« Vous leur donnez votre point de vue, vous les faites participer. Ils se disent, elle a besoin de nous, même si vous n'en avez absolument pas besoin [rires], mais globalement ça marche. » « Faire la blonde » est l'une des ruses régulièrement employées par Marielle et d'autres jeunes ingénieures et manageuses d'Airbus pour être acceptée et obtenir des informations dans leur travail quotidien au sein de ce bastion masculin qu'est l'avionneur européen.
Les témoignages et récits recueillis par Nathalie Lapeyre au fil de cinq ans d'enquête montrent un phénomène nouveau : le pragmatisme dont font preuve les jeunes générations de femmes cadres pour s'emparer des opportunités offertes par les récents dispositifs d'égalité professionnelle. Être inféodées aux hommes comme leurs aînées, très peu pour elles ! L'égalité, elles sont déterminées à la faire advenir, individuellement et surtout en groupe.
Avec une bonne dose d'humour et de modestie, elles usent de leur réflexivité dans l'analyse des expériences ordinaires de la domination, au travail comme à la maison, pour développer des capacités d'action, voire d'empowerment, qui peuvent rejaillir sur l'ensemble des femmes d'Airbus. Bien conscientes de la fragilité de leurs acquis, masquant parfois leur réussite jusque dans leur famille, elles sont extrêmement lucides sur le chemin qu'il reste à parcourir.
Comment et en quoi les études sur le genre permettent de retravailler les disciplines scientifiques ? Comment la prévalence de l'androcentrisme des sciences crée des apories au sein des connaissances scientifiques ? En quoi le prisme du genre peut-il requestionner les pratiques scientifiques, particulièrement au sein des sciences dites « dures » et expérimentales ? En quoi le genre permet aussi de renouveler l'appréhension des pratiques militantes et professionnelles ? Cet ouvrage s'intéresse aux apports du genre, un concept issu des sciences humaines et sociales qui tend à s'appliquer à la réflexion scientifique menée au sein d'autres mondes de la recherche. Cette inclusion permet de pointer les écueils, dans des domaines scientifiques longtemps restés hermétiques aux enjeux du genre. Il rend compte de travaux récents questionnant les enjeux épistémologiques de la critique féministe des sciences, mais aussi portant sur les questions d'identité de genre ainsi que de santé et de contrôle de la sexualité.