Bouquins
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Les Mémoires politiques très attendus d'une grande journaliste, témoin de premier plan de l'histoire de la Cinquième République de 1958 à nos jours. Ce premier volume couvre la période De Gaulle, Pompidou et Giscard jusqu'à l'élection de François Mitterrand.
Née dans la politique, Michèle Cotta y a grandi, vécu, avec la soif permanente de l'événement et la curiosité inlassable d'approcher ses principaux protagonistes.
C'est à vingt ans, le 13 mai 1958, jour du retour au pouvoir du général de Gaulle, que, stagiaire à l'Institut français de presse et se trouvant par hasard sur les bancs des journalistes à l'Assemblée nationale, elle est plongée d'un coup au coeur d'une actualité qui se confond avec la grande Histoire. Peu après, recrutée par le service politique de L'Express, Michèle Cotta deviendra familière de tous les acteurs de la vie politique, gaullistes ou pas, et plutôt de gauche. Leurs vies, leurs itinéraires politiques surtout, la passionnent et l'intriguent.
De 1965 et la première élection présidentielle au suffrage universel du général de Gaulle à 1981 et l'accession au pouvoir de Mitterrand, elle couvre dans ce premier volume tous les grands événements qui marquèrent les débuts de la Ve République : Mai 68, le référendum en 1969, les coulisses de la succession de Georges Pompidou, la relation Giscard-Chirac...
Ce qui la fascine chez les hommes politiques, avoue-t-elle, ce sont les fausses confidences, destinées à être répétées, les vraies, obtenues au moment où on ne s'y attend pas, les chemins suivis pour vaincre, les erreurs commises, les détours, les impasses. Les tourments de chacun, ses petits et grands secrets. Leur humanité, en bref, dont la grande observatrice qu'est Michèle Cotta nous livre des moments essentiels dans cette histoire personnelle et savoureuse de la Ve République, foisonnante de révélations, d'anecdotes, de choses vues et entendues. Le témoignage qu'on attendait. -
Depuis ses premiers livres, Tessa Hadley explore le réseau complexe des vies conjugales, amoureuses et sentimentales de ses contemporains. L'intrigue de ce huitième roman confronte l'histoire de plusieurs générations autour du choix libérateur de son héroïne, qui prend tous les risques pour assumer son épanouissement personnel.
Dans l'Angleterre de la fin des années 1960, Phyllis Fischer, épouse et mère quadragénaire, s'éprend de Nicholas Knight, le jeune fils d'amis de son mari. Pour lui, elle abandonne son foyer et les conventions d'un ordre social devenu moralement inacceptable. Tout en s'apercevant que son amant n'est pas exactement celui qui lui convient, elle tombe enceinte et décide de garder l'enfant, qu'elle est heureuse d'élever.
Dans ce style fluide et raffiné qui lui permet de sonder admirablement la psychologie de ses personnages, Tessa Hadley décrit aussi bien le quotidien des classes sociales supérieures que la vie de bohème et les idées nouvelles à l'heure de la révolution sexuelle. La condition féminine est une question centrale, sans être traitée sous l'aspect du militantisme : seule compte la volonté d'une femme désireuse d'être elle-même en découvrant que l'âge mûr ne saurait être un obstacle aux plaisirs de la chair. Phyllis découvre le droit de conjuguer jouissance et maternité en bousculant tous les tabous. -
Annie Le Brun est poète. Elle a écrit des essais consacrés, entre autres, au genre noir à la fin du XVIIIe siècle, au marquis de Sade, à la littérature, à la laideur et à la beauté. Cet ouvrage donne à lire la part essentielle de son oeuvre.
De ne m'être jamais prise pour un écrivain ni de n'avoir jamais projeté de faire oeuvre, j'ai écrit seulement pour savoir où j'allais. Il s'ensuit que façon d'être, façon de penser, façon d'écrire sont alors si imbriquées que tout y fait sens. Aucun soir ne ressemble à un autre, surtout quand la formulation d'une impression, d'une sensation et même d'une idée en dépend...
S'il m'est arrivé d'évoquer la dérive au long cours à laquelle j'ai souhaité que ma vie ressemble, alors les livres correspondent autant aux îles abordées qu'à la constitution de nouveaux atolls, les unes et les autres continuellement retravaillés par les vents et courants d'un enchevêtrement de temps courts et de temps longs. Comme s'il s'agissait de trouver la forme susceptible d'affronter le néant sinon de le conjurer. Sans doute n'ai-je jamais cédé sur le désir insistant, formulé dès le départ, de voir s'élargir l'horizon, mais je dois à une note tardive de Victor Hugo de supposer que je n'ai cessé d'y chercher ce qui pourrait bien ressembler à l'infini dans un contour.
A. L. B.
?Ce volume contient :
Ombre pour ombre ; Les Châteaux de la subversion ; Soudain un bloc d'abîme, Sade ; Appel d'air ; Surréalisme et subversion poétique ; Perspective dépravée ; Pour Aimé Césaire ; Du trop de réalité ; Si rien avait une forme, ce serait cela ; " Voici venir l'amour du fin fond des ténèbres " ; Ce qui n'a pas de prix. -
L'art dévoile-t-il ou dissimule-t-il le créateur ?
Une étudiante en histoire de l'art loue la maison d'un professeur dont elle suit les travaux de recherche. Il la prévient simplement que sa femme Agnes, qui est peintre, viendra occuper quelques jours l'atelier du premier étage.
Lorsque celle-ci arrive, une intimité se noue entre les deux femmes : au fil de leurs rencontres dans l'escalier, dans l'atelier ou au café, Agnes se confie sur sa jeunesse, sa famille, son mariage, ses enfants et son rapport à l'art. Il apparaît petit à petit qu'Agnes n'a plus d'autre endroit où aller. Les moments de sa vie racontés avec frénésie trahissent une personnalité dispersée et mouvante. Sa créativité, qui reste à l'état d'une peinture blanche sur une toile blanche, s'en ressent.
Dans ce roman empreint d'une atmosphère trouble et sensuelle, Ay?egül Sava?, d'une plume précise et subtile, plonge son lecteur dans le monde inquiétant de la création et interroge la figure de l'artiste: l'art dévoile-t-il ou dissimule-t-il le créateur ? -
Spécialiste des présocratiques, ces « philosophes » du Ve siècle avant J.-C. que Martin Heidegger désigne comme l'aurore de la pensée, Barbara Cassin raconte l'histoire de la philosophie en s'appuyant sur les sophistes, ces autres maîtres en culture et en démocratie.
Ce volume réunit des textes devenus souvent introuvables, des traductions - de Gorgias en particulier - et des ouvrages intégraux, parmi lesquels Parménide, la langue de l'être ?, Aristote, la décision du sens. Tous structurés autour d'une trame qui fait de cet ouvrage une oeuvre à part entière.
Sa rencontre avec René Char et Martin Heidegger a conduit Barbara Cassin à repenser le rapport entre philosophie et poésie. Que peut le langage, peut-on fabriquer le monde aussi avec des mots ? Et que nous apprend la diversité des langues à l'heure du mauvais anglais mondialisé qui raccourcit la pensée ?
L'Antiquité qu'explore Barbara Cassin est aussi d'une grande actualité. Elle ouvre sur le « peuple arc-en-ciel » et la commission Vérité et Réconciliation en Afrique du Sud, sur la psychanalyse ou le rapport entre sens et non-sens chez Freud et Lacan, sur la définition de la culture et de la démocratie avec Google-moi, sur l'hospitalité et la barbarie avec La Nostalgie. Elle livre les clefs du Dictionnaire des intraduisibles avec Plus d'une langue. Et partout, qu'il s'agisse de la toute première Initiation à l'explication de texte ou du récent Avec le plus petit et plus inapparent des corps, l'oeuvre de Barbara Cassin témoigne de cet amour du langage et de l'écriture qui ne requiert aucun savoir préalable et ne se laisse enfermer dans aucune discipline. -
Michelle Perrot est une des plus grandes historiennes contemporaines. Ses travaux, pionniers en matière d'histoire sociale, d'histoire des marges, des femmes et du genre, ont puissamment contribué à renouveler la discipline et ses objets. Les trois séquences qui rythment ce volume correspondent à ses thèmes de prédilection : ouvriers, marges et murs, femmes.
S'intéressant à travers eux à des figures de dominés, longtemps ignorés par les chercheurs, elle explore les traces à demi effacées de vies ordinaires qui, elles aussi, ont fait l'histoire : celles des ouvriers en grève ou des détenus du XIXe siècle, celles des enfants des rues, vagabonds ou autres Apaches de la Belle Époque. Celles enfin des femmes, toujours inscrites dans la diversité de leurs parcours et saisies dans la variété de leurs lieux de vie : la chambre, l'atelier, l'usine, la maison bourgeoise, la rue.
Longtemps étouffées ou inaudibles, les voix de ces femmes, ouvrières (« mot impie », selon Michelet) ou autrices (au premier rang desquelles George Sand), militantes ou anonymes, aux corps assujettis ou triomphants, exploités et désirés, sont restituées par la force d'un style singulier. Toutes semblent se rejoindre in fine dans la figure de Lucie Baud, « révoltée de la soie », meneuse de grève en Isère et inspiratrice de Mélancolie ouvrière, saisissant livre-enquête ici reproduit en intégralité.
Michelle Perrot a elle-même assuré la sélection, l'agencement et la présentation des textes retenus, portant un regard résolument lucide et personnel sur plus d'un demi-siècle de recherche et d'engagement. Ce volume permet d'en mesurer toute l'ampleur.
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Issue, par son père, d'une vieille famille catholique de droite, Élisabeth de Fontenay a été élevée dans l'ignorance des racines juives de sa mère, convertie au catholicisme, dont la famille fut exterminée à Auschwitz. À vingt-deux ans, elle rompt avec la religion catholique pour se tourner vers le judaïsme et assumer son ascendance juive. À la fois détruite et construite, dit-elle, par le secret qui entoura ses origines. Dans toute son oeuvre, elle n'a cessé de s'interroger sur les devoirs que nous avons envers les êtres vulnérables et de chercher à combler le silence de sa mère, celui de son frère, celui aussi des animaux qu'on extermine. Élisabeth de Fontenay, inlassablement, s'est attachée à mettre la philosophie « à l'épreuve de l'animalité », sans pour autant « offenser le genre humain ». Elle dénonce une tradition philosophique responsable, à ses yeux, de la longue méconnaissance de l'animal au nom du « propre de l'homme », et rappelle avec force que l'attention portée aux animaux ne saurait entrer en contradiction avec celle que l'on porte aux êtres humains et à leur propre identité. Fragilité, animale ou humaine, stupeur face à la violence génocidaire, amour de la littérature, admiration et méfiance mêlées vis-à-vis des Lumières, mais passion pour Diderot, « inventeur d'un matérialisme enchanté », engagement politique, autant de thèmes qui s'entrelacent dans ce volume rassemblant l'essentiel d'une oeuvre sensible, dense et inclassable, qui fait autorité et assure à son auteur un grand rayonnement.
Ce volume contient : Actes de naissance - Gaspard de la nuit - En terrain miné (avec Alain Finkielkraut) - Une tout autre histoire - La Prière d'Esther - Diderot ou le matérialisme enchanté - « Flaubert, un pensum mystique » - « Barbey, cet absolu littéraire » - La Grâce et le progrès - Sans offenser le genre humain - « Lucrèce, la force de dissidence du poème » - « La raison du plus fort » - « Entretien avec Jean-Louis Poirier ».
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Elle couvre les années 1995-2017, de l'élection de Jacques Chirac à celle d'Emmanuel Macron. Près de trente ans de vie politique et journalistique, mais aussi personnelle, racontés avec le même sens du trait, de la formule incisive, la même intensité romanesque qui font de Catherine Nay une observatrice et une narratrice hors pair, souvent mordante et toujours savoureuse.
Catherine Nay révèle ici les épreuves auxquelles elle a été confrontée dans sa vie affective et familiale : la perte de l'homme de sa vie en juillet 2020, et avant cela la mort de ses parents et de l'un de ses frères. Épisodes intimes évoqués avec pudeur et vérité par une femme qui a toujours préféré parler des autres que d'elle-même.
Souvenirs, anecdotes, choses vues abondent dans cette nouvelle chronique où elle dévoile les secrets de la conquête du pouvoir de Jacques Chirac, ses rencontres avec Bernadette et les confidences volontiers acerbes de la première dame. Catherine Nay excelle dans l'art du portrait. Elle décrypte avec une maestria décapante les personnalités complexes d'Alain Juppé et de Philippe Séguin comme celle de Lionel Jospin.
Du séisme de 2002 à la montée en puissance de Nicolas Sarkozy jusqu'à son élection triomphale en 2007 et à son échec cinq ans plus tard, c'est une histoire plus hasardeuse de la Ve République que Catherine Nay décrit avec un mélange d'amusement et de perplexité. Elle montre Nicolas Sarkozy, qu'elle connaît bien, à travers ce qui fait sa force et sa faiblesse, dans sa vie publique ou privée, parfois à son détriment. Et consacre à son successeur François Hollande des pages sans concession.
Ce livre témoigne aussi de la nostalgie de son auteur envers une certaine époque du journalisme, qui a laissé place à une période médiatique elle aussi plus incertaine. Les bonheurs et vertiges du temps qui passe.
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Le matin nous appartient-il encore ? Dans cette variation tout à la fois profonde et divertissante, il apparaît comme un enjeu résolument contemporain.
Le matin est représentatif de notre rapport schizophrène au temps, un temps que beaucoup préfèreraient passer à l'horizontal mais que de présumées bonnes moeurs - la morale, la religion ou la société capitaliste - ont imposé comme vertical ; où l'intimité du quotidien côtoie sans résistance le tumulte du monde.
Un temps également saturé d'images qui ont façonné nos comportements : la publicité, les séries télé, l'art ou la littérature ont construit des représentations d'un matin tantôt homogène, rassurant et familial tantôt solitaire, routinier et banal.
Travaillé ou contraint pour les uns ; amoureux ou créatif pour les autres : nous ne sommes pas tous égaux aux premières heures du jour, et entre " double journée " et walk of shame, les femmes semblent tout particulièrement touchées par les clichés tenaces et les injonctions contemporaines nouvelles.
Autour de la même table du petit-déjeuner, ce livre énergisant, le premier consacré au matin, réunit Georges Perec et les Chocopops, Albert Cohen et Angela Merkel, Marc Aurèle et Jean-Jacques Goldman, avec une ambition : montrer autrement ce que chacun de nous voit tous les jours sans jamais le voir véritablement.
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L'enfant et le génocide ; témoignages sur l'enfance pendant la Shoah
Coquio/Kalisky
- Bouquins
- 8 Novembre 2007
- 9782221099896
Écrits pendant ou après les événements, assemblés ici comme les restes dispersés d'une expérience à peine exprimable, les témoignages rassemblés dans cette anthologie, souvent inédits - traduits de l'allemand, du polonais, du yiddish, du tchèque, de l'hébreu, du grec, de l'italien, de l'espagnol, du romani, du roumain et de l'anglais - se relaient pour dessiner ce que fut, dans les yeux des plus jeunes, la Catastrophe génocidaire, mais aussi pour dire l'incroyable vitalité déployée dans les ghettos, les campagnes et les camps, chacun se sachant en sursis. Les récits individuels de ce drame commun donnent au lecteur une représentation concrète de la tragédie collective et, surtout, lui permettent de comprendre la perception que les enfants en eurent eux-mêmes, de savoir comment ils y réagirent dans ce qui leur restait de vie sociale et intime, de connaître le regard, souvent sans concession, qu'ils portaient sur les adultes, sur leurs parents. Ces témoignages n'ont pas seulement valeur de documents historiques : qu'ils prennent ou non forme littéraire, ils montrent l'importance qu'eut pour leurs auteurs la possibilité de mettre en mots ce que chacun vivait et éprouvait, l'écriture étant pour certains le dernier rempart au désespoir et à la folie.
Les textes présentés ici, émanant de témoins inconnus autant que d'auteurs célèbres (Aharon Appelfeld, Primo Levi, Elie Wiesel.), ont été choisis et édités par Catherine Coquio et Aurélia Kalisky, avec l'aide de plusieurs traducteurs et historiens français et étrangers. Ils forment un livre unique et bouleversant qui propose, pour la première fois à l'échelle de l'Europe entière, les récits de ces enfants qui grandirent dans la certitude quotidienne de leur condamnation, et qui, s'adaptant au monde où il leur fallait vivre, firent de ces récits ceux de la vie même.
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Alma grandit dans une maison hors du temps où règnent les non-dits. De ses parents, taciturnes et effacés, elle ne sait que peu de choses. Sous le vernis d'un foyer bien organisé, Alma ressent des failles. Au rythme des repas dominicaux, en présence d'un grand-père ancien combattant au corps meurtri par les séquelles de la guerre, la petite-fille perçoit autant d'échos d'un conflit qu'elle n'a pas connu et qui fi nit par s'inscrire dans sa propre chair.
Alma devient dessinatrice et rencontre un photographe, Friedrich, marqué lui aussi par une relation difficile avec son histoire familiale. Le couple donne naissance à Emil, un enfant qui souffre d'une maladie génétique rare : il est incapable de ressentir la douleur. Une notion qui lui restera étrangère, lui qui s'identifie aux super-héros, et autres êtres fabuleux de ses jeux d'enfant, habité par un sentiment d'invincibilité. Comme les deux faces inversées d'une même histoire, Emil et son arrière-grand-père, chacun marqué par sa propre infirmité, ont en commun d'être enfermés dans un monde qui les sépare de la vie ordinaire et des autres.
Entre précision incisive et poésie fantastique, Valerie Fritsch éclaire d'une lumière crue cet abîme insondable que l'Histoire peut creuser entre les générations.