« Pour résister au climat de peur que veulent instaurer les groupes nationalistes violents, à la propagande raciste qui sature l'espace public, c'est à nous de proposer des alternatives en actes, de déconstruire les idées toutes faites sur l'antifascisme, de populariser notre lutte. » À la fois mouvement d'autodéfense et mouvement d'émancipation, pratique politique d'action directe, d'information, d'éducation populaire et de contre-culture, l'antifascisme est bien plus varié que l'image qu'il renvoie dans les médias ou dans le monde politique, où on se plaît à le caricaturer. En dix chapitres, ce livre présente l'histoire et l'actualité de la lutte antifasciste, ainsi que les enjeux auxquels elle doit faire face. Il a pour ambition de donner suffisamment d'éléments à la fois théoriques et pratiques afin de présenter l'antifascisme dans sa complexité, sa richesse, mais aussi ses contradictions.
Quand l'État recule, la forme Commune s'épanouit. Ce fut le cas à Paris en 1871 comme lors de ses apparitions plus récentes, en France et ailleurs. Les luttes territoriales contemporaines, comme la ZAD de Notre-Dame-Des-Landes ou les occupations de chantiers de construction de pipelines en Amérique du Nord, ont remis à l'ordre du jour des formes d'appropriation de l'espace social. Elles ont façonné de nouvelles manières politiques d'habiter qui agissent pour interrompre la destruction de notre environnement. Mais elles ont également modifié notre perception du passé récent et donné de nouveaux noms à ce que nous voyons aujourd'hui, aiguisant notre compréhension du présent. Les luttes au long cours pour la terre des années 1960 et 1970, comme le Sanrizuka au Japon ou e Larzac, apparaissent désormais pour ce qu'elles sont : des batailles déterminantes de notre époque. Pour Kristin Ross, les processus pragmatiques et non accumulatifs qui fondent l'existence concrète de la vie de la commune - défense, subsistance, appropriation, composition et complémentarité des pratiques, solidarité dans la diversité - constituent des éléments cruciaux de ce que Marx appelait « la forme politique de l'émancipation sociale » et que Kropotkine considérait comme la condition nécessaire de la révolution et de son accomplissement.
Quel est le plus important : avoir des droits ou des devoirs ? Chef d'oeuvre de la pensée politique, «L'Enracinement» est un livre engagé sur le patriotisme, les déracinements et notre besoin vital d'appartenances, mais aussi de vérité. Il peut se lire comme un "manuel de citoyenneté" qui prône une société où l'épanouissement de chacun est la norme, où des principes moraux nous guident, et où l'argent et la technique ne font plus la loi.
Le phénomène du populisme n'a pas encore été véritablement pensé. C'est en effet surtout à caractériser sociologiquement les électeurs populistes que se sont attachés la plupart des livres sur le sujet ; ou à discuter ce dont il est le symptôme (le désenchantement démocratique, les inégalités galopantes, la constitution d'un monde des invisibles, etc.) ; ou encore à sonner le tocsin sur la menace qu'il représenterait.
Cet ouvrage propose de le comprendre en lui-même, comme une idéologie cohérente qui offre une vision puissante et attractive de la démocratie, de la société et de l'économie. S'il exprime une colère et un ressentiment, sa force tient au fait qu'il se présente comme la solution aux désordres du présent. Il est pour cela l'idéologie ascendante du xxie siècle, à l'heure où les mots hérités de la gauche semblent dorénavant résonner dans le vide.
L'auteur en présente une théorie documentée, en retrace l'histoire dans celle de la modernité démocratique et en développe une critique approfondie et argumentée. Il permet ainsi d'en finir avec les stigmatisations impuissantes et dessine les grandes lignes de ce que pourrait être une alternative mobilisatrice à ce populisme.
« Les anarchistes aiment se raconter des légendes, s'inventer des ancêtres et des héros. Mais l'histoire de l'anarchisme est avant tout une histoire bien réelle d'hommes et de femmes en lutte, avides de savoir et de changement social, de culture et d'idéal. C'est aussi une histoire d'erreurs et d'échecs, de confrontations et de succès, et d'une volonté jamais abattue. » Dans cette balade en anarchie, Marianne Enckell, historienne et animatrice du Centre international de recherches sur l'anarchisme de Lausanne, nous emmène sur les traces de ce mouvement depuis ses origines jusqu'à nos jours, abordant en particulier son aspect international et sa dimension culturelle.
Au milieu du 20e siècle, alors que se joue la fin de l'empire colonial français, des penseuses et militantes noires s'engagent au coeur des mouvements de décolonisation. Encore trop méconnues aujourd'hui, Suzanne Césaire, Paulette Nardal, Eugénie Éboué-Tell, Jane Vialle, Andrée Blouin, Aoua Kéita et Eslanda Robeson sont des protagonistes majeures de la contestation de l'ordre colonial. Explorant leurs écrits et archives, Annette Joseph-Gabriel raconte leur parcours et la diversité de leur positionnement. Toutes ont en commun d'imaginer de nouvelles identités, panafricaines et pancaribéennes, et permettent de construire une histoire complexe du féminisme noir.
Caroline de Gruyter a vécu à Vienne. Comme tant d'autres, elle y a été frappée par la persistance dans la société, dans les esprits et dans la culture autrichiennes, de l'ancien empire habsbourgeois, un siècle après sa disparition. Elle s'est interrogée sur les causes de celle-ci et sur ses conséquences - un chaos qui a saisi les pays d'Europe centrale et dont les traces sont encore visibles aujourd'hui. Ensemble multilingue et multinational entouré de puissances rivales ou ennemies, l'empire austro-hongrois ressemblait à l'Union européenne. En quoi celle-ci mérite-t-elle l'appellation d'empire ? Et quels facteurs pourraient la faire éclater ? L'auteur a développé ces réflexions entre le Brexit et la pandémie, mais la crise ukrainienne actuelle leur donne une résonance prophétique.
« Yes, we can ! », « Qui veut, peut », « premiers de cordées »... Défendu autant par les partis progressistes que conservateurs, peu de notions font l'objet d'un consensus politique aussi complet que le mérite. Il est ainsi investi comme un principe « juste » de distribution des ressources rares. De la même façon, l'école s'est imposée dans de nombreuses sociétés comme l'espace de construction de l'émancipation des individus par le mérite par excellence. Pourtant qui définit le mérite aujourd'hui, et surtout comment le définit-on ?
Cet essai incarné et sensible vise, à partir de l'apport d'études récentes en sciences sociales, à réhabiliter les luttes (ordinaires ou politiques) qui structurent les usages de la rhétorique méritocratique comme principe de justice. Car loin d'être univoque, le mérite fait l'objet d'une reconfiguration perpétuelle, autant dans l'espace public, que dans nos relations ordinaires aux institutions. De la même manière, à rebours d'une lecture qui ferait du mérite un principe abstrait de la justice sociale hérité de la Révolution française, la sociologue Annabelle Allouch propose de comprendre le mérite comme une morale sensible de la reconnaissance qui structure notre quotidien, ce qui permet de comprendre notre attachement à cette notion, malgré les critiques dont elle fait l'objet. Pour ce faire, elle mobilise avec talent un ensemble de saynètes tirées de l'actualité ou bien ses propres enquêtes autour de la sociologie du concours et des effets de la discrimination positive dans l'accès à l'enseignement supérieur.
Ce guide décolonial nous emmène à l'est de Paris visiter un véritable « triangle colonial », composé de trois monuments qui offrent un condensé de l'histoire culturelle, économique, raciale et politique de la France. On y croisera une colossale fresque mettant en scène le travail forcé dans les colonies, un monument qui fait régulièrement l'objet d'actions anti-colonialistes, et une statue d'Athéna représentant « La France apportant la paix et la prospérité aux colonies ». Posant les bases d'une pédagogie critique explorée par le collectif Décoloniser Les Arts (DLA), cet ouvrage revient sur les débats et les luttes menées à travers le monde autour de statues, célébrant esclavagistes et colonialistes, « au pied desquelles le pouvoir dépose des gerbes de fleurs. » Accompagné d'une riche sélection d'images d'archives et ponctué par les interventions visuelles de l'artiste Seumboy Vrainom :?, Françoise Vergès nous livre ici un texte incisif qui propose une nouvelle manière d'aborder la
Les bras chargés de fusils, la tête de poèmes réunit les écrits de Saïda Menebhi. Morte à l'âge de 25 ans en prison au Maroc, elle laisse en héritage à ses camarades et à ses proches sa poésie, ses analyses de la condition des femmes à partant de celle des prostituées et ses lettres de prisons. Témoignage implacable de sa détermination au renversement du monde, cet ouvrage préfacé des mots de Hajer Ben Boubaker permet de replacer Saïda Menebhi en tant que figure essentielle de la pensée révolutionnaire et féministe. ...) Nous avons tenu bon Et affronté les douleurs Car nous savons Qu'être en prison N'est pas un problème Il s'agit d'aller de l'avant.
« Nous avons décidé de faire entendre notre voix dans le concert social et d'exiger notre part de plaisirs au banquet de la vie. Et comme nous ne voulons dépendre de personne, brandissons nous-mêmes l'étendard rouge et partons au combat... sans dieu ni patron ni mari. » Publié à Buenos Aires en 1896, La Voz de la Mujer est le premier journal anarchiste féministe. Dans ses pages, ses rédactrices proposent de fournir aux femmes prolétaires les outils, théoriques et pratiques, nécessaires à leur émancipation. Partisanes de l'amour libre, elles y expriment leur volonté d'en finir avec toutes formes d'oppressions, qu'elles soient religieuse, capitaliste ou patriarcale. Préface d'Hélène Finet.
Cet ouvrage donne à lire plus d'une centaine de lettres que les filles de Karl Marx, Eleanor, Jenny et Laura échangèrent entre elles ou adressèrent à leurs parents entre 1866 et 1898.
L'introduction de Michelle Perrot, historienne et féministe notoire, et les notices d'Olga Meier permettent de les situer dans le contexte de la vie de la famille Marx et dans l'actualité politique de l'époque et au cours des événements politiques auxquels les filles de Marx furent associées.
Ces lettres apportent des informations nombreuses sur une vie familiale peu connue, restituant les joies et les drames profonds qui marquèrent ces vies.
Alors que le féminisme est plus que jamais nécessaire, il est malmené de toutes parts. D'un côté, des pseudo-radicalités instruisent le procès d'un « féminisme blanc » qui irait d'Olympe de Gouges à aujourd'hui. De l'autre, une mouvance de droite et d'extrême droite instrumentalise le féminisme dans une perspective identitaire, nationaliste et raciste. Face à ces entreprises de brouillage et de régression, il est urgent de réaffirmer la valeur de l'émancipation et de plaider pour un féminisme universel, concret et pluriel. Ni décolonial ni occidental, le féminisme se construit sans cesse, dans les luttes et la solidarité des combats quotidiens.
Les mouvements de contestation des années 1960-1970 exercent encore aujourd'hui une réelle fascination, en particulier auprès de jeunes militants qui y trouvent un écho à leurs propres questionnements. Cette sélection de textes d'Ulrike Meinhof révèle, par-delà les mythes entourant la terroriste de la bande à Baader, les qualités d'écriture et la cohérence d'une pensée critique qui s'élabore au fil de ces chroniques parues de 1960 à 1968.
" Nous y sommes ! Tout le monde recommence à parler de la pluie et du beau temps ! Ce que l'on juge apolitique, c'est l'oppression presque entièrement internalisée des femmes, une oppression qui demeure absolument incomprise. "
"Vous faites passer un souffle nouveau sur cette période révolutionnaire qu'on croyait ressassée et défraîchie. Vos lettres sont d'une veine très originale, je n'en ai pas vu l'équivalent ailleurs. Cette façon de mêler l'intime à l'historique, le sentiment à l'analyse, le présent au passé, c'est un nouveau genre que vous inaugurez.".
Régis Debray.
Dans cette suite de libres pensées, l'autrice partage avec nous l'admiration qu'elle éprouve pour l'immense effort humain que fut la Révolution française malgré ses dérives. Alternant le ressenti personnel et la rigueur historique, elle se positionne en faveur des espérances légitimes qui l'ont fait naître. Espérances qu'il nous appartient aujourd'hui de revivifier.
Friedrich Engels publie, en 1884, un an après la mort de Karl Marx, cet essai d'après les notes et les réflexions laissées par ce dernier sur les études anthropologiques des sociétés archaïques de Lewis Henry Morgan.
Engels se réfère aussi au livre Le Droit maternel de Johann Jakob Bachofen. Abordant les thèmes du patriarcat, du matriarcat et des héritages biologique et social, cet ouvrage retrouve - à notre époque où les luttes de femmes prennent un nouveau virage, un nouveau visage - toute sa pertinence. Le texte de Engels est au fondement même de la théorisation de l'état « marxiste ». Il est légitime de considérer cet essai comme le premier ouvrage anthropologique « marxiste ». Lénine, en 1917, précisera :
« [...] J'espère que sur la question de l'état, vous lirez l'ouvrage de Engels L'origine de la famille, de la propriété privée et de l'état. C'est une des oeuvres maîtresses du socialisme moderne, où l'on peut faire confiance à chaque phrase, être sûr qu'elle n'a pas été écrite au petit bonheur, mais qu'elle s'appuie sur une énorme documentation historique et politique. » S'il fallait résumer ce livre par une seule phrase, ce serait bien « Marx et Engels considèrent les femmes comme la première classe opprimée ».