Les deux exergues choisis, l'un extrait de La Bohème galante (1852) et l'autre d'Aurélia me permettent d'annoncer d'emblée ma perspective pour ce qui est de cette « étude de style » consacrée à un extrait de l'oeuvre majeure et très admirée de Gérard de Nerval Sylvie (Les Filles du Feu, 1854). Georges Poulet dans son « essai de mythologie romantique » sur cette nouvelle : « Sylvie ou la pensée de Nerval » affirme : « [...] - mais le temps, ici, n'existe plus. », nous montrerons qu'il faut nuancer cette affirmation. Dans son étude de cette même nouvelle, Pierre-Georges Castex parle d'un « cycle du Valois » et remarque : « Le retour vers le passé manifeste une réaction instinctive contre le danger dont il se sent menacé. » Il s'agirait, pour Nerval, dans ce retour aux sources, de renouer avec une certaine continuité de sa vie. Déjà, dans Les Faux Saulniers (1850), oeuvre princeps pour ainsi dire, Nerval associe le « voyage à Cythère de Watteau » avec « ces étangs créés par les débordements de l'Oise et de l'Aisne » et, s'adressant directement au lecteur, indique quelle est la haute valeur pour lui de ce pays des souvenirs. En somme, cette terre du Valois joue à peu près le rôle de la forêt d'Ardennes chez Shakespeare : au pays de l'origine, du rêve et de l'esprit (des esprits aussi), l'imagination poétique résout les questions que les imperfections de la civilisation soulèvent et enveniment, et la société humaine retrouve une vigueur première et véridique.