impératrice Marie-Thérèse d'Autriche (1717-1780), la souveraine la plus puissante de son temps. Son art de la diplomatie et sa finesse psychologique ont marqué les esprits, tout comme ses seize enfants et son affection jamais démentie pour son mari volage. Puisant dans des archives inédites, la philosophe et historienne revient sur cette figure majeure par le biais de la maternité. Ce nouvel ouvrage révèle un aspect caché de la personnalité de celle qui fut une mère complexe, fort soucieuse de ses enfants, capable de la plus grande tendresse, mais aussi parfois de dureté, voire d'injustice. Une femme souvent tiraillée entre les choix que lui dicte son coeur et ceux imposés par la raison d'État.
Les nombreuses femmes qui ont eu l'audace d'entreprendre de longs voyages ont pour la plupart disparu dans les brumes de l'histoire. Aujourd'hui, leurs récits sont redécouverts.Grâce à la marche, ces femmes ont trouvé leur indépendance et se sont parfois même autorisé un changement de vie radical. Nan Shepherd, poétesse écossaise ; la peintre galloise Gwen John ; Clara Vyvyan, voyageuse et randonneuse ; l'écrivaine et philosophe Simone de Beauvoir ou Georgia O'Keeffe, célèbre peintre américaine, en témoignent.Artistes, philosophes, écrivaines, ces femmes ne marchaient pas pour jouir de toute la liberté dont peut jouir un homme, ni pour faire de l'exercice.Elles marchaient afin de penser par elles-mêmes, de mettre de l'ordre dans leurs émotions, d'affirmer leur indépendance. Elles marchaient pour exister.
« On m'a parfois demandé comment j'avais pu, après les camps, retrouver le désir de vivre. La seule réponse valable à mes yeux est celle-ci : on n'a pas le choix. Cela me paraît valable pour une personne comme pour un pays tout entier. » Simone Veil raconte son enfance, sa déportation et l'importance de cette épreuve dans sa vie.
Dans cette formidable histoire de la transmission des savoirs, Violet Moller retrace le chemin que des manuscrits antiques qu'on croyait perdus à la chute de l'Empire romain parcoururent par-delà les continents et par-delà les siècles pour être retrouvés à la Renaissance. Elle nous embarque dans les bagages d'hommes avides de connaissances, copistes et humanistes, passeurs d'ouvrages d'astronomie, de mathématiques et de médecine, sur la piste de ces sept cités du savoir qui brillaient au coeur du Moyen Âge : Alexandrie, Bagdad, Cordoue, Tolède, Salerne, Palerme, Venise.
Alexandra Kollontaï, quelle femme ! Et quel destin ! Aristocrate russe, rejetant très tôt son milieu et choisissant la révolution, elle devient ministre au sein du premier gouvernement de Lénine. Cinq ans plus tard, elle est la première femme ambassadrice que l'histoire ait connue. Tribun célèbre et oratrice hors pair, partout elle électrise ses auditoires fascinés. Kollontaï est aussi une féministe passionnée combattant pour l'émancipation et les droits des femmes. Ses écrits politiques, ses romans, son journal tenu tout au long de sa vie constituent une oeuvre remarquable et unanimement reconnue. Enfin, et ce n'est pas le moindre de ses exploits, Alexandra Kollontaï sortit victorieuse de la folie destructrice de Staline et vécut presque aussi longtemps que lui.
Cette existence multiforme, couronnée par une élégance constamment saluée par la presse, fit d'elle une « icône » médiatique avant l'heure. L'auteur a rassemblé ici une documentation considérable et de riches études historiques pour comprendre le destin incroyable de cette personnalité hors du commun. Secrétaire perpétuel de l'Académie française et historienne de la Russie, Hélène Carrère d'Encausse est l'auteur de nombreux livres de référence sur la Russie et les relations franco-russes.
Celle que l'on surnomma en son temps la Vierge Rouge reste un objet de fascination : qu'il s'agisse de condamner son tempérament exalté lors de la Commune de Paris ou d'admirer son héroïsme, de considérer son jugement politique et son activisme social ou d'apprécier l'institutrice anticonformiste, l'image a gardé tout son éclat .Le mystère « Louise Michel » a fait couler beaucoup d'encre. Les biographies romancées et les prétendues autobiographies foisonnent. Pour les écrire, chacun pioche dans les textes de la révolutionnaire, se sert, gomme ou remanie... Comme si, pour faire connaître la « vie » de Louise Michel, on commençait par oublier qu'elle en a été elle-même l'autrice. Comme s'il fallait commencer par la faire taire - au fond, comme si elle dérangeait toujours.
Dans ses Mémoires de 1886, on découvre une Louise Michel tour à tour adolescente facétieuse, institutrice féministe, révolutionnaire patentée, déportée en Nouvelle-Calédonie, combattante anarchiste, passionnée d'art et de science, enthousiaste de la nature... On découvre aussi la Louise Michel qui pense, qui parle et qui écrit, la plume acérée, la sensibilité à vif, la conscience intrépide.
En 1945, Brasillac, Guitry et Céline s'étonnent publiquement que la grande écrivaine française soit épargnée par l'épuration qui ne les ménage pas. Mais l'arrestation de son mari juif pendant la guerre a désormais balayé toute controverse... Alors que Colette occupe plus que jamais une place clé dans le monde des Lettres, cette période de sa vie reste mystérieuse. Bénédicte Vergez-Chaignon, passionnée de Colette, s'est emparée du sujet et nous entraîne dans le quotidien de la grande célébrité durant ces années noires de la France.
Ce livre d'Emmanuel Terray propose quatre portraits de femmes du xixe siècle. Pauline de Beaumont, Aimée de Coigny, Delphine de Girardin et Marie d'Agoult : chacune à sa manière a marqué son époque. Muses, amies ou amantes de grands écrivains ou artistes, elles sont reconnues elles-mêmes pour leurs écrits ou leurs actions. À la fois femmes de coeur et femmes d'esprit, ce sont aussi des caractères trempés. Libres et indépendantes, elles sont résolues à décider de leur destin dans un monde dominé par les hommes.
En les peignant avec un talent de portraitiste visiblement fasciné, Emmanuel Terray éclaire l'histoire d'un siècle où les rémanences de l'Ancien Régime se heurtent au tumulte politique et social qui a suivi la Révolution. Chacune d'elles devient ainsi une figure emblématique illustrant la place des femmes dans la société française, leurs combats pour la reconnaissance et simplement pour la liberté de choisir leur existence.
Un livre constamment captivant, qui restitue la vie et les idées de personnages hauts en couleurs, où les femmes d'aujourd'hui peuvent reconnaître leurs combats.
Noirs et Juifs sont dans la culture occidentale, les deux minorités marginalisées, stigmatisées, voire confondues, les deux figures de l'autre par excellence. Ils ont entretenu depuis l'Antiquité des relations complexes, entre identification, coopération et rivalité. C'est cette histoire sur la longue durée que nous fait découvrir Edith Bruder, depuis les premières figures d'Africains de la Bible hébraïque jusqu'aux revendications contemporaines lorsque le mouvement Black Lives Matter affirme son soutien à la « résistance palestinienne ».Ce parcours historique qui s'étend sur plus de 2000 ans n'élude aucune des questions religieuses, sociales et politiques qui, ont pu provoquer la confrontation des Noirs et des Juifs, Il n'ignore pas non plus les moments lumineux de ces interactions et nous en fait découvrir les aspects méconnus aux Amériques, en Afrique ainsi qu'en France. À l'heure où les questions de racisme, de crispations identitaires, de concurrence mémorielle, et d'antisémitisme de la part d'autres minorités sont au coeur des tensions politiques, cet ouvrage entend faire le point de manière historienne sur les aspects composites de cette relation en l'inscrivant dans la longue durée.Edith Bruder, chercheuse au CNRS, à la School of Oriental and African Studies de Londres, et à l' UNISA (Université d'Afrique du sud ), est spécialiste des communautés juives émergentes d'Afrique Noire, auxquelles elle a consacré un livre, Black Jews (Albin Michel, 2014). Elle a également dirigé le collectif Juifs d'ailleurs. Diasporas oubliées, identités singulières (Albin Michel, 2020) et publié d'autres ouvrages aux Etats-Unis et en Grande Bretagne.
Femmes puissantes, aux bonnes actions mais aussi aux mauvaises, qui ont, sans l'ombre d'un doute, changé l'Histoire.
Elles ont été reines, impératrices, régentes ou encore comtesses. Elles ont effleuré ou attrapé à pleine paume le pouvoir. Se sont battues. Ont vécu. Ont pensé. Ont aimé. Ont joué de grands rôles pour façonner l'Histoire qui est celle du Monde. Mais qu'en est-il de leur postérité ? Souvent réduites aux seuls rangs de "filles de', "femme de' puis "mère de', leurs influences n'ont pas trouvé d'écho dans notre mémoire collective. Ce livre propose d'y remédier en vous proposant 30 portraits de femmes puissantes à travers le monde. Partez à la découverte d'Aliénor d'Aquitaine, Hatchepsout ou encore de Falakika Seilala !
Un livre, magnifiquement illustré, présente 30 femmes qui ont marqué l'histoire et laissé leur empreinte sur le monde. Ces femmes, mauvaises dans le meilleur sens du terme, ont défié le statu quo et changé les règles pour tous ceux qui ont suivi. L'heure est venue de célébrer non seulement ce que les femmes peuvent faire, mais aussi leurs actions remarquables, même lorsque d'autres ont essayé de les en empêcher. Mais ce n'est pas tout, ces femmes ont aussi dû faire des choses atroces pour bousculer les codes : des femmes de pouvoir dans toute leur entièreté, qui n'ont jamais hésité à s'imposer pour parvenir à leurs fins. L'heure n'est plus à la romantisation de ces femmes, seulement perçues par le prisme des hommes qui gravitent autour d'elles, l'heure est à la reconnaissance de leurs actions et de leur impact, sans minimisation.
Des têtes couronnées d'Europe aux politiciennes venues d'ailleurs, cet ouvrage met avant tout en lumière des femmes puissantes, dans toute leur complexité, qui ont changé les choses et ont incarné leur pouvoir envers et contre tous.
Qui étaient les femmes vikings ? Il n'y a guère d'imaginaire plus viril que celui des Vikings : barbares pillards à la barbe hirsute, grands explorateurs naviguant sur les mers de Scandinavie tandis que, quelque part entre Asgard et le Valhalla, Týr et Odin ourdissent de grands combats. Mais que faisaient les femmes vikings pendant ce temps ? À la croisée des sources historiques, archéologiques et des sagas islandaises, cet ouvrage propose une relecture de la civilisation viking selon un prisme féminin. De la figure de la valkyrie qui décide du sort des guerriers au combat à la fière Guðrún qui venge l'honneur des siens, on découvre une femme viking qui, loin d'être cantonnée aux tâches domestiques, explore, décide, écrit, combat parfois. Chemin faisant, l'imaginaire que nous nous faisons de cette culture s'en trouve profondément modifié. Preuve, s'il en était besoin, que l'histoire ne se fait jamais sans les femmes.
Alexandra David-Neel est la plus célèbre des exploratrices. Déguisée en mendiante, elle est la première femme européenne à pénétrer en 1924 dans Lhassa, la capitale du Tibet, alors interdite aux étrangers. On croit connaître le destin de cette infatigable voyageuse, mais sait-on qu'Alexandra David-Neel (1868-1969) a été une féministe de la première heure, journaliste, cantatrice, authentique anarchiste ne voulant dépendre de personne ?
Pour percer le mystère de la vie de cette femme incroyable, il y a un repère, un fil conducteur auquel Laure Dominique Agniel redonne toute sa place : son mari, Philippe. L'ami, le confident, le seul avec qui elle laisse tomber le masque.
Les milliers de lettres à son époux nous éclairent sur sa quête acharnée de liberté pendant les 101 années de son existence. Les différents noms qu'elle a portés traduisent ce cheminement vers l'invention de soi : née Alexandra David, elle associe le nom de son mari au sien pour signer son oeuvre Alexandra David-Neel. Dans un style limpide et enlevé, Laure Dominique Agniel nous restitue la vie menée tambour battant d'une femme en avance sur son temps.
Avez-vous déjà entendu parler de la prêtresse mésopotamienne Enheduanna, d'Angélique du Coudray, la « mère » des sages-femmes, ou de la résistante non-violente Noor Inayat Khan ? Comme elles, nombre de femmes ont su transcender leur époque ou leur statut. Reines, guerrières, artistes, sages-femmes, scientifiques... L'autrice rend leurs lettres de noblesse à 18 précurseuses, dont la vie a été au fil des siècles tantôt oubliée, tantôt tronquée ou réécrite. Ce faisant, elle retrace le contexte historique des périodes évoquées et l'historiographie de chacune de ces femmes jusqu'à notre époque - au-delà de la récupération historique ou de la condamnation post mortem qui a pu peser sur certaines. Citations, extraits d'oeuvres et illustrations rendent ces trajectoires extraordinaires particulièrement vivantes. Avec la simplicité et le ton léger qui font sa force, et en s'appuyant toujours sur une documentation fouillée, Justine Defrance nous offre un véritable voyage dans le temps à travers l'histoire de ces femmes qui n'avaient pas froid aux yeux. Vulgarisatrice en histoire, Justine Defrance, alias La Prof sur YouTube, est déjà l'autrice de La vie quotidienne au Moyen Âge (Nouveau Monde, 2020).
Longtemps, au mot de « communarde » on a préféré celui de « pétroleuse », qui pourtant est une fiction. Une flétrissure misogyne qui raconte d'abord la façon dont on a dévalué, disqualifié et réprimé les femmes engagées dans la Commune de Paris au printemps 1871. En pionnière, Édith Thomas s'est attachée en 1963 à faire sortir de l'ombre ces femmes mobilisées pour la révolution sociale. Chartiste, elle a fouillé des archives fragiles et lacunaires, et excavé des traces qui n'avaient jamais été regardées comme des objets légitimes. En débusquant ce stigmate qui charrie une foule de représentations sur la violence féminine, et euphémise l'épaisseur politique de leur lutte pour déplacer les frontières de l'émancipation, l'autrice n'a pas seulement élargi l'histoire de la Commune de Paris. Elle a aussi enrichi l'histoire des féminismes.
Figure centrale de la Résistance intellectuelle sous Vichy, qui fit elle-même les frais d'une puissante invisibilisation, Édith Thomas restaure les femmes de 1871 dans une souveraineté proprement politique, aux antipodes de cette image d'hystériques du baril à quoi les ont longtemps reléguées les récits habituels ou virilistes de la Commune de Paris.
Comment les grands orateurs de l'Antiquité parvenaient-ils à prononcer les longs discours que nous leur connaissons sans perdre le fil? En recourant aux «lieux» et aux «images», répondrait un Cicéron. La mémoire serait une sorte de musée dont les oeuvres seraient présentées dans des salles que l'orateur traverserait en imagination pendant son discours.L'histoire des systèmes et techniques de mémorisation est un sujet à la fois marginal et central pour comprendre la formation de notre culture. Elle se situe au croisement de l'histoire des religions et de la morale, de la philosophie et de l'art.Dans cet ouvrage majeur, Frances A. Yates permet de comprendre ce qui se passe entre le moment où Giordano Bruno fait de l'imagination le principe supérieur selon lequel organiser la psyché et celui où Pascal et tant d'autres en feront la «folle du logis», la «maîtresse d'erreur et de fausseté». L'historienne britannique jette ainsi les bases de ce que pourrait être une histoire de l'imagination dans le monde occidental:une faculté de l'esprit aussi bien liée à la magie et l'hermétisme qu'à la naissance de la méthode scientifique.
Michelle Perrot est une des plus grandes historiennes contemporaines. Ses travaux, pionniers en matière d'histoire sociale, d'histoire des marges, des femmes et du genre, ont puissamment contribué à renouveler la discipline et ses objets. Les trois séquences qui rythment ce volume correspondent à ses thèmes de prédilection : ouvriers, marges et murs, femmes.
S'intéressant à travers eux à des figures de dominés, longtemps ignorés par les chercheurs, elle explore les traces à demi effacées de vies ordinaires qui, elles aussi, ont fait l'histoire : celles des ouvriers en grève ou des détenus du XIXe siècle, celles des enfants des rues, vagabonds ou autres Apaches de la Belle Époque. Celles enfin des femmes, toujours inscrites dans la diversité de leurs parcours et saisies dans la variété de leurs lieux de vie : la chambre, l'atelier, l'usine, la maison bourgeoise, la rue.
Longtemps étouffées ou inaudibles, les voix de ces femmes, ouvrières (« mot impie », selon Michelet) ou autrices (au premier rang desquelles George Sand), militantes ou anonymes, aux corps assujettis ou triomphants, exploités et désirés, sont restituées par la force d'un style singulier. Toutes semblent se rejoindre in fine dans la figure de Lucie Baud, « révoltée de la soie », meneuse de grève en Isère et inspiratrice de Mélancolie ouvrière, saisissant livre-enquête ici reproduit en intégralité.
Michelle Perrot a elle-même assuré la sélection, l'agencement et la présentation des textes retenus, portant un regard résolument lucide et personnel sur plus d'un demi-siècle de recherche et d'engagement. Ce volume permet d'en mesurer toute l'ampleur.
« Il est difficile de parler de Nohant sans dire quelque chose qui ait rapport à ma vie présente ou passée », écrivait George Sand. C'est par Nohant, par sa maison, que je l'ai rencontrée. Nohant, elle en rêvait comme d'un phalanstère d'artistes, une communauté égalitaire, un endroit de création et d'échanges par la musique (Liszt, Chopin, Pauline Viardot), la peinture (Delacroix, Rousseau), l'écriture (Flaubert, Dumas, Fromentin, Renan, Tourgueniev...), le théâtre, la conversation. Ce lieu, Sand l'a investi. Nohant est le creuset d'une utopie, pénétrée par le désir de changer le monde.
Pas plus que personne, Sand n'a réalisé son rêve. Aujourd'hui, il nous reste ce lieu, de pierre et de papier, témoin d'une histoire d'amour aux accents infinis.