Dans cette troisième et dernière version de son ouvrage sur Ravensbrück, Germaine Tillion essaie de combiner, selon ses propres mots, « la grande lumière blanche de l'enquête historique, qui illumine de toutes parts les reliefs et les couleurs, avec l'obscur rayon de l'expérience qui traverse les épaisseurs de la matière. Non pas la seule raison, non pas la passion seule, mais l'une et l'autre ensemble, unissant leurs insuffisantes clartés pour explorer ce gouffre inconnu, le malheur des autres».
Cette édition est enrichie d'enquêtes sur les exterminations par le gaz, menées par Anise Postel-Vinay pour Ravensbrück et par Serge Choumoff pour Hartheim, Gusen et Mauthausen.
Germaine Tillion (1907-2008) :
Ancienne résistante, elle est arrêtée en 1942 et déportée à Ravensbrück de 1943 à 1945. Directeur d'études à l'EHESS, outre de nombreux ouvrages d'ethnologie unanimement salués, elle est également l'auteur d'une « opérette-revue » rédigée à Ravensbrück, Le Verfügbar aux enfers (Points, 2007). Son dernier ouvrage posthume, Fragments de vie, a été publié au Seuil en 2009.
La virilité serait vertu. Elle viserait le « parfait », fondant sur un idéal de domination masculine une des caractéristiques des sociétés occidentales. Une puissance a été inventée, de la force physique au courage moral, imposant ses codes, ses rituels, sa formation.
Elle n'est pas figée pourtant dans une histoire immobile. Les qualités se recomposent avec le temps. La société marchande ne saurait avoir le même idéal viril que la société militaire. Le courtisan ne saurait avoir le même idéal viril que le chevalier. La cour et la ville inventent des modèles décalés. Ce sont ces différences et ces changements que retrace ce premier volume, de l'Antiquité jusqu'aux Lumières, introduisant de l'histoire dans ce qui semble ne pas en avoir.
Successeur de la culotte, le pantalon symbolise la masculinité et, partant, le pouvoir. Au cours de la Révolution, il se charge d'une signification plus précise en exprimant les valeurs républicaines et devient un élément-clé du nouvel ordre politique. Mais les femmes, privées de droits, assignées à résidence dans leur genre, restent interdites de pantalon.
Rien de tel qu'un interdit pour susciter le désir. Surchargé de fantasmes, le pantalon accompagne toutes les transgressions qui jalonnent la route de l'émancipation des femmes. Artistes, féministes, révolutionnaires, voyageuses, actrices, lesbiennes, sportives, elles s'approprient l'habit masculin. Il faut attendre les années 1960-1970 pour que le pantalon soit féminisé, pour qu'il devienne un vêtement mixte.
Fin de l'histoire ? Pas vraiment. Pourquoi les collégiennes ne portent-elles plus que des pantalons ? Pourquoi une « journée de la jupe » ? L'actualité des questions de sexe et de genre gagne à être située dans l'histoire longue de la peur de la confusion des rôles et de la contestation du pouvoir masculin.