Un rabbin est confronté chaque jour au mystère de la mort. Pour accompagner les mourants et réconforter les endeuillés, il tente de transmuer l'inéluctable, d'y trouver du sens : « Je me tiens aux côtés de femmes et d'hommes qui, aux moments charnières de leurs vies, ont besoin de récits », écrit Delphine Horvilleur. Ce livre de consolation tresse étroitement trois fils - le conte, l'exégèse et la confession : la narration d'une existence interrompue, la manière de donner une signification à cette mort à travers les textes de la tradition, et l'évocation d'une blessure intime ou la remémoration d'un souvenir enfoui. Les textes sacrés ouvrent un passage entre les vivants et les défunts, et « le rôle d'un conteur est de se tenir à la porte pour s'assurer qu'elle reste ouverte », nous invitant ainsi à faire la paix avec nos disparus et avec notre propre histoire.Un essai lumineux et intime. Libération.Une réflexion éblouissante. L'Obs.Un puissant hymne à la vie. Le Monde.PRIX BABELIO NON-FICTION 2021.
Le 26 novembre 1974, la voix assurée de Simone Veil résonne dans l'hémicycle. Elle présente à l'Assemblée nationale son projet de loi en faveur de l'avortement. Une majorité de députés y sont opposés. Les débats seront longs, houleux, teintés d'une grande violence, mais l'éloquence magistrale de la ministre finira par emporter l'adhésion. Un discours historique qui a marqué un tournant pour les droits des femmes.
« On dit que les territoires nous façonnent. J'avais dix ans quand j'ai compris que le dérèglement climatique menaçait mon univers entier, et toutes mes histoires de famille, dont les glaciers renferment le souvenir. » Camille Étienne a grandidans un espace en voie de disparition. Dans un de ces lieux où le danger estdéjà réel, concret.
Face à un effondrement d'une telle ampleur, il est aisé de sombrer dans laparalysie. Mais, nous dit-elle, « notre impuissance est une construction qui ne nous appartient pas », et qui sert ceux qui exercent et jouissent pleinement deleur pouvoir.
Dans cet essai, Camille Étienne identifie les mythes qui nous entravent : éco-anxiété, fracture générationnelle, déclic, fausses peurs. Les paniques morales n'ont qu'un dessein : nous distraire de la peur qui devrait nous habiter et pourrait nous pousser à désobéir, ralentir ou cesser de coopérer.
Camille Étienne défend une écologie libératrice, portée par une puissance collective et démocratique. L'inertie est une légende, et la potentialité d'un soulèvement en est la preuve.
« On est le 6 décembre 2018, il est midi. Trois semaines que le mouvement a démarré, avec l'impression, ici, que tout ne fait que commencer ».
Qu'avons-nous traversé ces huit dernières années ?
De la révolte des Gilets jaunes à la vie quotidienne en Ukraine sous les bombes, en passant par le grand confinement, la virée en Thaïlande de deux cousins de région parisienne ou la fin tragique d'un éleveur tué par des gendarmes, Florence Aubenas raconte notre époque, au plus près du réel.
Florence Aubenas est grand reporter au journal Le Monde. Elle a notamment publié Le Quai de Ouistreham et L'Inconnu de la poste, qui ont connu un immense succès critique et public.
Il y a quelques années, la mère de Didier Eribon est entrée en maison de retraite. Après plusieurs mois au cours desquels elle a peu à peu perdu son autonomie physique et cognitive, Didier Eribon et ses frères ont dû se résoudre à l'installer, malgré ses réticences, dans un établissement médicalisé. Mais le choc de l'entrée en maison de retraite fut trop brutal et, quelques semaines seulement après son arrivée, elle y est décédée. Après la mort de sa mère, Didier Eribon reprend le travail d'exploration personnelle et théorique qu'il avait entrepris dans Retour à Reims après la mort de son père. Il analyse le déclin de sa mère, ce qui l'amène à réfléchir sur la vieillesse et la maladie, sur nos rapports aux personnes âgées et à la mort, mais aussi sur l'expérience du vieillissement. Il s'interroge également sur les conditions de l'accueil des personnes dépendantes. Il montre que si l'expérience du vieillissement nous est très difficile à penser, c'est parce qu'il s'agit d'une expérience-limite dans la philosophie occidentale, dont l'ensemble des concepts semblent se fonder sur une exclusion de la vieillesse. Eribon reparcourt également la vie de sa mère, et notamment les périodes où elle était femme de ménage, ouvrière puis retraitée, la saisissant dans toute sa complexité, de sa participation aux grèves à son racisme obsessionnel. Il conclut sa démarche en faisant de la vieillesse le point d'appui d'une réflexion sur la politique : comment pourraient se mobiliser des personnes qui n'ont plus de mobilité ni de capacité à prendre la parole et donc à dire «nous» ? Les personnes âgées peuvent-elles parler si personne ne parle pour elles, pour faire entendre leur voix ?
La soeur jumelle. Puis la mère. Puis la petite fille. Puis le fils adolescent, et enfin le père. Le 24 mars 2022 une famille française se jette du septième étage de son balcon, face au lac Léman, à Montreux, en Suisse.
«Suicide collectif», concluent presque aussitôt les enquêteurs, malgré la présence de deux enfants mineurs. Un an plus tard, le dossier est clos. Les autorités ont posé une chape sur le «mystère de Montreux», un peu comme soixante ans plus tôt un cercueil fut scellé sans autre forme de procès sur le corps du grand-père des jumelles, l'écrivain Mouloud Feraoun, assassiné par l'OAS aux derniers jours de la guerre d'Algérie.
Quel scénario s'est imposé à cette famille lorsque la police a frappé à sa porte ? D'où lui vient sa «grande méfiance à l'égard de l'État» ? Pourquoi faudrait-il laisser à cette tragédie sa «part de mystère», comme l'enjoint le commissaire qui commente l'affaire ? Peut-on relier des morts par-delà les pays et les sépultures ?
L'étau des obsessions identitaires, des tribalismes d'exclusion et des compétitions victimaires se resserre autour de nous. Il est vissé chaque jour par tous ceux qui défendent l'idée d'un « purement soi », et d'une affiliation « authentique » à la nation, l'ethnie ou la religion. Nous étouffons et pourtant, depuis des années, un homme détient, d'après l'auteure, une clé d'émancipation : Emile Ajar.
Cet homme n'existe pas... Il est une entourloupe littéraire, le nom que Romain Gary utilisait pour démontrer qu'on n'est pas que ce que l'on dit qu'on est, qu'il existe toujours une possibilité de se réinventer par la force de la fiction et la possibilité qu'offre le texte de se glisser dans la peau d'un autre. J'ai imaginé à partir de lui un monologue contre l'identité, un seul-en-scène qui s'en prend violemment à toutes les obsessions identitaires du moment.
Dans le texte, un homme (joué sur scène par une femme...) affirme qu'il est Abraham Ajar, le fils d'Emile, rejeton d'une entourloupe littéraire. Il demande ainsi au lecteur/spectateur qui lui rend visite dans une cave, le célèbre « trou juif » de La Vie devant soi : es-tu l'enfant de ta lignée ou celui des livres que tu as lus ? Es-tu sûr de l'identité que tu prétends incarner ?
En s'adressant directement à un mystérieux interlocuteur, Abraham Ajar revisite l'univers de Romain Gary, mais aussi celui de la kabbale, de la Bible, de l'humour juif... ou encore les débats politiques d'aujourd'hui (nationalisme, transidentité, antisionisme, obsession du genre ou politique des identités, appropriation culturelle...).
Le texte de la pièce est précédé d'une préface Delphine Horvilleur sur Romain Gary et son oeuvre. Dans chacun des livres de Gary se cachent des « dibbouks », des fantômes qui semblent s'échapper de vieux contes yiddish, ceux d'une mère dont les rêves l'ont construit, ceux d'un père dont il invente l'identité, les revenants d'une Europe détruite et des cendres de la Shoah, ou l'injonction d'être un « mentsch », un homme à la hauteur de l'Histoire.
« J'avais 6 ans lorsque Gary s'est suicidé, l'âge où j'apprenais à lire et à écrire. Il m'a souvent semblé, dans ma vie de lectrice puis d'écrivaine que Gary était un de mes « dibbouks » personnels... Et que je ne cessais de redécouvrir ce qu'il a su magistralement démontrer : l'écriture est une stratégie de survie. Seule la fiction de soi, la réinvention permanente de notre identité est capable de nous sauver. L'identité figée, celle de ceux qui ont fini de dire qui ils sont, est la mort de notre humanité. »
On ne naît pas féministe, alors comment le devient-on ? Précurseure de l'histoire des femmes, Michelle Perrot, 94 ans, livre ici un magnifique texte à la fois intime et théorique, livre d'histoire et autobiographie. Celle à qui son père conseillait de ne pas se mettre trop tôt un homme sur le dos, qui se rappelle avoir toujours voulu être comme les autres, abolir les différences avec les hommes, aborde son cheminement, de l'engagement chrétien au féminisme en passant par le communisme. Son itinéraire intellectuel, depuis sa thèse où elle voit rétrospectivement un regard presque masculin sur les femmes, donne à voir un siècle de changements sociétaux et la profondeur historique des luttes qui agitent aujourd'hui nos sociétés.
Première historienne à enseigner l'histoire des femmes en France, en 1973, Michelle Perrot nous emmène dans une épopée au féminin en explorant toutes ses ramifications : l'histoire de l'accession à l'égalité, l'histoire du patriarcat, l'histoire du mouvement féministe et des grands débats qui l'ont parcouru et structuré, sur le corps, le genre, l'universalisme contre le différentialisme, la sororité, MeToo. Dans ces pages, la grande histoire se mêle au destin des femmes qui ont porté leur cause et l'on voisine avec Artemisia Gentileschi, Olympe de Gouges, Lucie Baud, Christine Bard, Hubertine Auclert ; l'on dialogue avec Monique Wittig, Arlette Farge, Yvette Roudy, Antoinette Fouque...
La pensée lumineuse de Michelle Perrot, sans rien omettre des sujets les plus épineux, permet de déconstruire et parfois même de dépasser les clivages du féminisme contemporain. Le livre essentiel d'une pionnière, témoin d'un siècle de féminisme, dont l'engagement n'a d'égal que sa hauteur de vue.
Changer de regard sur la jeunesse. Les jeunes seraient « paresseux », « incultes », voire « égoïstes et individualistes ». J'ai entendu mille fois ces accusations à l'égard de la jeunesse : dans des dîners de famille, à la volée chez un commerçant ou portées par des éditorialistes remontés à la télévision. Ces jugements négatifs sont non seulement infondés, mais aussi délétères pour toute la société. Entre le chômage, la dégradation de la situation économique, la pandémie et l'urgence écologique, les jeunes doivent composer avec des paramètres inédits. De plus, les défauts qu'on leur prête sont souvent le symptôme d'une profonde incompréhension - d'un désintérêt ? - pour leurs préoccupations et leurs pratiques.
Soutiens-gorge rembourrés pour fillettes, obsession de la minceur, banalisation de la chirurgie esthétique, prescription insistante du port de la jupe comme symbole de libération : la " tyrannie du look " affirme aujourd'hui son emprise pour imposer la féminité la plus stéréotypée. Décortiquant presse féminine, discours publicitaires, blogs, séries télévisées, témoignages de mannequins et enquêtes sociologiques, Mona Chollet montre dans ce livre comment les industries du " complexe mode-beauté " travaillent à maintenir, sur un mode insidieux et séduisant, la logique sexiste au coeur de la sphère culturelle.
Sous le prétendu culte de la beauté prospère une haine de soi et de son corps, entretenue par le matraquage de normes inatteignables. Un processus d'autodévalorisation qui alimente une anxiété constante au sujet du physique en même temps qu'il condamne les femmes à ne pas savoir exister autrement que par la séduction, les enfermant dans un état de subordination permanente. En ce sens, la question du corps pourrait bien constituer la clé d'une avancée des droits des femmes sur tous les autres plans, de la lutte contre les violences à celle contre les inégalités au travail.
La justice ne sait pas traiter les plaintes des femmes : 80 % des plaintes de femmes victimes de violences (viol, agressions, harcèlement, violences conjugales...) aboutissent à un classement sans suite. Jusqu'aux années 1920, les femmes n'avaient pas le droit de porter plainte. Le système judiciaire montre ainsi sa défaillance, incapable de garantir aux femmes, non pas seulement un procès équitable, mais tout simplement un procès. Que veut dire "porter plainte" aujourd'hui pour une femme victime de violence ? Quelle est la procédure et quels sont les écueils auxquels se préparer ? Comment expliquer cette réalité abrupte d'une justice absolument patriarcale ? Comment sortir de cette impasse indigne de notre pays ? Par Violaine De Filippis-Abate, avocate, porte- parole d'Osez le féminisme.
« Je suis féministe, je voudrais faire quelque chose de concret mais je ne sais pas par où commencer. » En voyant ce type de message affluer sur les réseaux sociaux, Sarah Constantin et Elvire Duvelle-Charles ont compris ce qu'il manquait : un manuel pratique pour guider la nouvelle génération de féministes dans l'activisme. Construit en neuf chapitres, cet ouvrage se présente comme une boîte à outils qui recense ces diverses techniques. Il permet ainsi à chacune et à chacun de trouver le mode d'action qui lui convient le mieux.
Depuis leur entrée dans l'activisme, Sarah Constantin et Elvire Duvelle-Charles ont exploré divers modes d'action : happenings seins nus, parodie de clip de rap, collages... Leur dernier fait d'armes : Clit Révolution, un compte Instagram suivi par plus de 100 000 personnes et une série documentaire diffusée sur France TV Slash.
Au commencement du monde régnait un peuple de guerrières où grandit l'Amazone Thêkla. Avide d'un destin digne de sa gloire, elle absorbe secrètement un philtre d'éternelle jeunesse. Devenue immortelle et éprise de liberté, elle sera de tous les combats : auprès des Vikings, d'Alexandre le Grand, de Léonard de Vinci ou d'Olympe de Gouges, jusqu'aux manifestants de Mai 68. Traversant les âges et les civilisations, Thêcla l'Amazone connaît de multiples amours, permises ou interdites, mais toujours entravées par une mort qui se refuse à elle. Sa quête absolue : devenir, enfin, une simple mortelle.
Le féminisme, c'est quoi ? Ça existe ? Aujourd'hui ça pourrait exister. Et pour quoi faire ? «Les femmes ont tout obtenu», répondent-ils, et même répondent-elles, quelquefois. Et pour quels résultats ? La solitude de fond de la féminité, et la déroute de nos mâles devant leurs égales. «La super woman» est épuisée. Quant au commun des hommes, sans le «miroir grossissant» que présentait, à ses exploits masculins, sa compagne d'antan, il se sent réduit de moitié. Donc grandeur nature. [...] Enfermée dans son rôle féminin, la femme ne mesure pas à quel point son oppresseur est lui-même prisonnier de son rôle viril. En se libérant, elle aide à la libération de l'homme. En participant à égalité à l'Histoire, elle la fait autre. Cela ressemble fort à une révolution tranquille, mais forte et sûre de l'avenir. Pourquoi le féminisme aujourd'hui ? Justement pour réussir là où l'égalité économique a échoué. Là où la culture patriarcale résiste. Le féminisme vient seulement de commencer sa longue marche. Dans vingt ans, dans cent ans, il aura changé la vie. Gisèle Halimi(1992).
Soixante-dix ans de combats, de passion et d'engagement au service de la justice et de la cause des femmes. Et toujours la volonté de transmettre aux nouvelles générations le flambeau de la révolte. Parce que l'égalité entre hommes et femmes est loin d'être acquise. Et parce que naître femme reste une malédiction dans la plupart des pays du monde.
Avec son amie Annick Cojean, la célèbre avocate revient sur les épisodes marquants de son parcours rebelle : son enfance en Tunisie dans une famille juive modeste ; son refus d'un destin assigné par son genre et son rêve de devenir avocate ; sa défense indéfectible des militants des indépendances tunisienne et algérienne soumis à la torture ; son association, Choisir la cause des femmes ; et, bien sûr, ses combats pour le droit à l'avortement, la répression du viol, la parité.Une farouche liberté laisse un dernier message: si on arrête, on est foutues. Magali Cartigny, Le Monde.Il est de ces voix et ces combats qui changent une société. Hélène Roussel, France Inter.
HABITER - NOS LIEUX DE VIE SONT NOS LIEUX DE LUTTE Rencontre : Liv Stömquist & Mona Chollet : le coeur sur la table Travesticide : l'histoire en BD de l'argentine Diana Sacayán Débat : peut-on dégenrer le sport ?
Refuser la guerre : reportage en Israël Vandana Shiva : portrait d'une icône écoféministe Féministe, la femtech ? Quand les technologies s'intéressent aux menstruations Maryse Condé : rencontre inédite avec l'écrivaine guadeloupéenne Monique Wittig, Audre Lorde : retour sur leur rencontre manquée en 1979 Zita la rebelle : un strip de Salomé Lahoche Mémoire de l'esclavage : les autoportraits de Nona Faustine
Des entretiens qui frappent par leur franchise, leur spontanéité et une liberté de ton totale. Depuis six ans, Léa Salamé coanime la matinale de France Inter (7 millions d'auditeurschaque matin).
En 2021, elle coprésente avec Laurent Ruquier, « On est en direct » sur France 2.
Penseuse de génie, écrivaine prolifique et militante radicale, Françoise d'Eaubonne (1920-2005) a partagé les grands combats du XXe siècle : féministe, anticolonialiste, partisane des combats queer alors qu'elle n'était pas (à son grand regret !) lesbienne elle-même, écologiste et décroissante, elle a publié une centaine de livres. Pourtant, malgré une reconnaissance internationale, elle est rapidement tombée dans l'oubli. Sous la plume d'Élise Thiébaut, l'intime et le politique se mêlent pour donner chair à une femme hors du commun. Un portrait passionnant et sans tabou, plus indispensable que jamais, qui éclaire à la fois le génie et les dimensions les plus subversives de celle qui lança les mots phallocrate, écoféminisme et sexocide.
« Ne suis-je pas une femme?? », telle est la question que Sojourner Truth, ancienne esclave, lança en 1851 lors d'un discours célèbre, interpellant féministes et abolitionnistes sur les diverses oppressions subies par les femmes noires : oppressions de classe, de race, de sexe. Héritière de ce geste, bell hooks décrit dans ce livre paru en 1981 aux États-Unis les processus de marginalisation des femmes noires. Elle livre une critique sans concession des féminismes blancs, des mouvements noirs de libération, et de leur difficulté à prendre en compte les oppressions croisées.
Un livre majeur du « Black Feminism », un outil nécessaire pour tou·te·s à l'heure où, en France, une nouvelle génération d'Afroféministes prend la parole.
Jamais dans la Ve République un président n'avait fait preuve d'autant d'arrogance à l'égard de celles et ceux « qui ne sont rien », c'est-à-dire qui ne sont pas de son monde. Ne nous y trompons pas : le mépris des gens ordinaires ostensiblement affiché par Emmanuel Macron n'est pas qu'un trait de caractère, un tempérament personnel. Ce mépris doit être mis en regard de la violence d'une oligarchie qui accapare aujourd'hui tous les pouvoirs et toutes les richesses. Le dédain élyséen rend visible la violence des ultra-riches tout en occultant les logiques sociales (de domination et d'exploitation) qui sont au coeur du capitalisme. D'où la nécessité d'analyser sociologiquement le mépris de classe, comme le fait ici Monique Pinçon-Charlot avec sa plume alerte, corrosive et érudite. En temps
Agréable ou pénible, exaltante ou angoissante, intime et sociale, la grossesse est une expérience à la fois profondément individuelle et éminemment politique.Parce que la maternité a longtemps été le destin « naturel » des femmes, il leur a fallu s'en affranchir et conquérir la liberté de choisir d'être mères ou pas. Mais, aussi libre soit-il, le choix de la maternité n'en reste pas moins synonyme de charges et de doutes, y compris - et peut-être même surtout - durant la période de gestation. Être enceinte, c'est se soumettre aux regards, aux commentaires et aux normes qui prennent le contrôle de ce si gros ventre.La philosophe Camille Froidevaux-Metterie a passé du temps en immersion dans une maternité, elle y a rencontré des femmes enceintes qu'elle a interrogées sur leur expérience vécue du corps enceint. À travers ces paroles singulières qui disent la troublante transformation physique, les sentiments de joie ou de rejet, les innombrables injonctions - au silence, au bonheur, au poids idéal -, c'est le double mouvement de l'aliénation et de la réappropriation du corps des femmes qui se déploie. En pensant ce qui ne se pense pas, en questionnant ce qui est considéré comme naturel, Camille Froidevaux-Metterie poursuit son travail d'élaboration d'un féminisme incarné qui place l'intime des corps sur le chemin de la libération.
Pourquoi les adultes s'autorisent-ils à dénigrer, moquer, discréditer quotidiennement la parole des enfants et des adolescents ? Qu'auraient-ils à perdre à les prendre au sérieux ? La vérité qui sort de leur bouche nous ferait-elle si peur ? L'infantisme - cette discrimination à l'encontre des mineurs, fondée sur la croyance qu'ils appartiennent aux adultes et qu'ils peuvent, voire qu'ils doivent, être contrôlés - est omniprésente dans nos sociétés ; Greta Thunberg en est le triste symbole sur la scène internationale. Pourtant, nous n'avons pas encore pris conscience de ce fléau. Désigner l'infantisme est l'étape indispensable pour amorcer le changement de comportement qui s'impose à notre société. Car elle a tout à gagner, y compris économiquement, à sortir de l'infantisme.
Non, les femmes préhistoriques ne consacraient pas tout leur temps à garder les enfants en attendant que les hommes reviennent de la chasse. Aucune donnée archéologique ne prouve que, dans les sociétés les plus anciennes, certaines activités leur étaient interdites, qu'elles étaient considérées comme inférieures et subordonnées aux hommes. Cette vision de la préhistoire procède des a priori des fondateurs de cette discipline qui naît au xixe siècle. S'appuyant sur les dernières découvertes en préhistoire et l'analyse des idées reçues que véhicule, jusqu'à notre époque, la littérature savante, Marylène Patou-Mathis pose un autre regard sur l'histoire de l'évolution et déconstruit les processus qui ont invisibilisé les femmes à travers les siècles.