Alexandra Kollontaï, quelle femme ! Et quel destin !
Aristocrate russe, elle rejette très tôt son milieu, son pays et choisit la révolution et le monde. Révolution de 1905, exil, prison, agitation clandestine, et, en 1917, elle est avec Lénine dans la révolution. Elle fait partie de son premier gouvernement, ministre - commissaire du peuple - alors qu'en Europe les femmes n'accéderont, et rarement, à la fonction de ministre qu'après la Seconde Guerre mondiale. Puis, cinq ans plus tard, première femme ambassadeur que l'histoire ait connue.
Mais Alexandra Kollontaï, qui parle plusieurs langues, remarquable oratrice, sera aussi un tribun célèbre, s'adressant avec facilité aux ouvriers américains, aux socialistes allemands, aux marins révoltés de Kronstadt ou aux femmes musulmanes de l'Asie centrale, partout électrisant les auditoires fascinés.
Kollontaï est aussi une féministe passionnée, théoricienne de l'amour libre, combattant pour l'émancipation et les droits des femmes. Et encore une amoureuse dont les amours tumultueuses choquent Lénine, ce qui ne l'empêche pas d'être une mère attentive à son fils.
Autre Kollontaï, l'écrivain dont les écrits politiques, les romans, le journal tenu tout au long d'une vie constituent une oeuvre remarquable dont la qualité littéraire est unanimement reconnue.
Cette existence multiforme, si dense n'a pas empêché Alexandra Kollontaï de s'imposer à l'attention de ses contemporains par sa beauté inaltérable et une élégance constante, saluée toujours par la presse qui la présenta comme un modèle, préfigurant ainsi les « icones » médiatiques du XXe siècle.
Enfin, et ce n'est pas le moindre de ses exploits, Alexandra Kollontaï sortit victorieuse de la folie destructrice de Staline. Alors que Staline déshonora et extermina toute la vieille garde bolchevique, Kollontaï échappa au sort tragique de tous ses camarades de combat et vécut, indemne et active, à quelques mois près, aussi longtemps que Staline.
Pour retracer ce destin incroyable et comprendre cette personnalité hors du commun et le demi-siècle qu'elle aura marqué, l'auteur a rassemblé une documentation considérable - archives, écrits de Kollontaï, mémoires de bolcheviks présents à l'époque - et des études historiques qui y sont consacrées.
Historienne de la Russie, auteur de L'Empire éclaté, Hélène Carrère d'Encausse, membre depuis 1991 de l'Académie française dont elle est Secrétaire perpétuel depuis 1999, a notamment publié aux Editions Fayard Le Malheur russe, Nicolas II, Lénine, Les Romanov, Six années qui ont changé le monde, 1985-1991, Le Général de Gaulle et la Russie, La Russie et la France.
Pour les auditeurs d'Hérodote, il ne faisait pas de doute qu'Artémise, capitaine de vaisseaux qui s'était illustrée à Salamine au ve siècle av. J.-C., avait effectivement participé à la célèbre bataille navale, elle qui avait dirigé la cité d'Halicarnasse et qui, bien que Grecque, avait été membre de l'état-major perse. Pour les historiens postérieurs, l'exploit d'Artémise est en revanche incroyable : comment des citoyens d'Halicarnasse auraient-ils pu accepter qu'une femme les gouverne et commande leurs navires ?
À partir du cas singulier d'Artémise, Violaine Sebillotte Cuchet mène une vaste enquête. Elle dévoile le regard que les habitants des cités grecques portaient sur les femmes au pouvoir, les rapports de force qui organisaient alors les relations sociales, les manières de construire la masculinité, la féminité et l'altérité barbare. La vie d'Artémise, longtemps considérée comme exceptionnelle, s'éclaire ici des fragments de vie connus des autres femmes de l'Antiquité grecque, contre les stéréotypes construits au fil des siècles.
Violaine Sebillotte Cuchet est professeure d'histoire grecque ancienne à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Elle est spécialiste d'histoire des femmes et du genre.
Rabats :
« Elle avait nom Artémise, était fille de Lygdamis [...]. Elle régnait sur Halicarnasse, Cos, Nysiros, Calymnos, et fournissait cinq vaisseaux. De toute la flotte, ses navires étaient, après ceux des Sidoniens, les plus réputés ; et, de tous ceux qui prirent part à l'expédition, c'est elle qui donna au Roi les meilleurs avis. » Hérodote, Histoires VII, 99.
« Si l'un de nous donne la moindre prise à ces femmes, rien n'échappera à leur inlassable industrie : elles iront jusqu'à construire des navires, et, nouvelles Artémises, jusqu'à entreprendre de parcourir la mer pour nous livrer bataille ! » Aristophane, Lysistrata, 675-685.
Sa vie ressemble à un roman d'aventures écrit par un scénariste.
Germaine de Staël a connu les ors de Versailles quand son père, Necker, était principal ministre de Louis XVI ; à Paris comme à Coppet, elle a régné sur ce que les Lumières ont produit de plus talentueux ; son roman Corinne a été un immense succès et ses livres politiques, lus de Weimar à Pétersbourg, ont exaspéré les adversaires de la liberté, mais elle a eu à ses pieds les meilleurs esprits.
Mme de Staël a aussi passé la moitié de sa vie en exil ou sur les routes, en quête d'une sérénité inaccessible et d'un amour inatteignable. Cette fille à papa est rentrée dans l'ombre des géants du temps - Napoléon, Constant ou Chateaubriand - et ses idées « libérales » autant que sa sensibilité débordante apparaissent hors de saison. Et pourtant...
Parti sur les traces de cette inconnue célèbre, c'est à une découverte que nous convie Michel Winock. Mme de Staël, de tempérament mélancolique, ne se résigne pas au malheur. Elle ne renonce à rien, se moque du qu'en-dira-t-ton, ouvre sa porte aux amis, même menacés, comme aux contradicteurs. Elle a pour boussole la liberté et, pour source d'énergie, l'enthousiasme. « Avec elle, écrit Chateaubriand, s'abattit une partie considérable du temps où j'ai vécu : telles de ces brèches, qu'une intelligence supérieure en tombant forme dans un siècle, ne se refermant jamais. »Michel Winock, professeur émérite à Sciences Po, a produit une oeuvre historique de première importance parmi laquelle on rappellera Clemenceau (prix Aujourd'hui) et Le Siècle des intellectuels (prix Médicis essai).
Hélène Berr a 24 ans au moment où la vie lui est arrachée, en 1945, à Bergen-Belsen. Le centenaire de sa naissance est l'occasion de cette publication. Cet hommage, pleinement chargé de dire la vie et la mémoire, permet de faire visiter son Journal par des femmes et des hommes sans distinction d'âge ou d'appartenance sociale ou religieuse, il rallie à la figure d'Hélène Berr tous les autres disparus avec elle sans mot ni trace derrière eux.
Il est assez curieux ce mot « centenaire » apposé tout près du nom d'Hélène Berr et avec lequel il ose même faire la rime. Presque inapproprié ou anachronique tant Hélène Berr est restée cette jeune femme à la grâce altière et d'éternelle jeunesse. 24 ans. 24 ans au moment où la vie lui est arrachée, en 1945, à Bergen-Belsen, laissant derrière elle son Journal, mais emportant dans le néant toutes les autres promesses d'amour et de créativité qu'elle sentait prêtes à éclore en elle. Pas une année de plus ne viendra égrener le décompte de ce temps qui passe inexorablement, vieillit les visages mais pas le sien, dessine des projets ou conforte des vocations mais pas la sienne.
C'est en réponse à cette injustice qu'est née la volonté d'une publication à l'occasion de cette date symbolique. Un hommage certes, mais un hommage pleinement chargé de dire la vie et la mémoire, l'une et l'autre toujours aussi vives. Une célébration de son Journal donc, telle qu'elle l'aurait peut-être souhaitée, par des femmes et des hommes de la sphère publique ou non, sans distinction d'âge, d'appartenance sociale ou religieuse et dont le ressenti serait aussi un témoignage pour tous les autres partis avec elle, mais sans laisser le moindre mot ni la moindre trace.
Telle qu'elle se structure entre l'Antiquité tardive et le haut Moyen Age, la religion chrétienne ne faisait pas la part belle aux femmes : assimilées à Eve, l'alliée du Serpent, elles étaient exclues du sacerdoce et cantonnées dans une position mineure au sein de l'Eglise. Pourquoi, à la fin du Moyen Age, la religion s'est-elle féminisée, par une adhésion plus forte des femmes à la foi et à la pratique, par une féminisation du discours religieux, par une alliance ambiguë du prêtre et de la dévote communiant dans une religion de la Mère et du Fils ? Pourquoi, selon l'audacieuse expression de Michelet, « Dieu a-t-il changé de sexe, pour ainsi dire » ?
Au tournant des XIe et XIIe siècles, au temps de la réforme dite grégorienne, la tradition interdisait aux femmes de pénétrer dans certains sanctuaires ; mais se met en place une triade Marie, Eve et Madeleine où, entre les deux premières images, antinomiques, s'ouvre par la troisième l'interstice d'un accès au salut au prix de la pénitence. C'est l'époque de la fondation du monastère mixte de Fontevraud où les hommes étaient soumis aux femmes.
Le vrai retournement survient au xiiie siècle avec François d'Assise qui, célébrant des allégories féminines telle « dame Pauvreté », se présentant lui-même en mère de ses fils spirituels, offre aux femmes une icône à laquelle s'identifier. Claire d'Assise, de son côté, échappe à ces jeux d'inversion pour atteindre à une vision de l'humanité au-delà des genres.
Aux xive et xve siècles, une floraison de saintes de très modeste renommée, surtout en Italie, marque ce mouvement de féminisation du religieux. Leur parole se fait entendre, telle celle d'Angèle de Foligno. Elles se mettent à jouer la Passion du Christ par les places et les rues, telle Claire de Rimini. Elles fédèrent la mémoire des cités et accèdent enfin à une écriture autonome où s'exprime leur désir d'explorer les mystères de la foi avec toute la force de leur raison.
Ancien membre de l'Ecole française de Rome, ancien directeur de l'Institut de recherche et d'histoire des textes, directeur de recherche au CNRS, Jacques Dalarun, médiéviste de réputation internationale, a dirigé l'édition du Moyen Age en lumière (Fayard 2002), qui a connu un succès retentissant. Il a publié en dernier lieu chez Fayard Vers une résolution de la question franciscaine (2007).
Un angle de vue neuf, tout à fait inattendu, sur la tragédie du Proche-Orient et ses prémisses permet d?en déplacer ici les responsabilités. Viviane Forrester démontre à quel point les Israéliens, les Palestiniens ne sont pas victimes les uns des autres, mais les uns et les autres d?une longue Histoire européenne, celle des crimes antisémites européens, dont les uns furent la proie et auxquels les autres n?eurent aucune part.
Détournée au Proche-Orient, la dette leur échoit, néanmoins, de ce désastre occidental, qui taraude encore les consciences. Car si les Alliés menèrent une guerre classique, héroïque et victorieuse contre l?Allemagne expansionniste, la guerre contre le nazisme n?eut, en revanche, pas lieu. Une documentation précise, irréfutable, imprévue, révèle les dimensions tragiques de l?abandon conscient, délibéré, des Européens juifs par l?Occident tout au long du Troisième Reich.
L?escamotage de ses origines fait paraître inextricable le drame israélo-palestinien. Or aujourd?hui, leur tragédie commune rend paradoxalement les Israéliens et les Palestiniens plus proches les uns des autres que des puissances occidentales qui prétendent au rôle d?arbitre. Quand ces deux peuples négocieront-ils enfin sans intermédiaires ? Quand passeront-ils du passionnel au politique ?
Dans un grand souffle et avec émotion, une voie est ici tracée.
Simone Weil (1909-1943) occupe une place tout à fait singulière dans l'histoire de la philosophie française contemporaine. Sans doute son acharnement à vivre en conformité absolue avec ses principes y est-il pour beaucoup et l'image de cette femme atteinte de tuberculose se laissant mourir, à Londres, en 1943, des privations qu'elle s'est imposées parce qu'elle n'est plus en état de combattre, illustre mieux qu'aucun autre de ses actes la nature de son engagement (physique autant que moral et intellectuel) du côté des pauvres, des démunis, des humiliés, des vaincus.Vérité et justice, tel est l'idéal qu'elle poursuit en véritable croisé. Elle le nourrira d'un travail intellectuel acharné et d'un engagement résolu dans tous les grands combats politiques de son temps: disciple d'Alain, agrégée de philosophie (1931), pénétrée des traditions chrétienne, grecque et hindoue, mais lectrice tout aussi éclairée des découvertes de la science moderne, elle s'établit comme ouvrière chez Alsthom puis Renault (1934-1935), s'engage aux côtés des combattants antifranquistes pendant la guerre d'Espagne (1936), se fait ouvrière agricole en 1941, avant de rejoindre la France libre en 1942-1943.Le destin exceptionnel de cette femme en quête d'absolu est ici raconté avec minutie et souci d'exactitude par quelqu'un qui l'a aimée et ne s'en cache guère. Son travail fait aujourd'hui référence.Nouvelle édition.Agrégée de philosophie, docteur ès lettres, conservateur à la Bibliothèque nationale, Simone Pétrement a été l'une des condisciples de Simone Weil à Henri-IV et à l'Ecole normale supérieure. Elle est restée en relation constante avec elle jusqu'en 1942.Outre cette biographie, publiée en 1973, Simone Pétrement a écrit plusieurs ouvrages savants qui font autorité, parmi lesquels Le Dualisme dans l'histoire de la philosophie et des religions (Gallimard, 1946), Le Dualisme chez Platon, les gnostiques et les manichéens (PUF, 1947) et Le Dieu séparé (Cerf, 1984). Elle a par ailleurs beaucoup contribué à l'édition des oeuvres de Simone Weil. Elle est décédée en 1992.
Aux États-Unis, elle est considérée comme l'équivalent d'un Primo Levi. En France, son ouvre littéraire et théâtrale est lue et jouée depuis quarante ans. Mais qui connaît réellement Charlotte Delbo, morte en 1985 ? Pour la première fois, une biographie rend hommage à cette femme d'exception. Secrétaire de Louis Jouvet, résistante communiste, elle est arrêtée en 1942 par la police française en compagnie de son mari, Georges Dudach, fusillé quelques mois plus tard.
Elle a 28 ans et lui dit adieu dans une cellule de la prison de la Santé. Ce qui l'attend, elle, c'est la déportation : elle fait partie du convoi du 24 janvier 1943, le seul convoi de femmes politiques à avoir jamais été envoyé à Auschwitz. Sur les 230 déportées, seules 49 reviennent, après 27 mois de captivité. Charlotte Delbo se jure alors d'être celle qui témoignera de l'incroyable sororité qui les a unies et leur a permis de survivre.
Dans toute son oeuvre - en prose ou en vers -, elle dit et célèbre le courage de ces femmes. Militante passionnée des droits de l'homme, elle ne cessera plus de combattre les injustices et de mettre sa plume au service des plus faibles. Charlotte Delbo, une conscience dans le siècle.
En 1857, un groupe de jeunes gens s'abandonnant aux joies d'une partouze dans un hôtel particulier sont condamnés pour outrage public à la pudeur, parce qu'un curieux les épiait par le trou de la serrure. En 1893, les étudiants des Quatr'z Arts déclarent aux juges la guerre du nu. Dans les années 1960, les nudistes et les femmes en monokini provoquent des controverses passionnées. Chaque fois les mêmes questions se posent : où finit le public et où commence le privé? Que peut-on montrer, que doit-on cacher?
A travers une enquête qui mêle le droit, l'architecture, la littérature et la psychiatrie, Marcela Iacub raconte l'histoire de la pudeur publique. On y découvre comment le droit a longtemps partagé le monde visible entre licite et illicite, substituant à l'espace réel un espace institutionnel et politique.
Aujourd'hui, ce vieux mot de pudeur a disparu de nos codes pour être remplacé par celui de Sexe. Mais, loin de faire le récit épique d'une liberté durement conquise, Marcela Iacub analyse les transformations des techniques par lesquelles l'Etat s'est donné notre sexualité en spectacle au cours des deux derniers siècles, et a conditionné nos espaces, nos vêtements, nos pratiques et même certaines de nos maladies mentales. Elle invite ainsi à une histoire politique du regard.
On retrouve dans Par le trou de la serrure les ingrédients qui ont fait le succès des précédents ouvrages de Marcela Iacub : un examen sans concession des illusions de notre prétendue libération sexuelle, et un art tout particulier de faire du droit une discipline totale, à la fois poétique et critique.
La philosophe Hannah Arendt, auteur des Origines du totalitarisme, couvrit à sa demande le procès d'Eichmann à Jérusalem en 1961 pour le compte du New Yorker. Le livre qui en est l'aboutissement, Eichmann à Jérusalem, sous-titré Rapport sur la banalité du mal, déclencha immédiatement la polémique aux États-Unis puis lors de sa publication en France en 1966, tandis que d'aucuns déconseillèrent même sa publication en Allemagne (1964). Elle y soutenait qu'Eichmann n'était ni un Iago ni un Macbeth, imputant ses crimes à la pure absence de pensée, ce qui, précisait-elle, n'équivalait nullement à la « stupidité ». Comment s'explique dès lors le titre du présent entretien qu'elle accorda à l'historien allemand Joachim Fest, auteur notamment des Maîtres du IIIe Reich ? De même comment expliquer que, bien qu'Eichmann lui répugnait, s'exprimant sur Albert Speer, l'architecte de Hitler qui devint ensuite ministre de l'Armement, elle puisse affirmer dans la seconde partie de leur entretien : « L'homme me plaît, mais je ne parviens pas à le comprendre » ? Faut-il y voir une nouvelle provocation de la part de celle qui pourtant, ne se targuait que de « dire la vérité des faits » ? Ce livre rassemble l'entretien accordé par Hannah Arendt à Joachim Fest en 1964, leur correspondance, ainsi que les écrits qui ont amorcé la controverse. S.C.-D.
« Elisabeth est vierge, comme l'Angleterre est île » déclarait Victor Hugo à l'époque romantique. Tout en précisant : « En admirant Elisabeth, l'Angleterre aime son miroir. » C'est cette relation étroite entre une femme et son pays que Bernard Cottret met au coeur de la reconstitution du destin de la reine vierge. Vierge, Elisabeth Ire l'a été assurément, car, s'étant rendue physiquement intouchable, elle n'a jamais eu qu'un seul époux, son royaume.
Comment relever ce défi singulier, dans une société aussi imprégnée par les rites masculins de la guerre et de la violence que l'Angleterre de la Renaissance, être un « roi femme » ? Elisabeth assuma seule l'ensemble du pouvoir royal pendant près de cinquante ans (1558-1603). Elle fut femme dans une société d'hommes, régie par des hommes, gouvernée par des hommes et dominée par eux. Elle se montra d'autant plus attentive à la dignité royale qu'elle ne fut jamais dupe du caractère symbolique du pouvoir, ni ne se laissa aller aux épanchements sentimentaux qu'on a coutume d'attribuer aux femmes, et même aux reines comme sa cousine Mary Stuart.
Elisabeth a engendré consciemment son propre mythe, en une brillante synthèse à laquelle ont participé à des degrés divers poètes, écrivains, peintres, et naturellement hommes de guerre et courtisans dans cet âge d'or épris de littérature, de théâtre et d'épopée. Par là aussi elle a ouvert la voie à la modernité.
Bernard Cottret, professeur à l'université de Versailles-Saint-Quentin, est membre senior de l'Institut Universitaire de France, où il occupe la chaire de civilisation des îles Britanniques et de l'Amérique coloniale. Il est l'auteur de nombreux livres sur la Grande-Bretagne dont Cromwell (1992), Henri VIII (1999), et Histoire de l'Angleterre (2007). Sa biographie de Calvin a été traduite en sept langues.
Explicite ou insidieux, ordinaire ou passionnel, l'antiféminisme s'est manifesté tout au long du XXe siècle. Récusant l'égalité des sexes, il a surgi avec violence chaque fois que des femmes tentaient de s'aventurer sur des territoires depuis longtemps réservés aux hommes, celui de la création intellectuelle ou celui de l'action politique en particulier. Toujours présent, ou sous-jacent, il puise dans une tradition archaïque, mais n'a cessé de s'adapter sous l'influence de bouleversements qu'a connus la société française.
Sous une forme ou sous une autre, l'antiféminisme traduit des angoisses réelles, et à ce titre son histoire appartient à l'histoire des peurs collectives et individuelles. Car, depuis la fin du XIXe siècle, l'émancipation des femmes a suscité toutes sortes de fantasmes, souvent teintés de misogynie, mais aussi la crainte de l'indifférenciation des sexes. Les antiféministes se croyaient menacés par les nouveaux rôles revendiqués par les femmes. Les uns jugeaient le féminisme contre nature et immoral, d'autres au contraire puritain et bourgeois. Certains y voyaient même une menace pour la survie de la nation et l'harmonie de la société. Mais ils n'ont pu empêcher l'émancipation des femmes, même si l'un d'entre eux récusait le vote des femmes, prétextant que le geste était laid.
Ont participé à cet ouvrage : Christine Bard, Valérie Brunetière, Luc Capdevila, Sylvie Chaperon, Colette Cosnier, Mireille Dottin-Orsini, Erika Flahault, Françoise Gaspard, Anne-Marie Houdebine-Gravaud, Dominique Loiseau, Marie-Victoire Louis, Annelise Maugue, Pierre Michel, Janine Mossuz-Lavau, Martin O'Shaughnessy, Michelle Perrot, Siân Reynolds, Florence Rochefort, Brigitte Rollet, Geneviève Sellier, Rita Thalmann, Françoise Thébaud, Fiametta Venner, Fabrice Virgili.
Parmi les reines de prusse, il n'en est aucune qui puisse prétendre au statut de marie-thérèse en autriche ou de catherine ii en russie. en plus de leur fonction génitrice, destinée à assurer la continuité de la dynastie, elles sont tenues à un rôle de représentation auprès de leur époux. puis, ce parcours achevé, le silence s'installe progressivement autour de leur mémoire. seule sophie-charlotte, la première épouse de frédéric ier, qui donna son nom au château de charlottenburg et qui, modèle d'une princesse éclairée, fut à l'origine de la fondation de l'académie des sciences, échappe à cette règle, mais sans jamais rivaliser, dans la mémoire collective, avec la reine louise.
Il s'agit ici d'un autre registre. formé, comme toujours, de la rencontre d'une personnalité et des circonstances, un mythe a rapidement pris corps autour de la reine louise (1776-1810). que la nature l'ait dotée de l'atout de la beauté n'y est pas étranger ; qu'elle ait cultivé les valeurs familiales y a certainement contribué ; mais surtout sa confrontation avec napoléon fit d'elle l'héroïne de la résistance prussienne et l'âme de la renaissance qui conduisit à la « guerre de libération » de 1813 ; sa mort avant ce terme, dans l'éclat de son âge, a encore ajouté à sa légende. ce mythe a traversé tout le xixe siècle et ses effets se sont manifestés jusqu'au tournant de 1933. on aurait pu le croire disparu après la naissance d'une nouvelle allemagne des cendres de la seconde guerre mondiale. pourtant, en parallèle au regain d'intérêt porté à la prusse, une série de travaux en allemand consacrés à la reine louise depuis 1989 en annonce peut-être une nouvelle vie.
Jean-paul bled est le meilleur des historiens français spécialisés dans l'histoire de l'allemagne et de l'autriche des xviiie et xixe siècles. le succès de ses biographies sur françois-joseph, frédéric ii ou marie-thérèse, ou son histoire de vienne et son histoire de la prusse le montrent surabondamment.
Est-ce un homme, une femme, un hermaphrodite ? l'énigme de son sexe aura sûrement beaucoup plus fait pour sa réputation que tout ce qu'il entreprit dans sa longue existence.
Les aventures du chevalier d'eon dépassent de loin par l'extravagance tout ce qu'un romancier peut imaginer, mais leur intérêt ne s'épuise pas dans les péripéties d'une vie " sans queue ni tête ", comme il le dit un jour. tout à la fois agent secret de louis xv et diplomate officiel, il est mêlé à la grande politique, mais aussi à d'innombrables intrigues : il rencontre des souverains, des ministres, court de saint-pétersbourg à londres, détient des secrets d'etat jusqu'au jour oú un tribunal britannique déclare, sans preuve, qu'il appartient au sexe féminin.
Maurice lever avait évoqué la flamboyante " amazone de golden square " dans sa biographie de beaumarchais. il avait alors décidé d'écrire cette histoire oú vérités et légendes sont restées intimement liées. la mort l'en a empêché. c'est son épouse evelyne qui l'a fait à sa place, mettant en lumière des documents inédits en france sur l'un des personnages les plus pittoresques du xviiie siècle. une biographie historique entièrement renouvelée.