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Croquant
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Les grands discours à l'ONU. De Harry Truman à Greta Thunberg
Chloé Maurel
- Croquant
- 9 Avril 2024
- 9782365124300
L'ONU est souvent vue comme une grande bureaucratie inefficace, un « machin » ainsi que la qualifiait le général de Gaulle en 1960... Mais ce livre entend montrer que l'ONU, c'est aussi la plus grande tribune mondiale, la « voix du monde », avec son Assemblée générale où les 193 Etats membres sont représentés, et où les grands leaders politique du monde peuvent s'exprimer devant tous les représentants des Etats membres. C'est la plus grande enceinte internationale, la porte-voix des peuples. Cette Assemblée générale, l'enceinte mondiale la plus démocratique puisque chaque Etat, riche ou pauvre, y est doté d'une voix, constitue un formidable forum pour les grands dirigeants, et elle a, au fil de l'histoire, permis à des personnages historiques de prononcer des discours marquants, qui ont eu un impact déterminant sur les relations internationales : guerre froide, conflit israélo-palestinien, attentats du 11 septembre 2001...
Ce livre mettra en lumière l'importance de ce forum mondial, en présentant pour la première fois une sélection des grands discours prononcés dans l'enceinte de l'ONU. En effet, cette organisation internationale, universelle, a accueilli des hommes et femmes politiques et personnalités célèbres, du dirigeant soviétique Khrouchtchev qui, lors de son discours en 1960, n'a pas hésité à taper sur la table avec ses chaussures, à Dominique de Villepin en 2003 dans son flamboyant plaidoyer contre la guerre en Irak, ou encore de Fidel Castro qui a fait en 1960 le plus long discours de l'histoire de l'ONU (d'une durée de 4h30 sans pause!) au leader palestinien Yasser Arafat en 1974, ou encore au pape François prononçant un émouvant discours à l'ONU en 2015, et jusqu'à la jeune Greta Thunberg, égérie des militants pro-climat, en 2019.
Les discours seront sélectionnés en fonction de l'importance internationale des orateurs, et de l'impact qu'ils ont exercé dans les médias et sur les relations internationales.
Ce ne sera pas un simple recueil de discours : chaque discours sera précédé d'un paragraphe introductif, présentant le contexte historique, le personnage, analysant des passages précis de chaque discours, et sera suivi d'un ou deux paragraphes d'analyse, examinant la portée, les répercussions de ces mots prononcés dans l'enceinte onusienne.
Caractère novateur du livre :
Un tel recueil commenté des discours prononcés à l'ONU n'a jamais été fait, et cette manière originale d'aborder l'histoire des Nations unies intéressera le public, car elle est vivante et centrée sur des personnages, elle a donc une dimension humaine, elle humanise cette institution internationale.
Public visé :
Ce livre intéressera tout d'abord le grand public amateur d'histoire et de relations internationales, car il permettra de revisiter toute l'histoire du XXe siècle, en rappelant les grands discours qui ont marqué la mémoire collective.
De plus, il pourra être très utile aux professeurs et étudiants d'histoire, de science politique, aux élèves de lycée, des classes préparatoires littéraires aussi bien que commerciales, ainsi qu'aux étudiants et enseignants de Sciences Po. -
De Mai 68 à l'avènement et l'essor du Mouvement de Liberation des Femmes (MLF) : témoignages et retours critiques
Monique Dental, Marie-Josée Salmon
- Croquant
- 8 Novembre 2022
- 9782365123488
Ce livre est issu de trois tables-rondes organisées par le Réseau Féministe « Ruptures » à l'occasion des quarante ans de Mai 68. Composé de témoignages de femmes qui, à cette époque, participaient ou non à des mouvements politiques, cet ouvrage présente un double intérêt : il nous fait vivre - ou revivre -l'éclosion puis l'essor du MLF. Ainsi, la singularité de l'évènement est d'abord saisie dans son avènement, son bouillonnement, son incandescence. Pour autant, ces témoignages n'excluent pas un regard distancié permettant une analyse rétrospective et des retours critiques.
À travers la diversité des parcours se dégage une idée clé : Mai 68 est la brèche, le creuset d'où surgira le mouvement de libération des femmes. Très vite, en effet, ces jeunes femmes, actrices et témoins de cet « évènement », éprouvent un malaise : aucune évocation de l'oppression des femmes. Quelle place peuvent-elles trouver dans le langage dogmatique des gauchistes ? Aucune. -
Lesbiennes de l'immigration ; construction de soi et relations familiales
Salima Amari
- Croquant
- 28 Juin 2018
- 9782365121590
Ce livre, issu d'une thèse, traite de la question du lesbianisme dans un contexte migratoire et post- migratoire en France.
Comment les rapports sociaux de sexe, de race, et de classe influencent-ils la construction sociale du lesbianisme ? Quel est le processus par lequel ces femmes construisent des parcours lesbiens dans un contexte migratoire et post-migratoire ? Pour l'auteure, ces lesbiennes agissent sur deux fronts : ce qui relève de la construction de soi d'une part et ce qui concerne la gestion de leurs relations familiales qu'elles tentent souvent de préserver, d'autre part.
Interroger scientifiquement les questions de genre et de sexualité n'est pas sans conséquences sur les débats politiques. Lorsque ces interrogations concernent le groupe social des « immigrés musulmans », la vigilance intellectuelle doit être renforcée. En effet, il est indispensable de garder un regard socio-historique critique sur les différentes catégorisations en matière de genre et de sexualité. Il ne doit être ni culturaliste, ni ethnocentré, ni androcentré.
Au terme de son travail de recherche, l'auteure conclut face aux contraintes socio- familiales hétéronormatives, de nombreuses lesbiennes maghrébines migrantes et d'ascendance maghrébine privilégient les loyautés filiales et familiales tout en continuant à vivre leurs vies affectives et sexuelles lesbiennes.
Comment les lesbiennes maghrébines migrantes et d'ascendance maghrébine se saisissent-elles de ces « nouvelles problématiques » en France ?
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Mes années MLAC ; petite chronique d'une grande conquête
Irène Jouannet
- Croquant
- 18 Mars 2020
- 9782365122368
Demandez aujourd'hui à des jeunes femmes si elles savent à quand remonte la loi libéralisant l'avortement, elles sauront plus ou moins qu'elle date des années 70 et que nous la devons à Simone Veil devenue aujourd'hui l'icône incontestée du féminisme. Mais si vous les questionnez sur l'histoire de cette loi, presque toutes ignorent les mouvements qui ont conduit, pour ne pas dire acculé le gouvernement Giscard à modifier la loi de 1920.
Maintenant si vous interrogez les ex-militantes du MLF, de Choisir, du Planning Familial ou du MLAC, elles vous diront toutes que c'est grâce à leur lutte que la loi a changé.
Le Manifeste des 343 « Salopes », publié le 5 avril 1971 dans le Nouvel Observateur, a incontestablement ouvert la brèche qui a mené à l'abrogation de la loi de 1920 et à la libéralisation de l'interruption de grossesse. Les 343 personnalités féminines qui n'ont pas hésité à s'exposer en affirmant publiquement qu'elles avaient avorté, ont permis que d'autres femmes se mobilisent pour le droit à l'avortement. Le MLF, à travers ses manifestations, ses meetings et ses happenings, a milité avec toute sa radicalité pour le droit des femmes à disposer de leur corps. Le Planning Familial, plus modéré, a oeuvré avec constance pour diffuser l'information sur la contraception, puis, entraîné par sa nouvelle présidente, Simone IFF, il s'est associé à la lutte pour le droit à l'avortement. Gisèle Halimi, à travers son mouvement « Choisir » et l'immense retentissement du procès de Bobigny, s'est battue sur le terrain législatif, quant au MLAC (Mouvement pour la liberté de l'avortement et de la contraception), en pratiquant au grand jour des avortements, en organisant des voyages groupés de femmes allant avorter en Hollande ou en Angleterre, il a porté le scandale sur la place publique et a ouvertement bafoué la loi en vigueur. C'est donc bien la convergence de tous ces mouvements qui a amené le gouvernement Giscard à modifier la loi.
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Pourquoi tant de votes RN dans les classes populaires
Gérard Mauger, Willy Pelletier
- Croquant
- 23 Mai 2023
- 9782365123891
Ce livre est une version actualisée, augmentée et remaniée, de l'ouvrage publié en 2016 aux éditions du Croquant1. Cette initiative était une conséquence de l'inquiétude suscitée par l'ascension du Front National (FN), non seulement chez les militants et les intellectuels « de gauche », mais aussi chez les chercheurs en sciences sociales. Les résultats des élections présidentielles et législatives de 2022 n'ont fait que la renforcer : d'où cette réédition actualisée et complétée par de nouvelles enquêtes. Mais cette nouvelle version ne vise pas tant (en tout cas pas seulement) à alerter qu'à tenter de rendre compte sociologiquement de l'essor du RN (Rassemblement National) avec la conviction qu'une meilleure connaissance du phénomène peut aider à en déjouer les mécanismes.
Une ascension inexorable ?
Rompant avec une « neutralité axiologique » souvent revendiquée, mais sans doute plus stratégiquement « opportune » qu'épistémologiquement fondée2, cette inquiétude doit évidemment quelque chose à la progression électorale du FN. Elle peut, en effet, sembler inexorable depuis le début des années 1980. Lors des élections législatives de mai 1981 consécutives à l'élection de François Mitterrand à la présidence de la République, le score du FN était encore, en effet, celui d'un groupuscule : 0,18 %. Mais, aux élections régionales de 2015, le FN obtenait 6,8 millions de voix au second tour, soit 30 % des suffrages et arrivait en tête au premier tour dans la moitié des régions et dans plus de la moitié des communes. En 2017, Emmanuel Macron obtenait deux fois plus de votes que Marine Le Pen. En 2022, l'écart s'est réduit à 16% des votants. Au deuxième tour des élections législatives de 2022, le RN obtenait, à la surprise générale, 89 députés, trois fois plus qu'en 1986, un véritable « tsunami » selon Jordan Bardella, alors président par intérim du RN. Il consolidait, en effet, son implantation dans l'ancienne France industrielle du Nord et du Nord-Est et dans la France du Sud-Est jusqu'aux Pyrénées orientales et il étendait son ancrage territorial. Avec ses 89 députés crédités d'une « image rassurante » (56 hommes, 33 femmes, 46 ans en moyenne, 42 titulaires de mandats électifs, 44 cadres et professions intellectuelles supérieures) et deux vice-présidences à l'Assemblée nationale, le RN, qui refuse désormais d'être classé « à l'extrême-droite », accélère sa « normalisation » et consolide sa « respectabilité »3.
Un parti d'extrême-droite ?
L'inquiétude suscitée par cette ascension est inséparable de l'hystérésis d'une représentation du FN. En mai 1981, son label « d'extrême droite » n'était guère discutable. Le FN de Jean-Marie Le Pen, antisémite, sinon négationniste, raciste et hostile à la démocratie, se recrutait chez d'anciens pétainistes, miliciens retraités, collaborateurs et vétérans de la Légion des Volontaires Français, chez des anciens de l'OAS et leurs sympathisants, chez des catholiques traditionnalistes4. L'inquiétude persistante suppose donc que le RN d'aujourd'hui n'est au fond pas très différent du FN d'hier. Mais cette pérennité de la représentation pose le problème de la « normalisation » du FN. Outre que l'actuelle direction du RN a travaillé à sa « dédiabolisation », les partis de droite « classique » (l'UMP puis LR), en reprenant à leur compte des thèmes de prédilection du FN comme « l'immigration », « l'assistanat » ou « l'insécurité », ont objectivement contribué à leur « banalisation » et, ce faisant, à celle du RN. Par ailleurs, la campagne d'Éric Zemmour pour les élections présidentielles de 2022 a contribué à la « dédiabolisation » du RN en permettant son « recentrage »5. Mais, à l'inverse, les « partis de gouvernement » (du Parti Socialiste - PS - à La République En Marche - LREM), dont « l'épouvantail Le Pen » est devenu l'ultime argument électoral (« faire barrage au RN »), soulignent, non sans quelques arguments, la continuité entre le RN et le groupuscule d'extrême-droite des années 19706.
La question du classement politique du RN se pose d'autant plus que l'invention d'un nouveau label politique - le « populisme » - plus proche, selon Annie Collovald, d'une nouvelle « insulte politique » ou d'une « injure polie »7 que d'un concept, permet d'assimiler La France Insoumise (LFI) au RN et de disqualifier LFI par « contagion » (« le danger populiste »). En fait, Daniel Gaxie montre que le programme du RN est caractérisé par ses ambiguïtés, sinon ses incohérences8. Ils constituent autant d'atouts pour un « catch large party » où peuvent se reconnaître à la fois des militants d'extrême-droite (« faute de mieux »), des catholiques traditionnalistes (« pour défendre la famille »), des « rapatriés d'Algérie » (« pour endiguer l'immigration »), des professionnels du maintien de l'ordre (« pour lutter contre la délinquance »), des indépendants de toutes sortes (« contre la fiscalité et les charges ») et diverses fractions des classes populaires (« des fâchés pas fachos », dont on s'efforcera ici d'élucider « les raisons »). Dans cette perspective, il faudrait prolonger l'enquête en analysant le RN comme « un champ » (où s'affrontent diverses tendances), lui-même pris dans un « champ politique » où chaque parti doit se démarquer de ses concurrents pour conquérir « le monopole de l'usage légitime des ressources politiques objectivées (droit, finances publiques, armée, police, justice, etc.) »9. À l'issue des élections de 2022, le RN est l'un des quatre pôles d'un champ politique structuré par quatre blocs à peu près équivalents : en substance et dans l'ordre, celui d'Emmanuel Macron, celui de l'abstention, celui de Marine le Pen et celui de Jean-Luc Mélenchon10. Le RN y apparaît, selon Daniel Gaxie, comme « un parti marginal, reconnu et stigmatisé » ou « un parti marginal ascendant »11. Mais l'abstention reste le premier « parti » de France12, obérant, scrutin après scrutin, la légitimité des élus. En dépit des appels de la NUPES (Nouvelle Union Populaire Écologique et Sociale), 67 % des ouvriers et 64 % de ceux dont le revenu mensuel est inférieur à 1250 euros se sont abstenus (IPSOS). La Nouvelle Union Populaire Écologique et Sociale (NUPES) cumule 142 députés, ébauchant ainsi la renaissance d'une « gauche de gauche » dans l'espace politique laissé vacant par la décomposition de « la gauche PS-PC », mais sans pour autant reconquérir l'adhésion des classes populaires13 à l'exception des banlieues des grandes villes. Au deuxième tour des élections législatives, la remobilisation espérée des abstentionnistes n'a pas eu lieu, l'abstention - 53,77 % - a même progressé par rapport au premier tour14.
Un parti populaire ?
Le désarroi provoqué par la progression électorale du RN est également lié aux questions que posent à la fois cette extension de l'abstentionnisme des classes populaires et celle des votes populaires en faveur du RN.
Jusqu'à une date récente, l'abstention était restée un phénomène relativement secondaire (autour de 20 % des inscrits) et, de ce fait, peu étudié. En avril 1848, alors que la population était encore pour moitié analphabète, la participation à l'élection de l'Assemblée constituante (au suffrage universel masculin) atteignait 83,6 % des inscrits. Et lors des élections de mai 1936, où le Front populaire l'avait emporté, le taux d'abstention était l'un des plus faibles de toute l'histoire des élections législatives : 15,6 %. De nouveaux records de participation sont atteints au cours des années 1970 où la gauche dispute le pouvoir à la droite : l'élection présidentielle de 1974 où s'affrontent François Mitterrand et Valéry Giscard d'Estaing mobilise près de 9 électeurs sur dix (87,3 %) et, lors du second tour des élections législatives de 1978, 84,9 % des électeurs inscrits se rendent aux urnes. Mais, à partir de la deuxième moitié des années 1980, l'abstention s'envole : au deuxième tour des élections législatives de 2007, près de quatre inscrits sur dix s'abstiennent. Aux élections européennes de 2014, on compte 56 % d'abstentions, 50 % aux élections régionales et départementales de 2015, 25 % d'abstentions au deuxième tour de l'élection présidentielle de 2017, 52 % d'abstentions au premier tour des élections législatives de 2017. Ce désintérêt voire cette aversion à l'égard de la vie politique15 revêtent différentes formes : non-inscription, mal inscription, abstention, inégalités croissantes de politisation, votes sans conviction, etc.16 De sorte qu'une « démocratie de l'abstention »17 semble s'être mise en place où c'est l'inégale distribution du vote et de la non-inscription (massivement populaires) qui met en évidence la persistance des clivages de classe18.
Comment rendre compte, par ailleurs, de l'essor du vote RN dans les anciens bastions ouvriers du Nord et de l'Est désindustrialisés ou dans « le Midi rouge »Â ? Si nul ne s'étonne de voir un petit commerçant (supposé « naturellement poujadiste ») ou un bourgeois catholique traditionnaliste voter FN, le vote populaire en faveur du RN interpelle à la fois « ceux pour qui le peuple est une cause à défendre »19, ceux qui tendent à « accorder au peuple la connaissance infuse de la politique »20 et, plus encore, sans doute, ceux qui persistent à croire à la vision messianiste de la « classe ouvrière ». Le vote populaire en faveur du RN les confronte à un paradoxe du même genre que celui qu'a étudié Thomas Frank aux États-Unis : Pourquoi les pauvres votent à droite ?21. La déconvenue et la perplexité sont d'autant plus grandes que ce vote populaire en faveur du RN semble valider le point de vue de « ceux pour qui le peuple est un problème à résoudre »22 et consolider le « racisme de classe » de ceux qui assimilent les ressortissants des classes populaires à des « beaufs » machistes et homophobes, racistes et xénophobes, etc.23 La controverse suscitée par le vote populaire en faveur du RN réactive l'alternative classique entre « misérabilisme » et « populisme »24, deux formes de l'ethnocentrisme des classes dominantes25. Seule l'enquête peut dénouer ce genre de controverse en tentant à la fois de cerner l'ampleur, la distribution et l'évolution du vote populaire en faveur du RN, d'en comprendre « les raisons » socialement diversifiées et d'en élucider « les causes », c'est-à-dire de rendre compte de l'ancrage - socialement différencié - de ces diverses « raisons » de voter FN.
Objectiver le vote populaire en faveur du RN Mais comment cerner l'ampleur, la distribution et l'évolution du vote populaire en faveur du RN ? Toute tentative de mesure est confrontée à la difficulté d'étudier les rapports entre deux entités mal définies. Dans la mesure, d'une part, où le RN est un « parti attrape-tout », cerner « ce qu'est le RN » au regard de ceux qui votent en sa faveur - « un conglomérat » plutôt qu'un « électorat »26 - est un objet d'enquête. La question renvoie ainsi à l'inventaire des « raisons » de voter RN. Dans la mesure, d'autre part, où « le populaire » n'est plus ce qu'il était encore dans les années 1970, délimiter les contours des classes populaires dans la société française contemporaine rencontre également de nombreuses difficultés27. « La classe ouvrière » a subi une véritable éclipse consécutive à la fois à la désindustrialisation massive, à l'affaiblissement intellectuel et politique du marxisme, à l'effondrement du socialisme « réellement existant », à la débâcle électorale du PCF (« le parti de la classe ouvrière ») et au déclin de la CGT28. Mais si la vision d'un espace social divisé en classes antagonistes s'est progressivement défaite, on peut, néanmoins, mettre en évidence des critères qui justifient le regroupement des ouvriers et des employées au sein des « classes populaires ». Ce label démarque le groupe ainsi constitué des autres groupes sociaux : petitesse du statut professionnel ou social, étroitesse des ressources économiques, éloignement par rapport au capital culturel29.  Certes, ces classes populaires ne sont pas ce que la classe ouvrière n'a jamais été ailleurs que dans l'imagination des intellectuels. Mais, ouvriers et employées (il s'agit de femmes pour 80 % de l'effectif) représentent plus de la moitié de la population active. Relativement cohérentes, ces classes populaires sont néanmoins traversées par de nombreux clivages à commencer par celui entre « established » et « outsiders »30 que creusent l'effritement de la condition salariale, l'extension du chômage de masse, de la précarisation et de l'insécurité sociale qui en résultent31. Force est alors de supposer que les différentes composantes des classes populaires n'ont ni les mêmes raisons de s'abstenir, ni les mêmes représentations du RN, ni les mêmes raisons de voter en sa faveur.
Ainsi peut-on comprendre le caractère rudimentaire de données statistiques fondées sur la distinction entre « CSP + » et « CSP - » ou, dans le meilleur des cas, celle entre ouvriers et employées, pour tenter d'objectiver le vote populaire en faveur du RN. En l'état des données disponibles, Patrick Lehingue avait montré en 2016, que, même si les votes d'ouvriers et employées représentaient plus de la moitié des suffrages obtenus par le FN, ce vote FN ne concernait qu'un ouvrier sur sept et que c'était l'abstention - et de très loin - qui était alors le « premier parti ouvrier »32. Outre le progrès spectaculaire du RN aux élections présidentielles, les élections de 2022 montrent que le vote populaire exprimé en faveur du RN se situe entre un peu moins d'un tiers et un peu plus d'un quart des votants de la catégorie et mettent en évidence un ancrage du RN dans les fractions les plus démunies (scolairement et économiquement) des classes populaires33. Quant aux « raisons » de voter RN dans les classes populaires (sans grande compétence ni intérêt politique), on peut supposer que le RN est parvenu à inculquer, outre l'hostilité à des partis politiques interchangeables (« l'UMPS »), une vision du monde qui oppose les « nationaux » aux « étrangers ». Ce clivage « ethno-racial » occulte ainsi les divisions internes au groupe national (la lutte de classes) et fait de « l'immigration » la source de tous les maux (le chômage, la délinquance, le terrorisme) et des immigrés, de « mauvais pauvres » associés à la délinquance et à l'assistance.
« Ce que voter RN veut dire » Pour tenter de cerner plus précisément « ce que voter RN veut dire » dans les classes populaires, il faut rompre d'abord avec la convention du sens commun savant qui voudrait que le vote exprime le « choix » d'un programme et de représentants politiques et que, de ce fait, les électeurs pensent ce que pensent leurs représentants qui, eux-mêmes, expriment leur point de vue. L'enquête montre, en effet, que la connaissance des programmes, du personnel et des idées politiques est très inégalement distribuée : y compris chez ceux qui participent aux élections. Plus spécifiquement, l'abstention pose le problème des conditions sociales de possibilité d'une « opinion politique », c'est-à-dire de la compétence sociale et technique que suppose la participation à la vie politique34 : ainsi met-on en évidence une « logique censitaire » de fait35. De façon générale, l'enquête montre non seulement l'inégale distribution de la participation électorale et des compétences politiques, mais aussi celle de « l'intérêt » pour la politique36. Plus précisément, elle établit la relation très étroite entre le capital scolaire et les chances d'avoir une opinion. En fait, la propension à prendre la parole est proportionnelle au sentiment d'avoir droit à la parole37 : elle suppose à la fois une « compétence technique », c'est-à-dire à la capacité de comprendre le discours politique, mais aussi une « compétence sociale », c'est-à-dire le sentiment d'être statutairement fondé à s'occuper de politique. En outre, la professionnalisation du métier politique - maîtrise d'un corpus de savoirs spécialisés et d'un lexique (qui emprunte de plus en plus souvent à la « science » économique) et d'une rhétorique spécifiques - implique une dépossession politique croissante des classes populaires. C'est dire qu'on ne peut pas déduire, par exemple, du vote RN d'un cariste ou d'une femme de ménage leur adhésion au programme du RN. Si ces votes RN n'ont évidemment pas « rien à voir avec le RN », il faut tenter de cerner leurs représentations du vote RN dont le degré de conformité au programme du RN peut être très approximatif : que veut dire celui ou celle qui vote RN ? L'enquête met en évidence la grande dispersion sociale et la volatilité des votes FN : celles et ceux qui votent FN ne constituent pas un « électorat » mais, selon l'expression de Daniel Gaxie, « un conglomérat »38. Contre le racisme de classe et l'ethnocentrisme populiste, ce livre rassemble pour l'essentiel des enquêtes qui, dans différents registres, tentent d'élucider les « raisons » et les causes des votes RN au sein des classes populaires.
Ordre d'exposition Dans la première partie, Patrick Lehingue met en évidence deux ou trois « idées reçues »Â sur l'électorat du Front National, Daniel Gaxie souligne les contradictions de sa « résistible ascension » du FN. Julian Mischi montre ce que l'essor du FN doit à « la décomposition de la gauche ».
La deuxième partie aborde la question très controversée de la géographie du vote FN, opposant métropoles et périphéries, à travers deux enquêtes ethnographiques : celle d'Emmanuel Pierru et Sébastien Vignon s'intéresse aux territoires ruraux, celle de Violaine Girard aux zones périurbaines. L'enquête menée par le collectif « Focale » met en évidence les effets à long terme des héritages politiques de gauche et des sociabilités syndicales : longtemps après, ils font toujours obstacle au vote FN.
La troisième partie, la plus développée, est consacrée aux « raisons » des votes FN des classes populaires. Stéphane Beaud et Michel Pialoux, mettent d'abord en évidence les effets de « l'exacerbation des luttes de concurrence » au sein des classes populaires. Louis Pinto montre comment la promotion d'un « nouvel ordre moral » assure une cohérence implicite du « conglomérat RN ». Stéphane Beaud et Michel Pialoux étudient ensuite le cas d'un couple d'ouvriers confronté aux « désordres du quartier ». Gérard Mauger montre ce que le vote FN peut devoir au « souci de respectabilité » dans la situation de procès où sont prises les fractions « établies » et « marginales » des classes populaires. Romain Pudal, tente d'élucider « l'attrait » qu'exerce le FN sur les sapeurs-pompiers. Enfin, Lorenzo Barrault-Stella et Clémentine Berjaud, s'intéressent aux votes FN de deux jeunes de Lycée Professionnel.
La quatrième partie montre qu'en dépit des apparences (Jordan Bardella en « fils du peuple », « immigré » de surcroît), le RN, si l'on s'en tient à la composition de son appareil, est loin d'être un parti « populaire ». Safia Dahani montre qu'il est investi par les cadres du secteur privé (« en haut à droite » de l'espace social) et Guillaume Letourneur que « les petits moyens » échouent à s'y faire une place à la mesure de leurs ambitions.
En conclusion, Willy Pelletier témoigne de « l'ethnocentrisme militant » des groupuscules antifascistes et Gérard Mauger et Willy Pelletier s'interrogent sur les conséquences politiques à tirer des enquêtes rassemblées dans ce livre. -
Après trois guerres en dix ans, la Bande de Gaza survit dans une situation de précarité socio- économique aggravée depuis douze ans par un sévère blocus qui affecte le mouvement des personnes et des biens. L'impossibilité de sortir de la Bande de Gaza, force les familles « à se débrouiller » dans des situations parfois dramatiques. De l'extérieur, on se demande jusqu'à quand Gaza tiendra sans tomber dans le désordre civil, et comment après cinquante ans d'occupation et de blocus israéliens, les Gaziotes continuent à faire société, à maintenir malgré tout une organisation civique : faible émigration, délinquance limitée, maintien des liens sociaux. Plus encore Gaza fait preuve de dynamisme économique : inventivité, investissements immobiliers, développement de l'entreprenariat. Cependant, depuis la dernière offensive de 2014, des signes inquiétants se manifestent : augmentation de la consommation de drogue, violences familiales, syndromes dépressifs avec suicides, projets de départ chez les jeunes adultes. Serait-on arrivé au point de basculement ?
Dans nos entretiens de terrain, les Gaziotes, hommes et femmes, expliquent certains défis par une forme de démobilisation, le chômage, le danger constant, l'absence d'avenir. Ils ont généralement recours aux ressources qui restent précaires, aux mécanismes de survie en réduisant les dépenses et c'est la femme qui en revendique la responsabilité. La capacité de résistance à ce que les Gaziotes nomment la situation, alors que le conflit s'éternise, tient dans le concept de résilience, aussi changeant soit-il, pour décrire l'endurance et le maintien de la vie sociale.
La Bande n'a pas le statut officiel de prison. À de rares exceptions près, il est impossible d'y entrer et d'en sortir. Elle est pourtant la plus grande prison du monde à ciel ouvert, entourée de murs et de clôtures électriques, expression d'une volonté délibérée de séparer, d'enfermer, d'exclure, de punir toute une société. Ce ne peut être un hasard si l'exclusion territoriale de Gaza est consécutive des premières colonies. Les Israéliens ont créé des routes privées et des barrages dans le but fallacieux de protéger les colons. Ils ont ensuite édifié un mur dans lequel les lieux de passage sélectionnent sévèrement les Gaziotes qui le franchissent. La séparation et l'exclusion ont progressivement aggravé les contraintes physiques. Une géographie politique a été conçue, sous prétexte de sécurité, sur le principe de la séparation.
Alors quel est le mobile de cette résistance militante que l'on a nommée résilience ? Par les entretiens qui ont été conduits puis par le suivi téléphonique maintenu depuis 2016, s'impose le paradoxe, quel que soit le statut social, du refus de quitter Gaza. L'enracinement dépasse le politique, le sumud, et le sentiment de résistance. Un tel refus se fonde sur la certitude d'un avenir meilleur. Nombreux sont ceux qui pourraient refaire leur vie ailleurs, mais l'idée n'a pour eux pas de sens. Alors, quel est le ressort de cette volonté, que nous appelons résilience, qui s'exprime par l'intensité des liens familiaux, une gestion serrée de l'économie domestique, une créativité dans l'utilisation des ressources disponibles. La question a soutenu toute l'enquête. La réponse qui se dessine serait une force morale liée à une fidélité communautaire envers un pays qu'ils savent fondamentalement le leur, dont le mot loyauté donnerait le meilleur sens.