«?Ça commence parfois par une inquiétude ou un malaise. On se sent en décalage, on craint d'agir de manière déplacée. On a le sentiment de ne pas «être à sa place». Mais qu'est-ce qu'être à sa place, dans sa famille, son couple, son travail ? Quels sont les espaces, réels ou symboliques, qui nous accueillent ou nous rejettent ? Faut-il tenter de conquérir les places qui nous sont interdites, à cause de notre genre, notre handicap, notre âge, notre origine ethnique ou sociale ? Peut-être faut-il transformer ces lieux de l'intérieur et s'y créer une place à soi ??» Dans cet ouvrage aussi passionnant que sensible, la philosophe Claire Marin explore toutes les places que nous occupons - quotidiennement, volontairement ou contre notre gré, celles que nous avons perdues, celles que nous redoutons de perdre - et interroge ce qui est à la fois la formulation d'un désir personnel et un nouvel impératif social. Encore reste-t-il à savoir si l'on finit tous par trouver une place, ou si le propre d'une place n'est pas plutôt de sans cesse se déplacer, ou de déplacer celui qui croit pouvoir s'y installer...
Les risques écologiques et politiques actuels expliquent le climat d'anxiété dans lequel nous vivons. Tout en soulignant la dynamique destructrice du désespoir, Corine Pelluchon montre que la confrontation à la possibilité d'un effondrement de notre civilisation est l'occasion d'un changement ouvrant un horizon d'espérance. Cela suppose de comprendre que l'espérance n'a rien à voir avec l'optimisme qui masque la gravité de la situation et qu'elle se distingue aussi de l'espoir qui exprime le souhait de voir ses désirs personnels se réaliser. Opposée au déni, l'espérance implique l'épreuve du négatif. Elle est la traversée de l'impossible.
En décembre 1934, simone weil entre comme " manoeuvre sur la machine " dans une usine.
Professeur agrégé, elle ne se veut pas " en vadrouille dans la classe ouvrière ", mais entend vivre la vocation qu'elle sent être sienne : s'exposer pour découvrir la vérité. car la vérité n'est pas seulement le fruit d'une pensée pure, elle est vérité de quelque chose, expérimentale, " contact direct avec la réalité ".
Ce sera donc l'engagement en usine, l'épreuve de la solidarité des opprimés - non pas à leurs côtés, mais parmi eux.
L'établissement en usine, comme, plus tard, l'engagement aux côtés des anarchistes espagnols ou encore dans les rangs de la france libre, est la réponse que simone weil a trouvée au mensonge de la politique, notamment celle des dirigeants bolcheviks qui prétendaient créer une classe ouvrière libre, alors qu'aucun " n'avait sans doute mis le pied dans une usine et par suite n'avait la plus faible idée des conditions réelles qui déterminent la servitude ou la liberté des ouvriers ".
Ce qui, toujours, a fait horreur à simone weil dans la guerre, qu'elle soit mondiale ou de classes, " c'est la situation de ceux qui se trouvent à l'arrière ".
«Les vieillards sont-ils des hommes ? À voir la manière dont notre société les traite, il est permis d'en douter. Elle admet qu'ils n'ont ni les mêmes besoins ni les mêmes droits que les autres membres de la collectivité puisqu'elle leur refuse le minimum que ceux-ci jugent nécessaire ; elle les condamne délibérément à la misère, aux taudis, aux infirmités, à la solitude, au désespoir. Pour apaiser sa conscience, ses idéologues ont forgé des mythes, d'ailleurs contradictoires, qui incitent l'adulte à voir dans le vieillard non pas son semblable mais un autre. Il est le Sage vénérable qui domine de très haut ce monde terrestre. Il est un vieux fou qui radote et extravague. Qu'on le situe au-dessus ou en dessous de notre espèce, en tout cas on l'en exile. Mais plutôt que de déguiser la réalité, on estime encore préférable de radicalement l'ignorer : la vieillesse est un secret honteux et un sujet interdit. Quand j'ai dit que j'y consacrais un livre, on s'est le plus souvent exclamé : "Quelle idée ! C'est triste ! C'est morbide !" C'est justement pourquoi j'ai écrit ces pages. J'ai voulu décrire en vérité la condition de ces parias et la manière dont ils la vivent, j'ai voulu faire entendre leur voix ; on sera obligé de reconnaître que c'est une voix humaine. On comprendra alors que leur malheureux sort dénonce l'échec de toute notre civilisation : impossible de le concilier avec la morale humaniste que professe la classe dominante. Celle-ci n'est pas seulement responsable d'une "politique de la vieillesse" qui confine à la barbarie. Elle a préfabriquée ces fins de vie désolées ; elles sont l'inéluctable conséquence de l'exploitation des travailleurs, de l'atomisation de la société, de la misère d'une culture réservée à un mandarinat. Elles prouvent que tout est à reprendre dès le départ : le système mutilant qui est le nôtre doit être radicalement bouleversé. C'est pourquoi on évite si soigneusement d'aborder la question du dernier âge. C'est pourquoi il faut briser la conspiration du silence : je demande à mes lecteurs de m'y aider.» Simone de Beauvoir.
Le corps a des besoins évidents : de la nourriture, du sommeil, de la chaleur ; mais l'âme, quels sont ses besoins ? Dans ces pages célèbres, Simone Weil aborde une petite quinzaine de thèmes fondamentaux à une société adulte : besoin de cohérence, de sécurité, liberté de parole, consentement, responsabilité, égalité, risque, vérité, propriété, etc.
L'oeuvre poétique d'Edith Bruck est indissociable de son oeuvre narrative, elle puise dans sa vie de déportée hongroise et d'émigrée en Italie l'essentiel de son inspiration, faite de souvenirs, de prises de position personnelles et politiques, de réflexions sur la société et sur les choix de vie et sur sa vie familiale et conjugale. Le précédent recueil d'Edith Bruck, paru chez Rivages,
Depuis la terrible expérience du confinement, les États comme les individus cherchent tous comment se déconfiner, en espérant revenir aussi vite que possible au « monde d'avant » grâce à une « reprise » aussi rapide que possible. Mais il y a une autre façon de tirer les leçons de cette épreuve, en tout cas pour le bénéfice de ceux que l'on pourrait appeler les terrestres. Ceux-là se doutent qu'ils ne se déconfineront pas, d'autant que la crise sanitaire s'encastre dans une autre crise bien plus grave, celle imposée par le Nouveau Régime Climatique. Si nous en étions capables, l'apprentissage du confinement serait une chance à saisir : celle de comprendre enfin où nous habitons, dans quelle terre nous allons pouvoir enfin nous envelopper - à défaut de nous développer à l'ancienne ! Où suis-je ? fait assez logiquement suite au livre précédent, Où atterrir ?Comment s'orienter en politique. Après avoir atterri, parfois violemment, il faut bien que les terrestres explorent le sol où ils vont désormais habiter et retrouvent le goût de la liberté et de l'émancipation mais autrement situées. Tel est l'objet de cet essai sous forme de courts chapitres dont chacun explore une figure possible de cette métaphysique du déconfinement à laquelle nous oblige l'étrange époque où nous vivons.
Les émotions ont mauvaise presse et souffrent depuis toujours d'un préjugé tenace. Les émotions, ce sont les « humeurs », ou encore les « passions » ? passivité de l'âme. Aujourd'hui encore, les hommes, bien souvent, ne doivent pas montrer leurs larmes, tandis que les femmes passent pour hystériques quand elles le font. Pourtant, ce sont nos émotions, ce que nous ressentons, qui nous rendent humains.
À rebours du développement personnel, c'est un guide philosophique des émotions que propose Ilaria Gaspari. Nostalgie, angoisse, gratitude, etc. : les mots que nous mettons sur nos maux ont une histoire, celle de toutes les personnes qui les ont vécues, dites, chantées, étudiées. En s'appuyant sur les plus grands philosophes et la littérature, des récits initiatiques d'Homère à Schopenhauer en passant par Spinoza, Ilaria Gaspari montre que ce qui est le plus intime est aussi universel : les émotions nous inscrivent dans la lignée des hommes.
À travers ce voyage émotionnel dans le temps et la philosophie, à partir de son expérience personnelle, Ilaria Gaspari enjoint à se reconnaître comme émotif afin de ne pas se laisser dominer par elles, ne pas les subir, ni les réprimer, mais les vivre et nous fier à ce qu'elles nous disent. Car c'est l'émotion que nous ressentons qui nous rappelle nos besoins profonds, qui nous rappelle que nous sommes humains.
« Mollesse du coeur », « mollesse des moeurs », « mollesse de tous » : la mollesse est, sous la plume de Tocqueville, l'un des traits saillants de l'individu démocratique. Inquiet de perdre ses biens, plein de sensiblerie, préférant la paix à la guerre, il a perdu tout l'éclat de l'aristocratie, de son courage, de son goût pour les émotions violentes et brillantes... et pour l'honneur. Paradoxalement, l'individu démocratique a beau être individualiste, il a perdu de son individualité, de sa singularité. Informe, noyé dans la masse difforme, soumis à une majorité sans tête, il est l'antihéros par excellence, qu'Alexis de Tocqueville nous met en garde d'incarner. Mais qu'y a-t-il de si effrayant dans la mollesse ? Pourquoi semble-t-elle plus périlleuse qu'un coup dur ? Est-elle forcément le synonyme de l'inaccomplissement ? La mollesse tant dévoyée, qu'on retrouve tout autant dans le laxisme, dans le coup de mou ou dans le dégoût du visqueux, qui se déverse tout autant dans les champs politiques, moraux ou esthétiques, n'a-t-elle pas une forme de positivité ? De la mozzarella au laxisme, de l'impuissance au jogging, du coup de mou au pouvoir de l'informe, la philosophe Géraldine Mosna-Savoye cherche dans cet essai à redonner sens et valeur au mou.
Et si, comme les femmes, les hommes étaient depuis toujours victimes du mythe de la virilité ? Pour asseoir sa domination sur le sexe féminin, l'homme a, dès les origines de la civilisation, théorisé sa supériorité en construisant le mythe de la virilité. Un discours fondateur qui n'a pas seulement postulé l'infériorité essentielle de la femme, mais aussi celle de l'autre homme (l'étranger, le « sous-homme », le « pédéraste »...). Historiquement, ce mythe a ainsi légitimé la minoration de la femme et l'oppression de l'homme par l'homme.
Depuis un siècle, ce modèle de la toute-puissance guerrière, politique et sexuelle est en pleine déconstruction, au point que certains esprits nostalgiques déplorent une « crise de la virilité ».
Si la virilité est aujourd'hui un mythe crépusculaire, il ne faut pas s'en alarmer, mais s'en réjouir. Car la réinvention actuelle des masculinités n'est pas seulement un progrès pour la cause des hommes, elle est l'avenir du féminisme.
La présente édition comprend d'abord une notice sur la genèse de l'essai de Simone Weil. Suit le texte intégral des Réflexions sur les causes de la liberté et de l'oppression sociale (1934), établi et révisé à partir de la dactylographie originale déposée à la BnF. Enfin, une étude intitulée «Transposer la pensée de Simone Weil», par Robert Chenavier, permet au lecteur de poursuivre la réflexion en donnant à la fois un commentaire de la structure du texte et en faisant ressortir l'originalité des thèses de Simone Weil.
Le but de cet essai est de mettre en évidence que les analyses de la philosophe peuvent être transposées aujourd'hui, afin de mieux comprendre le désarroi de notre époque et d'aider à trouver une sortie qui soit à la fois possible et souhaitable à la crise que nous vivons.
« Ce livre est une playlist philosophique qui pourra vous accompagner à différents moments de votre vie : sur un stade de rugby, au café, à un premier rendez-vous, dans les moments d'ennui ou les instants de peur, en cas de crise d'amitié ou d'idéalisme, lors de grande maladie ou d'envie de voyage. Tous ces thèmes y figurent, et vous verrez que la philosophie, quand elle part de la vie, rend soudain les auteurs que l'on croyait inatteignables aussi familiers que des nouveaux voisins qui soudain vous invitent à diner. La radio comme la philosophie sont avant tout une affaire de goût. Alors, à table?! et surtout : bon appétit. » Adèle Van Reeth Avec la participation de Frédéric Boyer, Abdennour Bidar, Philippe Cabestan, Philippe Cornu, Vincent Delecroix, Carole Desbarats Dimitri El Murr, Cynthia Fleury, Michaël Fossel, Daniel Herrero, Raphaël Imbert, Hervé Joubert Laurencin, Pierre Judet de la Combe, Hélène L'Heuillet, Anne Merker, Denis Moreau, Jean-Marc Mouillie, Didier Ottinger, Paul Rateau, Hubert Reeves, Philippe Rouyer, Emmanuel Salanskis Michel Serres, Ariel Suhamy, Olivier Tinland, et Mathieu Triclot.
Très claire introduction au phénomène du totalitarisme, ce livre rassemble deux textes de Hannah Arendt qui se situent dans le sillage immédiat de son ouvrage majeur, «Les Origines du totalitarisme» (1951), qu'il contribue à éclairer et à approfondir. « La nature du totalitarisme » (1954) est une conférence où Arendt traite de la spécificité du régime totalitaire par rapport au despotisme et aborde les thèmes de l'idéologie, de la terreur, de la tyrannie, de la solitude. « Religion et politique » (1953) est un essai où Arendt discute des religions politiques et séculières, et où elle réfléchit à la question de l'autorité.
Depuis la Seconde Guerre mondiale, le «réfugié» préfère en général l'appellation de «nouvel arrivant» ou d'«immigré», pour marquer un choix, afficher un optimisme hors pair vis-à-vis de sa nouvelle patrie. Il faut oublier le passé : sa langue, son métier ou, en l'occurrence, l'horreur des camps. Elle-même exilée aux États-Unis au moment où elle écrit ces lignes dans la langue de son pays d'adoption, Hannah Arendt exprime avec clarté la difficulté à évoquer ce passé tout récent, ce qui serait faire preuve d'un pessimisme inapproprié.
Pas d'histoires d'enfance ou de fantômes donc, mais le regard rivé sur l'avenir. Mais aux yeux de ces optimistes affichés, la mort paraît bien plus douce que toutes les horreurs qu'ils ont traversées. Comme une garantie de liberté humaine.
L'affaire Weinstein et le mouvement #MeToo ont mis la question des violences sexuelles au premier plan. Depuis, le consentement renvoie naturellement au consentement sexuel et amoureux, envisagé comme un sésame de l'égalité entre femmes et hommes. Pourtant, il est bien difficile à définir, et soulève trois problèmes. Le problème juridique, bien connu de celles et ceux qui suivent l'actualité, peut être résumé ainsi:que faire pour que les cas de viol, d'agression et de harcèlement sexuels soient efficacement punis? Le deuxième problème est moral:comment penser des relations amoureuses et sexuelles qui ne soient pas fondées sur des normes sociales sexistes et inégalitaires? Enfin, le problème politique:comment ne pas reconduire les injustices de genre qui se manifestent dans les rapports amoureux et sexuels?La magistrale analyse du consentement que propose Manon Garcia revisite notre héritage philosophique, plongeant au coeur de la tradition libérale, mettant à nu ses impensés et ses limites. De John Locke aux théoriciennes féministes françaises et américaines, en passant par Michel Foucault et les débats sur la pratique du BDSM, c'est une nouvelle cartographie politique de nos vies privées que dessine cet essai novateur. Au terme de ce livre, il s'agira en somme, pour reprendre la formule de Gloria Steinem, d'«érotiser l'égalité» plutôt que la domination:en ce sens, le consentement sexuel, conçu comme conversation érotique, est sans doute l'avenir de l'amour et du sexe.
la publication de l'origine des espèces, en 1859, a marqué une révolution intellectuelle comparable à celle qui est associée aux noms de copernic et galilée.
en proposant une théorie de la " descendance avec modification " et de la " sélection naturelle ". darwin apportait des réponses aux questions qui préoccupaient les naturalistes de son époque. le caractère radical de ces réponses aussi bien que les problèmes qu'elles laissaient en suspens ont alimenté d'emblée polémiques et controverses. de là les ajouts et les digressions qui, au gré des six éditions successives de l'oeuvre, en vinrent à obscurcir le propos d'origine.
en élaguant la traduction d'edmond barbier de ce qui ne figurait pas dans l'édition de 1859 et en y rétablissant ce qui en avait disparu, le présent volume permet au lecteur francophone de retrouver cette oeuvre dans sa fraîcheur initiale.
Agnes Heller dans ce recueil sur l'Europe, met en discussion les "valeurs communes européennes", s'interroge sur le rôle des simples citoyens et se demande si: "L'Europe est quelque chose de plus qu'un musée?" Dans ces textes, il est question des grands paradoxes qui caractérisent si bien le continent européen que la culture occidentale : l'universalisme humaniste et le fanatisme nationaliste, la tolérance et la xénophobie, le totalitarisme et la liberté.
Silvia Federici, dont le nom a déjà un fort écho en France depuis le succès du volumineux Caliban et la sorcière (Entremonde, 2014) propose ici une lecture inédite des rapports sociaux de domination, en faisant le choix de décentrer le regard par rapport aux domaines traditionnels de la critique sociale, à savoir le salariat et l'économie marchande.
Bien informée par sa grande fresque historique de la chasse aux sorcières à l'aube du capitalisme, Federici voit dans la famille et le contrôle de la sexualité, de la natalité, de l'hygiène et des populations surnuméraires (exclus, migrants et migrantes), la véritable infrastructure de la sphère productive.
Comment en effet faire tourner les usines sans les travailleurs bien vivants, nourris, blanchis, qui occupent la chaîne de montage ?
Loin de se cantonner à donner à voir le travail invisible des femmes au sein du foyer, Federici met en avant la centralité du travail consistant à reproduire la société (sexualité, procréation, affectivité, éducation, domesticité) et historicise les initiatives disciplinaires des élites occidentales à l'égard des capacités reproductrices des hommes et des femmes. De ce fait, la lutte contre le sexisme n'exige pas tant l'égalité salariale entre hommes et femmes, ni même la fin de préjugés ou d'une discrimination, mais la réappropriation collective des moyens de la reproduction sociale, des lieux de vie aux lieux de consommation, ce qui ne va pas sans la fin du capitalisme et de la production privée - production et reproduction étant irréductiblement enchâssées.
Ce livre constitue un essai court et percutant qui propose une lecture féministe, critique et exigeante de Marx, sans aucun prérequis en philosophie ou sciences économiques ; cet essai permet en outre de saisir avec rigueur la scansion historique du capitalisme patriarcal, ou encore les débats au sein du mouvement ouvrier sur l'horizon stratégique du féminisme.
Pour aider au développement et à la stabilité de la démocratie et la république, la philosophe Simone Weil (1909-1943) suggère ici la disparition des partis politiques.
Eros et libido, sexe et genre : Les mots se succèdent depuis un peu plus d'un siècle pour dire la dualité et le rapport entre hommes et femmes.
Si l'on cherche l'objet philosophique, on trouve l'expression " différence des sexes ", " Geschlechterdifferenz " sous la plume hegelienne. Quant au genre, ce mot fait le pari de brouiller les pistes des représentations contraintes qui assignent chaque sexe à sa place. Et si, toute terminologie confondue, on s'en tenait à ce que la " différence des sexes " est une catégorie vide ? Alors, on se situerait " à côté du genre ", à côté des affaires de définition et d'identité, pour établir le repérage des lieux où sont pensés les sexes, dans leur tension, leur décalage, leur disparité au regard du contemporain démocratique.
Au fond, la démarche est inversée : il ne s'agit pas de voir ce qu'il en est du sexe et du genre, mais de dire ce qui surgit dans la pensée quand égalité et liberté révèlent des enjeux sexués dans la politique et la création, l'économique et le corps, la pensée et l'agir.
Comment expliquer qu'une société obsédée par le travail ait pu propulser le jeu au sommet des activités de loisirs et des industries mondiales ? Les jeux de société, le cosplay, les Zombies Walks, les jeux vidéo, les films de super-héros, les applications de rencontre, les mondes numériques persistants, les réseaux sociaux, Minecraft ou, plus récemment, les projets de « metavers », Fortnite, TikTok, la réalité augmentée offrent des espaces d'expérimentation de nouveaux récits collectifs et de nouvelles formes sociales (couple, travail, genre, famille, communautés). Plutôt que de cantonner les activités ludiques à l'enfance, l'auteur choisit d'en faire la clé de lecture de notre époque et de ses mutations, une échappatoire, un ensemble de mondes où se forgent les sociétés à venir.
L'ouvrage débute par une définition très précise des termes « anarchie » et « anarchisme » et de leur histoire, en même temps que par un tour d'horizon des enjeux politiques contemporains qui rendent nécessaire une nouvelle réflexion sur ces termes et leur potentiel émancipateur, trop vite enterré ou méprisé (les anarchistes sont des nihilistes, des terroristes, etc.). Catherine Malabou s'interroge sur la raison pour laquelle certains des philosophes les plus importants du XXe siècle ont élaboré des concepts d'anarchie décisifs pour comprendre la situation contemporaine de la pensée en matière d'éthique et de politique sans jamais toutefois se référer à l'anarchisme. Comme si l'anarchisme était quelque chose d'inavouable, qu'il faudrait cacher alors même qu'on lui vole l'essentiel : la critique de la domination et de la logique de gouvernement. Au fil de l'interprétation critique de chaque philosophe se dégagent les éléments d'une pensée du « non gouvernable », qui va bien au-delà d'un appel à la désobéissance ou d'une critique convenue du capitalisme. Le livre propose donc une réinterprétation de l'anarchisme.
Les principes fondamentaux de la République sont-ils contraires au colonialisme ? Quels impacts la colonisation a-t-elle sur un État qui se transforme en métropole d'un empire ? Et quels sont ses effets intérieurs ? Dans ces articles, écrits entre 1936 et 1943, le verdict de Simone Weil est sans appel : coloniale, la France opprime des peuples et perd ses principes. La colonisation rend impossible l'amitié entre les peuples (ce qui posera problème, dit-elle, si la France veut de nouveau enrôler les populations des colonies dans une guerre). Ces réflexions sur la colonisation pensée comme déracinement vont la conduire à son oeuvre majeur : «L'Enracinement».
Dans l'espace public et notre quotidien, la colère affiche de multiples visages. Systématiquement discréditée, au point d'être ridiculisée, elle ne cesse pourtant de gronder - et nous redoutons son tumulte. Que faire de nos colères?Quand on nous incite à cultiver une attitude docile et à étouffer nos colères, afin de nous rendre plus désirables, c'est au silence que l'on nous habitue, voire au renoncement. Mais pour nous défendre face aux agressions intimes et politiques, comme pour garantir notre liberté, pourquoi ne pas puiser dans ces colères créatrices, celles des artistes et des minorités en lutte pour leur liberté? Ces colères sont en nous - encore faut-il apprendre à les habiter. En disséquant cette émotion défendue, Sophie Galabru construit une philosophie émancipatrice et stimulante pour affronter l'intolérable, et propose un manifeste puissant:la colère, loin d'être destructrice ou haineuse, pourrait bien être la clé de notre vitalité.