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Littérature
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Divisible par lui-même et par un : Divisible by itself and one
Kae Tempest
- L'Arche
- Des Écrits Pour La Parole
- 17 Octobre 2025
- 9782381980928
Le nouveau recueil poétique de Kae Tempest renoue avec les motifs puissants de Étreins-toi et Courir sur les cordes, où quête de soi et identité rencontrent la relation amoureuse. Ici, Kae s'engage dans une poésie plus introspective, explorant les ressorts intimes de la pulsion de vie, qui se cognent aux injonctions sociales. De ces poèmes émane un puissant désir de se relier à la nature dans ses manifestations les plus simples (un bruissement de feuilles, ou un chant d'oiseaux dans la forêt) qui prennent la forme de calligrammes, propres à donner corps à la contemplation.
Au fil de ces fragments de vie, Kae Tempest ne cesse de rappeler la terrible torpeur du quotidien, dépassée par la puissance du lien aux autres et la force de la multitude. Divisible par lui-même et par un est un livre sur l'enveloppe humaine, le corps éprouvé comme frontière et par lequel le monde nous lit. Il ressort de ces vers un profond souhait d'authenticité, et tout l'effort que coûte de s'arracher à soi, aux masques sociaux imposés par une société normative, aux modèles d'épanouissement fixés par le couple ou un travail productif. Cette quête d'intégrité est sans doute le motif qui fait de Kae Tempest une voix si originale de notre époque. -
Courir sur les cordes : Running upon the wires
Kae Tempest
- L'Arche
- Des Écrits Pour La Parole
- 18 Octobre 2024
- 9782381980744
Histoire d'amour racontée à rebours, "Tes doigts sur mes cordes" de Kae Tempest remonte le fil d'une relation amoureuse et ravive
la beauté des sentiments naissants. « Je suis né·e pour e^tre
ton lit / C'est pour cca que je nais encore » réve'le le tout premier poe'me - infinie circularité d'un désir qui meurt pour renai^tre.
E'crit en 2018, peu apre's Qu'on leur donne le chaos, ce recueil est le plus personnel que Kae Tempest ait jamais écrit. Ces poe'mes racontent le souffle coupé de la rupture et le souffle court des premiers baisers, la torpeur des nuits d'ivresse et
la solitude infinie des matins sans l'e^tre aimée. Poésie d'une grande sensualité, épopée intime sobre et désenchantée, "Tes doigts sur mes cordes" est un mémorial amoureux qui ne peut s'arre^ter de vibrer. Kae Tempest nous fait entrer dans l'intimité des sensations les plus crues, les plus désespérées, désabusée des mots qu'il faut pour le dire. -
Satire sur le monde littéraire, la violence de classe et l'amour, "E'de'ne" est la nouvelle création d'Alice Zeniter, qu'elle mettra elle-me^me en sce'ne au cours de la saison 2024-2025. Prolongeant des réflexions menées dans "Je suis une fille sans histoire" (L'Arche) et dans "Toute une moitié du monde" (Flammarion), autour de la littérature comme enjeu de domination culturelle et de validation sociale, Alice Zeniter propose ici une peinture forte et nuancée de mondes sociaux divergents, inspirée par le roman "Martin Eden" de Jack London.
E'de'ne, jeune femme d'un milieu populaire, tombe amoureuse de Rose, issue de la bourgeoisie culturelle. Dans cette satire sociale, qui rappelle les rapports de domination décrits par Bourdieu, se rencontrent « héritie'res » et précariat ouvrier de la blanchisserie d'un abattoir, ou' E'de'ne travaille pour gagner sa vie. La nuit,
elle écrit. Convaincue malgré la fatigue, le mépris des autres et l'absence d'argent, que c'est là sa vocation. Quelle légitimité sociale pourrait alors offrir la littérature ? D'ou' vient cette conviction que l'on peut devenir écrivain?e alors me^me que son milieu social d'origine semble l'interdire ? « La honte sociale est un fouet tre's efficace, me^me si personne ne sait qui le manie. » Devient-on alors transfuge de classe ? -
Les hommes à leurs heures perdues
Anne Carson
- L'Arche
- Des Écrits Pour La Parole
- 23 Mai 2025
- 9782381980867
Catherine Deneuve, Sigmund Freud, Jean-Luc Godard, Socrate ou encore Virginia Woolf sont parmi les nombreuses figures qui se croisent dans ce nouveau livre d'Anne Carson, réflexion sur le temps, la création et la mort, qui mêle et pastiche les genres avec une liberté sans limites.
Entremêlant commentaires de fragments de poèmes de Sapho, de Catulle ou d'Emily Dickinson, visions et épitaphes, des réécritures contemporaines en tout genre, des Confessions de saint Augustin revisitées dans une chambre à Brooklyn, jusqu'à un remake télé fantasmé où Thucydide converse avec Virginia Woolf, ou un script de scénario sur sa vie en tant que Catherine Deneuve, en professeur de poésie antique troublée par une étudiante, qui atteint son climax avec un essai sur l'impureté féminine, la saleté et le désir dans l'Antiquité, suivi d'un appendice final plus intime sur le temps et la mort, Anne Carson déploie une hybridité littéraire maximale, un jeu infini où comme dans une fête foraine la littérature se regarderait dans les miroirs déformant du temps.
Par une pratique systématique presque naturelle de l'anachronisme, Carson fait se télescoper des mondes, opère des rencontres d'artistes d'époques éloignées, éclaire le présent par les vies antiques, maniant avec virtuosité et ironie l'esthétique du fragment. Telle une odyssée qui explorerait plusieurs galaxies littéraires simultanément, Les hommes à leurs heures perdues est une oeuvre éclatée en mille tessons, aux visions qui se superposent et troublent les frontières de genre. -
Il y a dix femmes. Dix corps, dix paroles. Toutes issues du théâtre ou du cinéma : dix contrebandières, toutes habitées par le désir de chercher quelque chose qui n'est pas de ce monde, de combattre la honte, l'asservissement amoureux, les humiliations, la morgue masculine, le silence imposé, les fardeaux de l'héritage ou de l'ambition, pour objecter, exister, vivre, tout changer.
Des femmes du monde du cinéma et du théâtre prennent voix pour réécrire les mythes fondateurs de l'Histoire littéraire dont elles furent les actrices. À des personnages célèbres « réinventés » (Ophélie de Hamlet, Elvire de Dom Juan, Macha de La Mouette, Chimène du Cid), succèdent des figures « historiques » : Thérèse Du Parc, l'une des premières comédiennes de théâtre, de la troupe de Molière avant de rejoindre l'hôtel de Bourgogne, entre grandeur et misères, morte à 35 ans des suites d'un avortement après de multiples maternités, et Margaret Hugues, première actrice professionnelle anglaise, première Desdémone de l'histoire, grande briseuse de conventions sociales. Ou du côté des contemporaines : Peg Entwistle, actrice américaine rongée par le doute qui se suicide en sautant du haut des lettres blanches du panneau Hollywoodland ; Scarlett Johansson qui appelle sa mère en pleine nuit, depuis le tournage de Lost in Translation ; ou encore Charlotte, le personnage interprété par Scarlett Johansson dans ce même film de Sofia Coppola, ultime jeu de miroirs et de questionnement sur l'identité, et de reconquête de son histoire.
Avec ces contrebandières, Fabrice Melquiot déconstruit les héritages culturels de la littérature occidentale, en revisitant les classiques, Shakespeare, Molière, Corneille ou Tchekhov, et ouvrant la voie à des destinées de femmes artistes plus contemporaines. -
Comment dire te communiquer un peu de cet / immortel inconditionnel universel débordant transcendant amour qui me remplit le coeur m' élargit l' âme continue toujours et ne s'arrête jamais que j'ai pour toi.
Puissant quatuor érotique, Manque est une quête poétique où mémoire et oubli se rencontrent pour mettre au monde une sensualité nouvelle. Des cendres d'un monde anéanti par la violence intime, familiale, sociale, collective, quatre voix émergent, et s'efforcent de réinventer un lien, une langue commune, guidées par une soif désespérée d'amour. Quatre lettres ou vies ou tensions vers l'au-delà, qui déploient leurs obsessions entre passions et dépression.
Avec Manque, Sarah Kane opère un virage radical dans son écriture. Elle la porte au point de fusion poétique où les voix et les corps tout à la fois se détruisent, se réinventent et se transcendent, et où la langue même devient le théâtre du désir. -
Le rêve d'un langage commun
Adrienne Rich, Shira Abramovich
- L'Arche
- Des Écrits Pour La Parole
- 15 Janvier 2025
- 9782381980768
Le silence, l'absence, les mots, les non-dits et l'amour sont au coeur de la poésie d'Adrienne Rich. Dans ce recueil publié en 1978, exploration intime de sa vie à 45 ans, Rich décide de ne plus « faire de la douleur une carrière ». Trouvant l'amour avec une femme durant les années 1970, elle souhaite pouvoir enfin vivre cet amour au grand jour - mais le poids de la société étatsunienne pèse lourdement sur le quotidien. Souvenirs amoureux, histoire familiale et figures tutélaires se mêlent dans sa poésie délicate et attentive aux changements de lumière.
Ses poèmes sont un hommage aux femmes puissantes, à la prise de conscience et à la lutte pour l'existence - de l'intime politique. Des poèmes pour Marie Curie et Elena Sheraeva, alpiniste pionnière, ouvrent le recueil, filiation poétique dans la mort ; un autre évoque Paula Modersohn-Becker - constellations de femmes pour nous guider encore aujourd'hui. -
Empreinte de poésie convulsive et de désespoir clinique, 4.48
psychose est une oeuvre de mort annoncée. Une personne sans
identité, déjà morte au monde, internée dans un hôpital où elle
assiste à la destruction progressive de ses facultés, y adresse sa
prière, entre rage et catalepsie. Elle lutte pour dire son aversion
pour ce monde de mensonges, sa déchirure intérieure, sa fêlure
profonde dans un lumineux élan de vie et de vérité.
Le texte est suivi de Skin, un inédit sur le racisme et la violence,
écrit par Sarah Kane et réalisé par Vincent O'Connell en 1995.
Embrassez la beauté des mensonges
la folie chronique de ceux qui ne sont pas fous
Souviens-toi de la lumière et crois en la lumière.
Rien n'est plus important.
Prends garde aux apparences et sois droit dans ton jugement.
Tout va bien. Ça va finir par aller mieux.
la déchirure commence
En 2001, L'Arche publiait 4.48 Psychose, texte posthume de
Sarah Kane. 23 ans plus tard, une nouvelle traduction de cette
pierre angulaire du catalogue semblait nécessaire : Vanasay
Khamphommala signe ici une traduction historique en
totale pertinence avec le texte de Kane qui décloisonne les
imaginaires de genre et les érotismes, en utilisant une police
inclusive : BBB Baskervvol du collectif Bye Bye Binary. -
21 grands noms de la scène poétique francophone se racontent. Ces lettres racontent leur parcours, leur intimité, leur place dans la société des lettres. Dans ces billets, mots d'humeur, mots d'ordre pour un nouvel ordre du monde, elles prennent le contre-pied d'un lyrisme classique. La femme n'est pas (seulement) Muse, mais Poète, Musicienne, Inspiratrice, Agente de son propre désir. Poésie verticale et adressée, ces lettres racontent les combats, les dialogues et les rencontres qui font de l'écriture une matière politique. Une chair à vif, une matière spirituelle inflammable, une sensualité sans contraintes. Dotées d'une virulence poétique radicale et troublante, ces lettres racontent une soif de partage, un désir de transmission, un rêve de l'autre, l'histoire d'une reconquête de soi.s.
Auteurs: Aurélie Olivier, Chloé Delaume, Sonia Chiambretto, Rébecca Chaillon, Adel Tincelin, Rim Battal, Liliane Giraudon, Ryoko Sekiguchi, Nathalie Quintane, Milady Renoir, Sophie G. Lucas, Marina Skalova, Lisette Lombé, Édith Azam, Ouanessa Younsi, Sandra Moussempès, Michèle Métail, RER Q -
Nos territoires
Jessica Biermann Grunstein
- L'Arche
- Des Écrits Pour La Parole
- 14 Mars 2025
- 9782381980829
Duos familiaux de langues et pays multiples, Nos territoires met la parole au coeur de l'écriture. Ces langues plus toujours parlées mais objets de fantasmes, de regrets, d'un sentiment de trahison envers sa culture. L'exil hors de sa langue natale et l'expérience d'une trahison envers une partie de soi-même. Perdre ses mots, bégayer, sentir un espace se fracturer entre soi et ses ancêtres, vaciller de tout son être.
Nos territoires c'est la langue comme transmission et comme enjeu de pouvoir, d'affirmation, de reconnaissance, et d'une possible reconquête de soi.
Nos territoires ce sont les mots perdus, les langues non transmises, qui s'éteignent dans l'indifférence du monde, les héritages avortés et les lignées interrompues, les mémoires familiales trahies mais bien vivaces, les rêves brisés toujours tenaces.
Face au lissage des différences et à l'abolition des mixités souhaitée par certains, Nos territoires brandit la richesse de ces êtres aux langues-mondes, comme autant de territoires où inventer et grandir libre. -
Qu'on leur donne le chaos ; let them eat chaos
Kae Tempest
- L'Arche
- Des Écrits Pour La Parole
- 18 Novembre 2022
- 9782381980447
4 h 18 du mat'.
7 paires d'yeux écarquillées, incapables de dormir.
Jemma. Esther. Alicia. Pete. Bradley. Zoé. Pious 7 âmes vidées, 7 coeurs brisés, sous le ciel grondant de Londres, en plein cauchemar éveillé.
7 îlots de solitude en proie à l'anxiété voient leur vie défiler à un tempo effréné.
Dans ce poème urbain, qui rappelle les rythmes, syncopes et la narration épique des Nouveaux Anciens, Kae Tempest reflète la misère de ses contemporains, engoncés dans leur vie et assoiffés d'étourdissements. Des nouveaux quartiers huppés de la capitale aux rives désenchantées de nos cerveaux aliénés, sous acide et sous pression, elle raconte les injonctions à la consommation effrénée, les atermoiements d'une génération désenchantée qui cherche dans l'épuisement des échappatoires à la vitesse, l'oubli des guerres et des violences, pillages pour assouvir nos désirs de possession et de puissance. -
Au début des années 1970, une mère et sa fille de 56 ans vivent dans un immense manoir à East Hampton, station balnéaire de la bourgeoisie new-yorkaise. Mais depuis plusieurs années, le manoir se dégrade : Big Eddie et Small Eddie ne vivent plus que dans une seule pièce, avec des dizaines de chats et quelques ratons laveurs. Dans cette chambre, encombrée du sol au plafond, elles mangent, lisent les journaux, évoquent des souvenirs, font rarement le ménage, et se demandent comment elles font pour se supporter.
Edith Ewing Bouvier Beale et Edith Bouvier Beale sont deux icônes camp du XXe siècle, rendues célèbres par le documentaire Grey Gardens de 1975 sur leur vie dans leur manoir délabré. L'Art de la chute de Sara Stridsberg s'empare de ces femmes qui ont marqué l'imaginaire états-unien, aristocrates déchues, tante et cousine de Jackie Kennedy vivant dans un monde rêvé. Images de l'isolement et de la démesure, Big Eddie et Small Eddie, quelques années avant le tournage du film, nous parlent des relations dysfonctionnelles qui peuvent exister entre mère et fille, de l'abandon et de l'amour malgré tout. -
Le recueil Black Unicorn, écrit en 1978, occupe au sein de ses écrits poétiques une place particulière. La poète apparaît sous toutes les facettes de sa féminité, comme fille, mère, amante, poète, militante.
Ces poèmes d'amour évoquent l'apogée d'un désir, empreint de rage et d'une sensualité que la prise de conscience aigüe des discriminations subies ne parviendra pas à brider. À la fois charnels et érotiques, ces poèmes renouent avec une spiritualité ancestrale.
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Et vos corps seront caillasses
Joëlle Sambi
- L'Arche
- Des Écrits Pour La Parole
- 16 Février 2024
- 9782381980652
« Je ne peux concevoir l'art en dehors d'un ancrage politique, je le pratique et l'accompagne donc toujours d'une réflexion qui m'amène à douter de tout, à déconstruire constamment, à creuser de nouveaux idéaux et à chercher le lieu de l'apaisement. La paix est un luxe, il n'y a pas d'accalmie. » dit Joëlle Sambi à l'endroit de sa pratique artistique, au croisement des formes et des luttes.
Quand le slam ou poésie « faite pour être dite à haute voix » s'écrit sur le papier, se compose de manière évidente et quasi organique un écrit pour la parole. La poésie de Joëlle Sambi est un flow rugueux, né à Kinshasa, qui érode la rime traditionnelle et râpe les conventions sociales, dérape et décape. Déconstruit les héritages dominants et asphyxie les violences, raciales, sexistes et homophobes. Scalpant la métrique classique pour un mètre libre et nourri d'autres héritages culturels et musicaux, sa poésie est une parole performée, à dire, toujours vivante, en métamorphose.
« Nous ne sommes pas vos copines noires et brunes et pas assez blanches / Nous ne sommes pas celles qui peuplent vos solitudes / Pas celles qui fortifient vos châteaux / Nous ne sommes pas celles que vous violez, exotisez, insultez, désirez, haïssez, frappez, rejetez / Poétesses / Nous ne sommes rien / Nous ne sommes rien / Et ce rien peuplera vos rêves hantés » -
Pour le 20e titre de la collection « Des écrits pour la parole », L'Arche réédite le texte fondateur : celui qui a donné son nom à la collection, avec une préface inédite de Léonora Miano qui rappelle pourquoi « il a bien fallu écrire ces paroles ». Composé de deux parties, « In-tranquilles » et « Femme in a city », ce volume vibrant d'oralités et de récits intimes est un pamphlet poétique d'une force politique inouïe. Écrits pour la parole est une constellation de récits de femmes noires françaises, des récits intimes & politiques. Des récits libérateurs face à la violence systémique, instituée, reçue en plein corps, objet de représentations et de fantasmes dès l'enfance. Face aux mécanismes de domination à l'oeuvre dans la vie quotidienne, la sphère professionnelle, ou dans la rue. Face à l'invisibilisation dans les récits nationaux et les pages blanches de l'Histoire. Des voix pour apprendre à se connaître, accéder à une conscience de soi et reprendre en charge ses récits.
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Dans ce recueil, Kae Tempest déploie une nouvelle traversée poétique de l'être humain, suivant le mythe de Tiresias, le prophète aveugle transformé par Héra. Un jeune garçon, baskets aux pieds et écouteurs sur les oreilles, se promène en forêt un matin et délace d'un coup de bâton l'union d'un couple de serpents. Pour le punir de son acte, Héra le transforme en femme. C'est ainsi que débute son errance sublime d'être en être, se délestant de sa peau pour une renaissance à soi. Ce conte contemporain, sensuel et hypnotique, emprunte les sentiers des forêts antiques où se rencontrent des êtres non binaires, riches d'une sensualité non normée. Un hymne à l'Amour.
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Boudin biguine best of banane
Rébecca Chaillon
- L'Arche
- Des Écrits Pour La Parole
- 21 Avril 2023
- 9782381980539
Il y a des choses à dire, quand on parle de son corps. C'est-à-dire, à partir de son corps : quand l'écriture est dans la peau, quand écrire, c'est s'arracher les mots à soi-même. Ce livre part de l'urgence de dire ce qui gratte, ce qui dérange, ce qui ronge. Rébecca Chaillon écrit son retour à la Martinique, ses interrogations intimes, amoureuses, militantes et alimentaires, la destruction et la reconstruction successives des imaginaires. Passant par une langue poétique et politique, elle décrit les effets de la colonisation sur les afrodescendants - en mettant en lumière les espaces occupées par chacun et chacune autour d'un même sujet.
Comment se construisent nos désirs sous les injonctions ? Comment se réapproprier nos corps, nos identités dédoubleés, nos héritages détruits ? Avec ce texte riche ou la poésie rencontre l'insomnie, Rébecca Chaillon prend son corps comme matrice nourricière pour faire advenir un sujet libre des normes. Les impensés coloniaux sont mis au jour - ou plutôt, le refoulé raciste et capitaliste français est donné à voirdans son omniprésence mortifère. -
Fille d'amanitore ; que mon règne arrive
Léonora Miano
- L'Arche
- Scène Ouverte
- 20 Janvier 2023
- 9782381980508
Ample fresque historique embrassant mythologie et monde contemporain, Fille d'Amanitore dépeint l'articulation de la beauté et la brutalité propre au monde des humains, au travers de récits de vie de femmes d'aujourd'hui, filles et mères, en des mondes où se mêlent demeure ancestrale des divinités, terre des humains et le no man's land d'Amanitore, la candace à la mémoire oubliée. Léonora Miano invite à repenser le fondement divin du désir, réinterroge la puissance de la filiation féminine, et le poids des non-dits dans la transmission mère-fille. Et que mon règne arrive est une exhortation à la reconquête de leurs mémoires et leur par des femmes subsahariennes, pour les affranchir du discours bien-pensant de la « sororité planétaire », autre leurre du féminisme européocentré. Dans cette proposition pour affranchir la femme subsaharienne de toute forme de domination, coloniale et masculine, Léonora Miano l'inviter à habiter ses spiritualités, et orchestre le règne du féminin dans le monde par la voie africaine.
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Léonora Miano propose dans ce recueil des écrits d'une grande musicalité à la composition graphique libre, parfois proche du calligramme. Il comprend : « La question blanche », « Le fond des choses » et « La fin des fins ».
Rythmée de beats musicaux, sa langue fait s'élever une injonction vibrante à la paix. Elle aborde les questions d'assignation sociale et raciale, la façon dont la couleur de peau constitue un problème dans le regard de celui qui dit l'autre noir, de même que l'immigration, autrefois économique sur le sol français, est aujourd'hui perçue comme une menace et alimente les discours identitaires et fascistes.
Ces trois textes sont à lire comme les partitions
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Autobiographie du rouge
Anne Carson
- L'Arche
- Des Écrits Pour La Parole
- 18 Septembre 2020
- 9782851819932
L'Autobiographie du rouge est un « roman en vers » d'Anne Carson, inspiré de la figure mythologique de Géryon, présente dans les fragments lyriques du poète grec Stésichore. Traversé par un profond souffle épique, ce « roman en vers » est tout à la fois matière épique, rhapsodie, roman initiatique, journal intime, épopée lyrique et carnet de voyage amoureux.
Géryon, jeune garçon et monstre rouge ailé, livre les tourments de son âme dans ce récit autobiographique, qu'il commence à l'âge de cinq ans.
Autobiographie d'un être hors norme, à l'apparence monstrueuse et aux fêlures si profondément humaines. En grandissant, Géryon échappe à l'emprise d'un frère abusif, et trouve du réconfort derrière l'objectif de son appareil photo et dans les bras d'un jeune homme nommé Héraclès, un cavalier vagabond, qui embrase son coeur et l'abandonne à son désespoir. Lorsqu'Héraclès resurgit dans sa vie des années plus tard, Géryon s'embarque dans un voyage en Amérique du Sud à ses côtés. Tout à la fois érudite et d'une accessibilité immédiate, l'Autobiographie du rouge est un livre dont Alice Munro a dit :
« Je n'ai pas découvert d'écriture depuis des années si merveilleusement troublante. »
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L'Amour de Phèdre semble occuper une position singulière parmi les pièces de Sarah Kane et il est de fait très rare qu'un auteur anglais adapte une pièce classique. Indépendamment du fait que l'impulsion pour le projet venait du Gate Theatre - Sarah Kane avait d'abord pensé à Woyzeck et Baal, deux idées auxquelles elle n'a pas donné suite pour des raisons pratiques -, elle s'est finalement décidée à reprendre Phèdre de Sénèque, l'histoire d'une reine qui tombe désespérément amoureuse de son beau-fils. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, l'adaptation s'intègre parfaitement dans l'univers de l'auteur : réapparaissent notamment la dissection d'une émotivité masculine malsaine et nihiliste, tout comme la question de Dieu et les conséquences de la violence.
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En 1995, Sarah Kane écrit Anéantis (Blasted) qui est aussitôt créé au Royal Court Theatre de Londres. Presque trente ans après Sauvés d'Edward Bond, créé dans le même théâtre, la presse britannique se déchaîne : sale, alarmant, dangereux. Mais l'auteur et sa pièce accèdent immédiatement à la célébrité.
L'histoire de Ian et Cate dans un hôtel de luxe à Leeds est l'histoire d'un amour impossible. C'est aussi l'histoire d'une aliénation profonde entre les légionnaires de la guerre civile et la population qu'ils sont susceptibles de conquérir.
Ce qui fait la gloire des dramaturges, c'est la forme qu'ils savent donner à leurs sujets. Et l'écriture de Sarah Kane est scénique, c'est-à-dire à trois dimensions. Dialogue et action s'enchevêtrent, se complètent et s'enrichissent mutuellement pour donner à l'ensemble une nouvelle profondeur de champ.
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Ravissement de Lucy Kirkwood interroge les faits et les conspirations à l'heure des réseaux sociaux, des fake news et de l'éco-anxiété.
Celeste et Noah, deux jeunes Britanniques, se rencontrent lors d'un rendez-vous arrangé et tombent amoureux. Très vite, ils se rendent compte qu'ils sont sous surveillance. Alors qu'ils se filment et diffusent sur YouTube des vidéos politiques pour révéler les mensonges du gouvernement, la paranoïa et l'angoisse s'invitent dans leur quotidien et gangrènent peu à peu leur vie. N'arrivant plus à faire confiance à personne, ils s'isolent, jusqu'à une fin tragique.
La pièce se présente sous la forme d'une reconstruction postmortem, l'autrice Lucy Kirkwood (ou plutôt, un personnage nommé Lucy Kirkwood) étant présente sur scène pour montrer au public des vidéos diffusées sur internet après leur mort, prouvant qu'ils étaient filmés depuis le début de leur relation - et que la paranoïa est parfois justifiée.
Questionnant la vérité, la manipulation et la peur, Ravissement s'écrit sous le signe du doute et de la remise en cause. Comme le dit Céleste : « Ce n'est pas réel, mais c'est vrai. » Selon les voeux de l'autrice, la pièce doit être annoncée sous un faux titre et un faux nom pour toute production sur scène (au Royal Court :
That is not who I am de Dave Davidson). D'emblée, la dissimulation et le mensonge sont donc au coeur du projet. Pour la production de Chloé Dabert, la pièce sera annoncée sous le titre Rapt par Lucie Boisdamour. -
Anti gone est la tragédie anti que et moderne par excellence. Celle de la révolte et du refus de l'autorité aveugle. Anti gone brave l'interdit de Créon, qui incarne la machine broyeuse de l'État. Elle exige pour son frère Polynice une digne sépulture et se réfère aux dieux, à d'autres lois, bien plus puissantes et plus anciennes que l'arbitraire des hommes.
Carson raccourcit la fable et la radicalise. Son adaptati on s'illustre par son humour et l'audace des commentaires qu'elle insère. Son propos se resserre autour du deuil et de la questi on de la responsabilité morale à honorer la mémoire du frère défunt.
Créon, homme de l'acti on, du verbe, est dépeint en tyran brutal et sanguinaire, jusqu'au revirement fi nal.
Après avoir décimé sa propre famille, ce chantre de l'autorité déclare : « J'exige la mort de Créon ». Une autre liberté prise sur le mythe est l'appariti on du personnage de Nick, que l'on retrouve dans le ti tre. Présence silencieuse, il mesure les choses sans jamais quitt er la scène. Il signifi e le moment propice mais aussi l'entaille, la blessure. Comme le disait Char : « La lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil. » Une oeuvre millénaire qui gagne en radicalité politi que et en modernité sous la plume de Carson.