Les discours religieux fondamentalistes expriment une obsession croissante de la pudeur des femmes. Réduite aux parties de son corps susceptibles d'éveiller le désir, la femme est « génitalisée » à outrance. Faut-il la renvoyer à son destin : le voilement ?
Delphine Horvilleur analyse les sens de la pudeur et de la nudité, l'obsession du corps de la femme pour proposer une autre interprétation des textes et de la tradition. Elle met à mal les lectures qui font de la femme un être tentateur, et de la pudeur l'instrument de sa domination.
Ainsi montre-t-elle comment la nudité recouverte d'Adam, d'Ève ou de Noé renvoie à une culture du désir et non à une volonté de le tuer. Comment le voile est à l'origine destiné à approcher l'autre. Comment les hommes endossent, dans la prière et la pratique, les attributs des femmes et du maternel.
Kahina Bahloul est une islamologue franco-algérienne. Première femme à se déclarer imam en France, elle est la co-fondatrice du projet d'association cultuelle La Mosquée Fatima, qui promeut un islam libéral.
Floriane Chinsky est une femme rabbin française. Elle fut tour à tour rabbine en Israël puis en Belgique et enfin en France. Elle participe au dialogue interconvictionnel.
Emmanuelle Seyboldt, née Carrière, est une pasteure française, présidente du conseil national de l'Église protestante unie de France.
Les théologies féministes, nées au milieu du xxe siècle, sont aujourd'hui encore perçues comme inquiétantes et suspectes, car s'attaquant à une question de fond : la religion chrétienne peut-elle exister sans l'oppression qu'elle génère dans le domaine sexué ? C'est aussi la question que pose cet ouvrage, qui interroge les représentations de Dieu×e, les rites, les mots pour le dire, l'organisation institutionnelle de la religion, autant que les attitudes des Églises à l'égard des sexualités, des genres, des modèles familiaux, des conceptions du corps et de la reproduction.
Ce livre met à disposition d'un large public toutes ces réflexions fécondes, encore peu diffusées en France, et qui, loin d'être incompatibles avec le christianisme, sont, sans aucun doute, son nouveau souffle.
De tous les actes inachevés, de tous les gestes que nous n'avons pas menés jusqu'au bout, de tout cet à peu près dont nous tissons nos jours et nos nuits, de toutes les rencontres avortées avec soi-même et les autres, naît un jour la crise. Une femme vit cette « nuit de l'âme » au coeur de l'hiver dans la solitude d'une maison retirée. Elle l'explore, la pénètre et la retient en des lignes brèves, justes, fatales qui touchent droit au coeur. Traversée du miroir, récit initiatique, Histoire d'âme évoque au plus profond et au plus simple le mystère, la difficulté et le bonheur d'être, avec des éclats de diamant noir.
Avec Hadewijch d'Anvers et Catherine de Sienne, Hildegarde de Bingen est une des trois grandes mystiques qui ont marqué la spiritualité du Moyen Âge. Elle est restée d'une étonnante modernité, notamment par sa vision « écologique » avant la lettre - ses recettes de médecine par les plantes sont redevenues à la mode.
Sa vision, cette femme aux multiples talents l'a exprimée à travers des créations picturales qui illustrent ses livres. Une dizaine de ces peintures accompagnent l'original du Livre des oeuvres divines, son grand classique. Ces images remarquables nous montrent un Homme christique en totale harmonie avec le Cosmos. Marie-Anne Vannier, spécialiste des mystiques rhénans, en décrypte la symbolique des formes et des couleurs, et montre comment ces oeuvres s'enracinent très précisément dans une mystique de l'harmonie
Deux écrivaines, toutes deux athées, dialoguent sur le féminin et le sacré. Dans cet essai épistolaire, les deux intellectuelles s'interrogent : existe-il un sacré spécifiquement féminin ?
Le livre repose sur l'intuition profonde de l'éveil des femmes en ce 3e millénaire, et sur le lien étroit qu'elles entretiennent avec le sacré.
D'un pèlerinage à la Vierge noire aux environs de Dakar jusqu'aux cultes de l'Inde, Catherine Clément, disciple de Claude Lévi-Strauss, témoigne de l'intelligence du sacré à l'oeuvre dans ces pays. Julia Kristeva évoque Thérèse d'Avila et les grandes mystiques chrétiennes.
« Qu'est-ce que le sacré ? », demandait Goethe dans un poème. Julia Kristeva rappelle ici sa réponse : « Ce qui unit les âmes ». À l'opposé d'un sacré totalisateur, ces deux femmes esquissent les contours d'un sacré qui, au carrefour du corps et de la pensée, donne sens à la singularité, et révèle sa vitalité dans le partage.
Il est des moments innombrables où Dieu se tait. Où le cri de l'homme se heurte au silence, renvoyé par l'impla-cable écho. De ce silence de Dieu, de cette absence d'amour, le siècle passé comme celui qui s'ouvre portent les stigmates avec leur cohorte de charniers, de génocides et de catastrophes naturelles. Toujours à reprendre, le cri de Job révolté devant la souffrance, l'injustice et l'absurde demeure d'actualité. C'est le point de départ de ce texte où se croisent littérature et spiritualité, pour se mettre à l'écoute des échos de ce silence irradié de résonances...
Le grand défi de cette nouvelle biographie d'Etty Hillesum (1914-1943) est de nous présenter la jeune femme juive d'Amsterdam qu'elle était vraiment : une amoureuse de la vie et de ses mystères. À la fois sensuelle, voire libertine, profondément spirituelle dans tous les sens de ce mot, audacieuse et bienveillante, elle se révèle curieuse de tout avec un foisonnement intellectuel et créatif d'une intensité rare.
Le célèbre journal d'Etty, Une vie bouleversée, et sa correspondance, reflètent ce constant paradoxe entre passion et sérénité. Elle oscille entre un Dieu qui est totalement présent, à la fois personnel et universel. Son cheminement intérieur la mène à ouvrir largement les bras et à embrasser toutes ses contradictions pour vivre au mieux sa foi dans la grandeur de l'existence.
Elle découvre que c'est en descendant au coeur de soi-même que l'on peut trouver le courage de réussir sa vie tout en étant utile envers son prochain. Un véritable basculement s'opère en effet en elle lorsqu'elle prend pleinement conscience du projet nazi : elle est internée au camp de Westerbork en Hollande, de 1942 jusqu'à son départ définitif en septembre 1943. Souriante, elle aide et réconforte jusqu'au bout tous ceux qui se trouvent autour d'elle.
À l'âge de 29 ans elle est transférée à Auschwitz où elle décède fin novembre.
Remercier et rendre grâce, en pensée, en parole et en acte, est souvent difficile. Notamment pour ceux que le malheur personnel épargne ou au contraire pour ceux qui sont trop éprouvés. Comment donc une vie à première vue condamnée à ignorer ce sentiment de gratitude peut-elle donc le découvrir, soudain ou peu à peu ? La crise sanitaire mondiale du printemps 2020 peut-elle jouer un rôle dans cette découverte ? Comment penser que la gratitude reste si souvent un tourment ?
Pourquoi certaines personnes estiment-elles que celui qui remercie atteste son infériorité, par rapport à celui qu'il remercie ? Probablement parce que remercier place dans une position où les êtres humains affrontent une asymétrie entre eux. Reconnaître cette asymétrie, la voir comme une fragilité, mais aussi une richesse, voilà le chemin philosophique et spirituel que propose dans ce beau texte la philosophe Catherine Chalier.
Marija Gimbutas (1921-1994), archéologue américaine d'origine lituanienne, professeure à l'université de Californie, est l'auteure d'une vingtaine d'ouvrages. Partie de l'archéologie matérielle, elle a progressivement orienté ses travaux vers une « archéomythologie » (procédé interdisciplinaire qui relie l'archéologie, la mythologie comparée et le folklore), appliquée aux cultures « pré-patriarcales » (néolithiques) de l'Europe et, plus particulièrement, du domaine égéen et balkanique. Le Langage de la déesse constitue l'aboutissement de ses plus importantes recherches.
Dont elle comprend sa vocation sans rompre pour autant l'extraordinaire continuité de ses amitiés et de ses fidélités. Bien des lettres qu'elle a écrites ont été détruites ou perdues, mais celles qui restent témoignent de l'intense activité épistolaire de la carmélite.
Cc second volume de Correspondance permet de découvrir comment Edith Stein est demeurée une femme politiquement engagée, au regard lucide, une philosophe qui continue à confronter phénoménologie et tradition catholique, une femme juive profondément solidaire de son peuple, une pédagogue qui aime à conduire les autres à la révélation de ce qu'ils sont. Affectée, à la fin de 1938, au carmel d'Echt en Hollande, elle s'adapte avec courage à son nouvel environnement, apprenant la langue, conseillant de jeunes étudiants en philosophie, toujours soucieuse du sort des siens.
Les derniers documents incluent les échanges de courrier autour de son éventuel passage en Suisse, alors qu'elle est déjà déportée, avec sa soeur Rosa, à Auschwitz, où elle meurt en 1942.
Papa, maman, la rue et moi : Quelle vie de famille pour les " sans-domicile " ? Au cours de sa vie, une personne sur vingt s'est retrouvée sans logement (Insee, 2009).
Français ou étrangers, salariés, chômeurs, retraités... : nul ne peut être sûr de garder ad vitam un toit sur sa tête. Pas même les mieux entourés. Car ces hommes et ces femmes sans " chez eux ", loin d'être isolés, ont souvent des enfants, des conjoints, des parents, des frères, des soeurs... Concrètement, qui sont les personnes mal logées ? Comment en sont-elles arrivées là ? Comment leur vie de famille résiste-t-elle à ce séisme ? Comment, sans maison, assument-elles sereinement leur rôle de mère, de père ? Quelles conséquences cette situation a -t-elle sur leurs enfants, sur leur santé, leur scolarité ? Sous forme de galerie de portraits, ce livre met en lumière les invisibles, ces familles entières qui viennent grossir les rangs des sans-logis.
Il révèle aussi la double peine dont sont victimes les plus précaires : sans toit à soi, le lien familial se délite...
Quatre témoins privilégiés issus du judaïsme, du christianisme et de l'islam, habitués du dialogue interreligieux, se penchent avec lucidité sur la difficile coexistence de ces trois grandes religions.
Chacun livre sa vision des autres religions, de sa propre histoire, de l'actualité éprouvante liée au dévoiement des croyances souvent récupérées par des manipulateurs dogmatiques.
Ensemble, ils prouvent qu'il est possible de dialoguer et de trouver des solutions fondées sur la connaissance et le respect de l'autre.
La notion de sacré semble inséparable de l expérience religieuse. De manière paradoxale, dans nos sociétés occiden-tales contemporaines, l intérêt pour le sacré n a cessé d augmenter à mesure que déclinait le religieux. Dès lors, notre modernité critique, qui a pris ses distances avec la sacralité traditionnelle, risque-t-elle réellement de nous faire perdre l intelligibilité du sacré ? Ne nous offre-t-elle pas au contraire des méthodes nouvelles propres aux sciences religieuses et aux sciences humaines, et susceptibles de favoriser l évaluation des fondements et des effets du sacré ? Cet ouvrage fait le pari qu il est aujourd hui possible de repenser les pratiques et les théories du sacré, et que le sacré, donc, a un avenir.
Si la politique sexuelle est aujourd'hui le champ de bataille politique par excellence, pour la théologie comme plus largement pour nos sociétés, c'est précisément que s'y pose la question suivante : peut-on penser la démocratie sans fin, c'est-à-dire sans fondement, fût-il naturel ? On mesure ici l'importance de la théologie queer d'Elizabeth Stuart, qu'on va découvrir en France grâce au travail de Stéphane Lavignotte. L'enjeu n'est autre, à rebours du refus répété de la modernité, que la possibilité d'une théologie démocratique.
Dans cet ouvrage, Judith Butler s´interroge sur la possibilité d´articuler les expériences juives de la diaspora et du déplacement et les expériences palestiniennes de la dépossession pour fonder une nouvelle éthique de la cohabitation dans la région et renouer avec la solution politique d´un État binational. La cohabitation non voulue est une condition de notre vie politique, et non quelque chose que nous pouvons mettre à mal. Nul n´est en droit de choisir avec qui cohabiter sur cette terre. Judith Butler puise dans la philosophie juive de quoi élaborer une critique du sionisme politique, de la violence d´État, du nationalisme et du colonialisme de l´État d´Israël. Pour elle, il est important de mettre en question la prétention d´Israël à représenter les Juifs. Elle engage ainsi la discussion avec des auteurs comme Hannah Arendt, Emmanuel Levinas, Primo Levi, Martin Buber, Walter Benjamin, mais aussi Edward Said ou Mahmoud Darwich. Selon Judith Butler, l´éthique de la judéité exige une critique du sionisme et ouvre la possibilité de réaliser un idéal politique de cohabitation au sein d´une démocratie radicale.