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Marie Nimier
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Le côté obscur de la Reine
Marie Nimier
- Mercure de France
- Traits Et Portraits
- 2 Janvier 2025
- 9782715265103
«Comme je l'aimais, comme nous nous aimions. Cela va sans dire, et l'écrire me serre le coeur. Ma mère, ma maman, il n'y a qu'une femme au monde que je peux appeler ainsi. Quel dommage. Quel gâchis. Je ne lui en veux pas, non, lui en vouloir, ce serait encore la vouloir. Encore rester accrochée. Les gestes d'apaisement dictés par la raison me coûtent mes nuits. On me conseille de me blinder, mais me blinder ne sert à rien, ou alors je ne me blinde pas où il faut, comme il faut. Ma mère m'occupe, ses lamentations me submergent, sa mauvaise foi, ses chantages, son agressivité déguisée en tendresse. Je sors de mes visites lessivée. Tu prends les choses trop au sérieux, m'écrit ma tante. Il faut que tu fasses un stage de je-m'en-foutisme ! Je dois le reconnaître, j'ai d'énormes lacunes en je-m'en-foutisme.» M.N.
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«Quand je partais dans les nuages, Mika me secouait gentiment. T'es où, petite soeur ? En Argentine ? En Équateur ? J'adorais la façon dont il prononçait ces mots. T'es où, petite soeur ? J'aimerais écrire une chanson avec ça, un refrain que chacun aurait sur les lèvres, voilà ce que je me dis en arrivant quai Malo. Un arbre lance ses branches vers le fleuve, des branches nues, tortueuses. L'escalier B est indiqué par une flèche en angle. Ça sent l'immeuble bien tenu, habité par des gens qui payent régulièrement leurs charges. Je pense en montant les étages : neuf semaines, je vais habiter chez Gabriel Tournon pendant neuf semaines, le temps de voir l'arbre se couvrir de feuilles. Ici, personne ne sait ce qui m'est arrivé.» Alice, la trentaine, s'installe dans une ville inconnue pour consigner les souvenirs liés à son frère Mika, récemment disparu. Ensemble, ils ont grandi dans une famille de comédiens, et fait les quatre cents coups. Pourquoi n'a-t-elle pas revu depuis sept ans ce garçon auquel elle était si attachée ? Insolite et bouleversant, ce roman explore l'ambiguïté des relations fraternelles et le pouvoir des mots.
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«Certains secrets sont plus utiles enfouis que livrés en pâture. Ils ne sont pas faits pour être dévoilés. Aujourd'hui, il faudrait tout dire et marcher dans la rue comme des écorchés ; moi je préfère la peau. Les tissus qui la recouvrent. Le ciel chargé de pluie, les rideaux de peupliers, les creux du paysage, ses drapés.» En général, on arrache les orties. Eux les cultivent. Eux ? Simon, Nora et leurs deux enfants adolescents. C'est la débrouille, et c'est plutôt gai. Mais l'arrivée d'une inconnue, Frederica, vient troubler les habitudes. Fred fait du woofing : contre le gîte et le couvert, elle offre ses bras. Tous les habitants de la ferme, chien et chat compris, tombent sous son charme. Même Nora se montre décontenancée par l'irruption de cette jeune femme solaire... Le Palais des Orties est un roman d'amour et de métamorphoses.
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«Mon père a trouvé la mort un vendredi soir. Son Aston Martin s'est écrasée contre le parapet d'un pont. Je n'étais pas dans la voiture. J'avais 5 ans.De lui, il me reste peu de souvenirs, et quelques trésors:une montre qui sonne les heures, un stylo dont la plume penche à droite et cette carte postale, où il me demandait en lettres capitales:QUE DIT LA REINE DU SILENCE?Cette phrase posait une énigme impossible à résoudre pour la petite fille que j'étais, énigme cruelle et envoûtante qui résume toute la difficulté du métier d'enfant. Énigme qui, à l'époque, se formulait ainsi:Que pourrait bien dire la Reine du silence sans y perdre son titre, et l'affection de son papa?Ou encore:comment, à la fois, parler, et ne pas parler?J'étais coincée. Prise au piège de l'intelligence paternelle.»Marie Nimier ose avec ce nouveau livre s'attacher à la figure de son père, Roger Nimier. Elle explore l'amas de tôles froissées, interrogeant avec gravité le destin de cet écrivain que ses amis décrivent tour à tour, et parfois simultanément, comme un être désinvolte, sérieux, menteur, loyal, tendre, indifférent et malhabile de ses sentiments comme on est maladroit de ses mains.
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«Ici il y a beaucoup à cacher. Et qui dit beaucoup à cacher dit beaucoup à raconter à quelqu'un qu'on ne reverra jamais.» En Tunisie, Marie Nimier a recueilli les confidences d'inconnus. Un ancien prisonnier, un bisexuel contraint de déguiser ses sentiments, une «dépanneuse» proposant aux futures mariées une technique bon marché pour restaurer leur virginité, une femme dont la vie a été bouleversée par ses lectures, ceux qui veulent partir et ne peuvent pas partir, ceux qui sont partis puis rentrés, ceux qui font la prière à leur façon, mais aussi un apiculteur qui vend du miel de contrebande, et un séducteur à la chaîne... Voilà quelques-uns des personnages qui se sont confiés à l'autrice, pour lui révéler leurs secrets les mieux gardés. Tour à tour drôles et poignants, ces récits pleins d'humanité sont une source infinie de rêverie et de réflexion, et une invitation au partage.
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«J'aimais la voix traînante de Léa, ses cheveux roux, son incroyable vitalité. Nous nous comblions, est-ce qu'on peut dire celaoe Se combler, comme deux pièces de puzzle qui s'ajusteraient parfaitement, mais ne viendraient pas de la même boîte. Que nous est-il arrivéoe Où sont passées les deux amies perchées sur le tabouret du photomaton, les petites filles amoureuses, les adolescentes en colèreoe Il faudrait retrourner dans la cabine, glisser une pièce dans la fente pour obtenir l'image vivante, la preuve tangible de cette force qui nous habitait. Au lieu de ça, un rideau se lève, et c'est Léa qui apparaît. Léa et son nouveau métier, rue Saint-Denis. Léa et ses bras troués. Il n'est pas besoin d'aller très loin, parfois, pour être dans un autre monde.»
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«- Nous allons initier un courant original, Marie, quelque chose qui sera à la pornographie ce que la nouvelle cuisine est à l'ancienne. Moins chargée, moins sauçue, plus inventive...L'éditeur riait en se frottant les mains, il était emballé, conquis par son propre titre. Il déchira une page de son carnet et me la tendit.- Vous imaginez la couverture, un aplat de couleur mate, du rose peut-être, un rose chair, et l'impact de ces mots ?L'éditeur avait écrit : LA NOUVELLE PORNOGRAPHIE.La couverture, je la voyais, mais ce que j'avais du mal à imaginer, c'était mon nom de famille, et mon prénom, accolés à ces vingt-deux lettres.Et la tête de ma mère.»
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«Je n'ai aimé qu'un seul être au monde, et je l'ai tué. Elle s'appelait Hedwige. Son squelette est exposé au Muséum d'histoire naturelle. Des milliers d'enfants passent devant lui chaque année. J'ignore tout de l'enquête qui suivit sa mort. Il me semble que personne ne se douta de rien. L'analyse des viscères ne révéla aucune trace suspecte, peut-être n'y eut-il simplement pas d'enquête. Trop heureuse de trouver un sujet en parfaite condition physique, la science aura récupéré le corps et étouffé l'affaire...»Ainsi commence le plus insolite des romans d'amour. Mais qui est Hedwige ?
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«Je suis un chien.Mon corps n'est pas bien grand, environ trois poulets compressés, inscrits dans un cube. Malgré ma petite taille, rien ne m'échappe : ni les pastis que mon maître se verse en douce ni cette odeur étrange qui imprègne les vêtements de ma maîtresse.Je vois tout, d'en bas, par fragments, ensuite je recompose. J'observe avec mon nez, mes oreilles, ma mémoire et surtout mon imagination. J'aimerais penser, raisonner comme le font les hommes les plus bêtes, mais souvent je m'enlise, je me trompe dans les temps. Heureusement il y a Sonia qui m'aide et me protège, Sonia Potemkine.Elle dit : le chien est une fenêtre qui ouvre sur l'autre monde.Elle dit : le chien est un signe de ponctuation entre les êtres, un trait d'union.J'aime l'écouter parler. Je m'allonge à ses pieds. Une douce chaleur m'envahit. Je suis un lien, un prétexte tendre. Un souffle apaisé par la caresse des mots.»Marie Nimier.
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Quatre vieux orphelins écrivains s'affrontent afin d'être adoptés. Ils rejouent de cruelles scènes de vie familiale qui interrogent la légitimité des parents, la solitude, le besoin de reconnaissance, la vieillesse et la mort.
Par l'intermédiaire d'une agence, quatre écrivains orphelins "d'un certain âge" sont candidats à l'adoption. A l'issue de la représentation, un seul sera choisi. Ils ont été sélectionnés par l'invisible Rebecca aux jambes interminables. Ils sont jugés par leurs futurs parents, assis parmi les spectateurs, qui les soumettent à une succession d'épreuves et de questions défilant sur une bande passante. Dans ce huis clos aux airs de reality-show, tour à tour en compétition ou complices, ils revêtent tous les rôles de la structure familiale, le temps d'un jeu cruel exorcisant fantasmes et obsessions. Ils questionnent alors la légitimité de ces parents qui les observent. Que perd-on en gagnant ? Lars, le vainqueur, préfère rester seul - et libre. Orson, qui a toujours dit qu'il serait choisi, devient un fils, l'enfant que tout homme est, à l'approche de la mort, allégorie de la dépendance de l'écrivain face à son public.
"Chaque spectateur, quel que soit son âge, est un parent en puissance. Chaque spectateur doit se demander, à un moment ou à un autre de la pièce : lequel prendrais-je, moi, si j'étais dans cette situation, lequel aimerais-je avoir à la maison ?
Si le sujet de ce texte est l'adoption (et son revers, l'abandon - ou le contraire), sa figure centrale est celle du renversement. Renversement, comme on renverse un pouvoir établi, des règles, une situation." Marie Nimier PERSONNAGES : 4 hommes, 1 voix de femme.
DURÉE : 1h30.