« Il faut regarder pour garder, regarder plus fortement qu'on ne le fait d'habitude, au point de sortir de sa propre vie pour saisir le monde qui s'enfuit. Une infime modification dans la teinte et la consistance des choses et des événements alors se produit, que rien n'avait laissé prévoir, on commence à s'enfoncer dans l'eau rafraîchissante d'une rêverie infinie, une partie de nous-mêmes s'écoule modifiant la teinte et la consistance des choses, nous les serrons avec nos mots, leurs impressions flottent un moment, indécises, puis un éclairement très vif fixe leurs contours et leurs couleurs pour toujours. » M.R.
« Que seraient devenus Mahler, Fellini, Hitchcock, Nabokov, Picasso, Dali, Fitzgerald, Bonnard, Cézanne et bien d'autres, sans Alma, Giulietta, Gala, Vera, Olga, Dora, Zelda, Marthe, Hortense ? Inspiratrices, muses ou modèles, collaboratrices, gouvernantes, conseillères, garde du corps, créatrices se sacrifiant pour le grand homme, ou rebelles intransigeantes ne lui cédant rien, préférant la provocation stimulante. D'une manière générale, elles furent toutes de formidables complices de créateurs, formant avec eux des couples mythiques tels Jean Tinguely et Niki de Saint Phalle, Frida Khalo et Diego Rivera, Dora et Picasso, Signoret et Montand, ou des duos moins connus tels Bonnard et Marthe, Cézanne et Hortense, Pollock et Lee Krachner, Nabokov et Vera qui sauva Lolita des flammes.
Femmes d'artistes et femmes artistes. Avant de nous quitter brutalement, Antoinette Fouque m'avait suggéré ce thème en me demandant cependant de bien réfléchir avant de me « jeter à l'eau », comme si j'allais m'embarquer dans une aventure périlleuse. Mais c'est exactement ce qu'il fallait me dire. Depuis mon petit rocher des certitudes, je me suis donc « jetée à l'eau » en pensant qu'elle se trouvait là à quelques mètres. Illusion. J'étais devenue Alice tombant dans un trou sans fond, plongeant dans une histoire sans fin, sautant des années 30 aux années psychédéliques, du Versailles de Vigée le Brun au Mexique de Frida, du Cinecitta de Masina à Hollywood en compagnie de Scott Fitzgerald. Je m'endormais l'hiver à New York chez Gena Rowlands, me réveillais à Meudon devant Camille Claudel, dînais à Montparnasse face à Giacometti ou Aragon je ne sais plus. Tout se mélangeait. Coupez !
Antoinette Fouque avait raison, l'affaire n'était pas un baiser d'amourette. Mais de ce voyage infernal dans le temps et dans l'espace au travers d'univers puissants de créateurs géniaux et libres, je suis revenue riche d'impressions et d'images. Je les ai ensuite répertoriées, triées, revues, piratées, remises en scène, parfois cruellement, parfois avec humour, avec pour unique volonté de mettre en lumière le rôle de ces femmes d'exception. » C.L.C.
L'auteure a finalement retenu pour ce beau livre une quarantaine de portraits « signifiants », accompagnés d'un court texte de présentation.
Autobiographie illustrée.
Gisèle Freund (1908-2000) est universellement connue pour ses reportages et ses portraits de James Joyce, Adrienne Monnier, Colette, André Malraux, André Gide, Jean Cocteau, Virginia Woolf... Dans cet ouvrage, elle livre pour la première fois à Rauda Jamis son étonnant parcours dans ce siècle à travers le monde.
« Un visage explique un être humain. Or, en se regardant soi-même, on ne se voit pas tel qu'on est. D'abord parce que dans un miroir, on se voit à l'envers, et puis parce qu'on est fondamentalement gentil avec soi-même. À la réflexion, on se trouve plutôt bon, et pas si mal que ça, et on s'accroche à l'illusion que son visage reflète ces espoirs... Je n'ai jamais cessé de vouloir comprendre ce qui se trouvait derrière un visage. » G.F.
Textes et dessins à l'encre de Chine.
Les quarante dessins à la plume et les textes qui les accompagnent retracent une aventure spirituelle d'une grande pureté. Pris dans un réseau de villes, d'animaux, de visages, d'étoffes, de végétations, de paysages mythiques, l'oeil écoute le long monologue qui jaillit à chaque page comme une flamme ardente et dit l'amour, les peurs, les joies, les hantises, l'aventure de l'espace ciel et de l'espace terre et les gestes de la création dans toute leur plénitude.
« Ce ne sont que des signes dispersés sur des sphères célestes... dans le gris métallisé et rebelle du texte. » A. C.
Diana MacKown, amie et photographe personnelle de Louise Nevelson qui a vécu et travaillé avec elle pendant de nombreuses années, a su recueillir et reconstruire, au fil de leurs conversations, ce qu'elle nous présente comme le texte de Louise Nevelson, dans son mouvement même de formulation et de don, avec son propre rythme d'avancées, de retours en arrière, d'approches renouvelées et toujours transformées : des collages, en quelque sorte, de souvenirs, d'expériences, de réflexions, de questions, d'explosions de vie.
Scénario « J'ai écrit ce film à un moment où j'avais envie de faire un enfant. Je voulais montrer à ma petite fille ce que c'est être la fille d'une mère, et la mère d'une fille. Tandis que j'en étais à mes commencements, le peuple allemand souffrait des idées épouvantables du monde masculin, de la mort, de la terreur des crimes fascistes. C'est aussi le pays de ma mère, de mon enfance, où mes parents se sont rencontrés, aimés. Cette histoire est celle d'un conflit : entre ma mère Allemagne - qui sème la guerre et une femme que j'aime, ma mère, Lena, qui a traversé cette époque avec un courage extraordinaire. J'ai voulu montrer la force antifasciste la plus grande qui soit : la force d'aimer. » H.S.-B.
L'autre moitié de l'avant-garde, 1910-1940 est une importante exposition qui s'est tenue à Milan au printemps 1980, puis à Rome, Venise, Amsterdam, Stockholm. D'une rare qualité, elle a remis à jour les démarches et recherches qui, dans la période féconde des années 1930, ont été fondamentales pour l'élaboration d'un langage contemporain.
« Préparer ce travail a été, pour moi, une découverte continue : quinze mois passés à chercher dans les caves des musées, à faire ouvrir aux artistes leurs tiroirs. Rares sont les oeuvres que j'ai trouvées accrochées à un mur ! [...] L'exposition évoque les années du Blaue Reiter, du cubisme, du futurisme, du dadaïsme, du Bauhaus. Je voulais voir si les femmes avaient eu ou non, dans ces groupes, la possibilité d'être des forces motrices. Et j'ai découvert, par exemple, que dans l'avant-garde russe, les femmes ont eu un rôle tout à fait décisif...» L.V.
Le catalogue rassemble ces monographies, largement illustrées des productions des femmes peintres et sculptrices, et retrace ces mouvements novateurs.
Catalogue d'exposition.
Il s'agit de la première exposition rassemblant les oeuvres de femmes peintres, organisée au Los Angeles Country Museum of Art par Ann Sutherland Harris, conservateur au Metropolitan Museum of Art de New York et Linda Nochlin, enseignante en histoire de l'art à l'université de Vassar. Ces oeuvres jusque-là dispersées dans divers musées et collections privées, et rassemblées dans cette exposition et ce catalogue devenu un ouvrage de référence, font apparaître la place des femmes et leur influence parfois marquante dans l'histoire de l'art occidental. D'Italie en Flandres, en France, en Allemagne, en URSS, aux États-Unis, la vie et l'oeuvre de : Catherina Van Hemessen, Sofonisba Anguissola, Fede Galizia, Judith Leyster, Clara Peeters, Élisabeth Vigée Le Brun, Rosa Bonheur, Sonia Delaunay... Et bien d'autres.
« J'ai préféré partir de la fin : m'asseoir à ma table, et repenser le film, scène après scène. Il en est sorti un texte étrange qui est un peu mon interprétation personnelle de l'histoire... Ce n'est plus un canevas, pas non plus un récit. Il est très fidèle au film : il rend très précisément compte des cadrages, des mouvements de caméra, des dialogues, de la musique, des bruitages, etc. [...] Dans le film, il est question d'un rapport entre deux femmes (mère-fille) dont le combat métaphorique est presque mortel... Je commence à comprendre maintenant, le film terminé, que cette ambivalence maternelle... au fond, ce pourrait être ma mauvaise foi inconsciente... [...] J'ai voulu faire un film sur la subjectivité maternelle, et, ce qui est apparu, c'est une mère, vue à travers les yeux d'une fille. [...] Carla Gravina a interprété le rôle féminin de la mère... Nous avons fait ensemble un travail « sur le féminin », et elle est l'auteure de cette mère souterraine autant que moi. » G.G.
Cinéastes, actrices, théoriciennes, script-girls, monteuses ont joint leurs regards et réflexions pour ce recueil initié par les femmes de Musidora, à l'origine du premier festival de films de femmes.
« Musidora est sortie de son fichier de films pour rassembler ces textes qui arrivaient, circulaient entre nous, débuts, amorces d'une réflexion sur des images vues ou qui n'existent pas encore - que nous voulons voir, que nous rêvons.
Un langage commun ? Une tonalité sans doute. Une respiration. Un livre. [...] Saisir la caméra comme d'autres femmes s'emparent du stylo, c'est aller au dehors, marquer de nouveaux territoires, quitter « la chambre à soi » (que Virginia Woolf avait toute raison de revendiquer [...]), c'est franchir des pas dans l'univers du fictif, briser le miroir.
Des approches plutôt que des analyses, des questions plutôt que des réponses : une exaspération certaine devant La Femme mise en images comme en morceaux choisis : une certitude, tout cela doit changer. »