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Annie Le Brun
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Les mots font l'amour : 465 citations surréalistes
Annie Le Brun
- Editions Du Sandre
- 30 Août 2024
- 9782358211567
Ce recueil de 465 citations surréalistes est celui de 465 preuves de la vérité de tous les contes de fée, c'est-à-dire 465 preuves que, pour chacun à chaque fois, non seulement "il était une fois" mais que toujours il sera une fois, 465 preuves aussi singulières que plurielles, 465 preuves irréfutables et en même temps porteuses de la plus urgente question : "La médiocrité de notre univers ne dépendrait-elle pas de notre pouvoir d'énonciation ? ", 465 preuves qu'il est possible d'y répondre et que c'est à chacun de le faire, ici et maintenant.
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«Vraisemblablement, sans André Breton, n'aurions-nous jamais vu combien le commencement de tout ce qui nous importe est lié au désir. Autant au désir de ce qui est autre qu'au désir de l'autre, rien ne va plus à l'encontre du monde qu'on est en train de nous imposer. C'est pourquoi, comme en écho à ce que j'avançais il y a trente-trois ans, il ne m'a pas paru inutile d'ajouter à titre d'illustration cinq textes écrits au fil du temps. Qu'il s'agisse, à propos de Nadja, des immenses et inquiétantes volutes du hasard et des rues qui sculptent nos destins, qu'il s'agisse, avec René Crevel, de la vie se perdant pour se trouver dans ses élans insensés, qu'il s'agisse des plus violents déchirements du temps chez Leonora Carrington, aucun ne se ressemble, mais tous ont en commun d'avoir été partie prenante du pari éperdu que le surréalisme aura fait sur l'amour se confondant alors avec la poésie comme puissance d'ébranlement.» Trente-trois ans plus tard, cet essai incisif et brillant conserve toute sa pertinence, surtout dans la perspective du centenaire du Manifeste du surréalisme. Pourquoi sommes-nous incapables d'appréhender ce mouvement en dehors de célébrations culturelles ? Aujourd'hui que nous voilà pris au piège de millions d'images, aurions-nous oublié qu'il s'agissait d'abord et toujours de refuser ce qui nous empêche d'être ? Révolte indissociable des sources vives de la poésie, comme Annie Le Brun nous le rappelle, en se faisant l'écho du grand questionnement surréaliste : «La médiocrité de notre univers ne dépend-elle pas essentiellement de notre pouvoir d'énonciation ?»
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Annie Le Brun est poète. Elle a écrit des essais consacrés, entre autres, au genre noir à la fin du XVIIIe siècle, au marquis de Sade, à la littérature, à la laideur et à la beauté. Cet ouvrage donne à lire la part essentielle de son oeuvre.
De ne m'être jamais prise pour un écrivain ni de n'avoir jamais projeté de faire oeuvre, j'ai écrit seulement pour savoir où j'allais. Il s'ensuit que façon d'être, façon de penser, façon d'écrire sont alors si imbriquées que tout y fait sens. Aucun soir ne ressemble à un autre, surtout quand la formulation d'une impression, d'une sensation et même d'une idée en dépend...
S'il m'est arrivé d'évoquer la dérive au long cours à laquelle j'ai souhaité que ma vie ressemble, alors les livres correspondent autant aux îles abordées qu'à la constitution de nouveaux atolls, les unes et les autres continuellement retravaillés par les vents et courants d'un enchevêtrement de temps courts et de temps longs. Comme s'il s'agissait de trouver la forme susceptible d'affronter le néant sinon de le conjurer. Sans doute n'ai-je jamais cédé sur le désir insistant, formulé dès le départ, de voir s'élargir l'horizon, mais je dois à une note tardive de Victor Hugo de supposer que je n'ai cessé d'y chercher ce qui pourrait bien ressembler à l'infini dans un contour.
A. L. B.
?Ce volume contient :
Ombre pour ombre ; Les Châteaux de la subversion ; Soudain un bloc d'abîme, Sade ; Appel d'air ; Surréalisme et subversion poétique ; Perspective dépravée ; Pour Aimé Césaire ; Du trop de réalité ; Si rien avait une forme, ce serait cela ; " Voici venir l'amour du fin fond des ténèbres " ; Ce qui n'a pas de prix. -
Avec internet et le métavers, le capital est en train de réaliser son rêve jusqu'alors impossible d'un imaginaire où tout s'achète. Événement sans précédent, contre lequel nous n'avons pas grand-chose à opposer, si ce n'est d'énigmatiques images en fuite, mues par l'urgence de ne pas se laisser déposséder de leur secret, c'est-à-dire de la part d'ombre dont elles sont porteuses. Afin de recouvrer ce que ce monde est en train de nous voler, il ne tient qu'à nous de recourir à cette vitesse de l'ombre qui ne cesse d'approfondir l'horizon vers l'infini qui nous habite.Si nous nous encombrons encore de bagages, c'est sans doute qu'ils contiennent les voyages que nous n'avons pas faits. Celui-ci, je l'ai commencé sans savoir où j'allais et je l'ai poursuivi jusqu'à découvrir quelque chose comme la cartographie de nouvelles constellations, dans lesquelles la singularité des désirs rejoint les plus lointains mouvements de l'univers.Il m'est impossible de croire qu'au plus profond de sa nuit chacun ne possède pas de telles images filantes susceptibles de changer le paysage. Je ne connais pas de meilleure raison pour ne pas en finir de prendre à revers un monde qui, chaque jour un peu plus, oublie le monde.A. L. B.
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Un espace inobjectif ; entre les paroles et les images
Annie Le Brun
- Gallimard
- Art Et Artistes
- 21 Novembre 2019
- 9782072843433
«Je devais avoir six ou sept ans, quand on me rapporta d'Angleterre La Belle au bois dormant en pop-up. Ouvrant ce livre, je vis soudain éclore un monde entre mes deux mains. Un monde léger, profond, un monde bleu profond. Je ne désirai qu'y pénétrer. Je n'en suis jamais vraiment revenue. Depuis lors, j'ai gardé la certitude que la pensée a au moins trois dimensions, déployant cet espace, où les mots et les images n'en finissent jamais de se rencontrer. Avec le recul, je me suis rendu compte que je n'ai jamais rien cherché d'autre que cet espace intermédiaire, où vient prendre forme tout ce qui nous importe. Espace ni subjectif, espace ni objectif, espace inobjectif. Notre chance est qu'il revient à certains artistes de jouer leur vie à ce jeu et de nous révéler alors le lointain qui nous habite. J'en aurais guetté toutes les approches, singulières ou plurielles. Ce recueil est le carrefour de leurs étranges mouvances. Il y va du déploiement de toute pensée, trouvant sa forme dans l'espace qu'elle fait soudain vivre. Rien n'est aujourd'hui plus menacé que cet espace paradoxal. Jusqu'à quand les contes nous seront-ils garants, comme La Belle au bois dormant l'aura été pour moi, que le grand maître de jeu continue d'être le désir en quête de lui-même?»Annie Le Brun.
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C'est la guerre, une guerre qui se déroule sur tous les fronts et qui s'intensifie depuis qu'elle est désormais menée contre tout ce dont il paraissait impossible d'extraire de la valeur. S'ensuit un nouvel enlaidissement du monde. Car, avant même le rêve ou la passion, le premier ennemi aura été la beauté vive, celle dont chacun a connu les pouvoirs d'éblouissement et qui, pas plus que l'éclair, ne se laisse assujettir.
Y aura considérablement aidé la collusion de la finance et d'un certain art contemporain, à l'origine d'une entreprise de neutralisation visant à installer une domination sans réplique. Et comme, dans le même temps, la marchandisation de tout recours à une esthétisation généralisée pour camoufler le fonctionnement catastrophique d'un monde allant à sa perte, il est évident que beauté et laideur constituent un enjeu politique.
Jusqu'à quand consentirons-nous à ne pas voir combien la violence de l'argent travaille à liquider notre nuit sensible, pour nous faire oublier l'essentiel, la quête éperdue de ce qui n'a pas de prix ?
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Ceci tuera cela ; image, regard et capital
Annie Le Brun, Juri Armanda
- Stock
- Les Essais Stock
- 3 Mars 2021
- 9782234088115
On ne compte plus les critiques de l'ère numérique. Mais elles ont en commun de ne pas voir la nouveauté d'un monde où, pour la première fois, le capital et la technologie se confondent absolument, obéissant à la même croissance exponentielle, avec la même visée de tout réduire à un objet de calcul.
Ainsi le regard humain est-il devenu pour le capital la matière première la plus recherchée. Surtout depuis que la production et la reproduction des images sont redéfinies par la révolution que représente l'instantanéité de leur distribution. Aussitôt produite, toute image peut être immédiatement diffusée par n'importe quel possesseur de smartphone - autrement dit, tout le monde.
En une dizaine d'années, la distribution s'est imposée au coeur d'une nouvelle économie du regard, où il n'est aucune image qui ne soit en même temps objet de profit et moyen de contrôle.
Il en résulte une complète reconfiguration de notre perception. N'existe plus que ce qui est rendu visible par la technologie. Rien n'échappe à cette dictature de la visibilité, qui nous empêche de voir à quelle modélisation nos vies sont continuellement soumises, en fonction d'algorithmes envahissant tous les domaines, scientifique, politique, esthétique, éthique, érotique... Persuadés d'être de plus en plus libres, nous nous sommes bâti la plus inquiétante prison d'images.
Comme d'autres ont autrefois réussi à sortir du labyrinthe qui les retenait en en reconstituant les plans, notre seule chance est d'essayer de comprendre quelle sombre histoire se trame entre image, regard et capital. En dépend le peu de liberté qui nous reste.