Les technologies ne nous font plus rêver. Pan par pan, la mythologie du progrès s'effondre sous nos yeux. Le monde numérique se révèle chaque jour plus matériel, injuste et polluant. Internet lui-même ressemble à une vaste benne où nous venons déposer nos espoirs déçus. Les injonctions à reprendre le pouvoir tombent à l'eau : c'est que nous avons perdu la main. Et si les politiques des technologies n'avaient pas pour but de nous émanciper, mais au contraire de nous empêcher d'exercer notre pouvoir d'agir ? Et si les libertés dont elles font mine de nous gratifier n'étaient qu'un trompe-l'oeil pour mieux nier ce qui fait de nous des animaux politiques, nier notre capacité à critiquer, à contester, à nous rebeller ?
Diana Filippova propose de déplacer notre regard et d'aborder les techniques comme un vivier de technologies de pouvoir - le technopouvoir. Son mobile : gouverner des êtres qui placent les droits et libertés individuels au-dessus de tout. Sa visée : servir les intérêts de certains aux dépens de nous tous. C'est ainsi qu'une nouvelle frontière électronique nous sépare les uns des autres, nous poussant à devenir des sujets parfaitement prévisibles, flexibles et gouvernables. C'est ainsi que le pouvoir échappe chaque jour davantage au royaume du politique.
Ce livre est d'utilité publique : en disséquant la genèse et les stratégies du technopouvoir, il entreprend d'ouvrir des boîtes noires - par effraction, s'il le faut. Alors, face à un art de la guerre en temps de paix, nous pourrons regagner une prise sur la marche de nos sociétés. Alors, nous pourrons retrouver l'essence de nos démocraties, et peut-être réapprendre à faire de la politique.
Valentin vit avec sa mère dans une chambre de bonne.
La vue sur la Cité est à couper le souffle. La vue, c'est tout ce qu'a le jeune garçon : pendant que sa mère, répétitrice auprès des familles illustres de la Cité, disparaît le jour et parfois la nuit, il reste enfermé là.
Né de l'autre côté du mur, dans les confins, déchiré entre le rêve de se fondre parmi les hauts milieux et la conscience aiguë d'une société au bord de l'implosion, il bâtit son avenir en se débattant avec le passé et la mémoire - les siens et ceux des autres.
Valentin a vingt ans quand il tombe sur Arsène.
Protections et garde-fous se tordent sous l'effet de la révolte et du désir. Quand tout déraille, Valentin plane, s'effondre, remonte, prend des coups, les rend.
Il chasse la vérité comme il course l'amour.
Mais cette société si paisible qu'elle est en violente, si ouverte qu'elle en est brutale, si ordonnée qu'elle est écrasée par la soif du pouvoir, va-t-elle le laisser faire ?
En déplaçant le curseur de ce qui est réel et ce qui ne l'est pas, empruntant les voies du roman social, de la dystopie et du récit d'apprentissage, Diana Filippova tend un miroir à une société d'une monstrueuse bienveillance.