Au cours d'un monologue intérieur, Annie Cohen se livre et revient sur le processus créatif qui a marqué toute sa vie, à la fois pictural et scriptural. Peinture et littérature s'entremêlent dans un geste passionné, véritable pulsion de vie, qui pourrait tenir la mort à distance. La création devient alors éminemment intense, sexuelle, organique. C'est à travers son corps de femme entravé par la maladie qu'Annie Cohen ressent, invente et produit. Différentes thématiques personnelles et artistiques s'interpénètrent afin d'ouvrir une fenêtre sur son intimité profonde et tourmentée. Les souvenirs de jeunesse, l'évocation de sa mère, l'Algérie de son enfance, Paris, se mêlent aux éléments du quotidien de l'autrice, et permettent de mieux comprendre la genèse de ses écrits. La vie est là, toujours, incandescente et inaliénable.
Par son écriture magnifique et singulière, Annie Cohen nous emporte dans un passionnant flux de mots et de pensées.
Une puissante ode à l'existence.
Au chevet de sa mère mourante, Viviane observe avec tendresse ce corps aimé qui, au fil des jours, s'éteint. Durant cinq jours, dans une atmosphère particulière, dense et sereine, Viviane repense à la vie de sa mère, Marianne, à celle de Réjeanne, sa grand-mère, puis à des moments de sa propre vie. Ces différents récits dans lesquels se lit en filigrane l'histoire, souvent ignorée, du Québec depuis la fin du XIXe siècle, s'entrecroisent et s'enrichissent mutuellement, dessinant une matrilignée discrète et forte.
À eux se mêle l'histoire d'Anne qui, au XVIIe siècle, alors qu'elle n'est encore qu'une toute jeune fille, décide de prendre sa vie en mains et de quitter la France pour venir au Québec, fonder tout à la fois sa propre famille et construire un pays. Cette fille de roi, lointaine aïeule, devient ainsi la figure fantasmée de la première d'entre elles, comme l'origine de cette lignée de femmes.
Dans ce roman à la sensibilité aiguisée et se gardant de tout pathos, Lise Gauvin, touchant des liens profonds, dresse un portrait de plusieurs générations de femmes. Elle révèle avec pudeur des personnages aux destinées et personnalités complexes et bienveillantes. Ainsi, comme un cadeau, les derniers mots de Marianne mourante adressés à sa fille : « Et toi, comment vas-tu ?».
« Ma mère a toujours été très soucieuse de son apparence. Elle agençait ses vêtements avec un sens esthétique sûr, hérité de ses talents de peintre. Je l'avais amenée en promenade au jardin et avais pris une photo d'elle entourée des feuillages de l'automne. La qualité de la lumière, le décor automnal, les contrastes de couleur avaient transformé cet instantané en un portrait particulièrement réussi. J'étais partie rassurée pour ce court voyage. Nous nous reverrions dans un avenir prochain. » L.G.
Azucena, mince et brune quinqua aux chaussures rouges, semble être chez elle dans le Train bleu reliant Nice et Paris. Elle y dort, y fait des rencontres, s'y protège des menaces parfois lourdes, y agit, aussi, réalisant des missions secrètes. C'est qu'à Nice, elle est au coeur de plusieurs groupes constitués en réseaux informels, amitiés, résistances. Avec les Paranos, elle distribue dans un stand près de la gare, légumes et graines bio aux abonné.e.s, comme s'il s'agissait de contrebande ou de produits illicites. Avec Luna, elle exfiltre des chiens ayant fui leurs maîtres autoritaires ou violents pour commencer une nouvelle vie. Tout autour d'elle gravite une foule hétéroclite, un rien fantasque, de doux rêveurs qui ne renonceraient pour rien au monde à la mise en pratique de leurs idéaux : Gouel, le marin irlandais, chanteur des rues, Alex, le poète et «prince des poubelles», Manu, Monique, Nadette, un cheminot syndicaliste, Siranouche ou encore la Chienne noire, son amie... Quelques-uns sont, tout comme elle, un peu cabossés, mais trouvent dans les liens qui les unissent des raisons d'espérer. Parce que l'espoir n'est pas une option. Tous, comme autant de fourmis invisibles et obstinées creusant des tunnels pour faire déraper, sans violence, notre vieux monde, oeuvrent ainsi par l'exemple plutôt que par le discours, à en créer un nouveau, plus libre et lumineux, plus solidaire et plus juste.
À l'automne 1918, la Première Guerre mondiale à peine terminée, les généraux cèdent la place aux hommes d'État qui doivent définir les termes de l'armistice et ouvrir les négociations de paix. Des femmes politiquement engagées, notamment dans le mouvement pour le suffrage des femmes, n'entendent pas laisser les hommes décider seuls et demandent qu'une délégation soit reçue et admise à la table des négociations alors que doit se tenir Conférence de la paix, à Paris. Le refus du président des États-Unis, Woodrow Wilson, et du Premier ministre britannique, David Lloyd George, n'entame en rien leur détermination à agir : les femmes s'organisent entre elles et se préparent à exiger l'égalité des sexes et la justice sociale ainsi que des mesures pour instaurer une paix durable dans le monde d'après-guerre. La Conférence de la paix de Paris suscite une vague de militantisme féminin sans précédent, attirant sur la scène internationale des femmes venues du monde entier pour défendre simultanément la paix, la démocratie et les droits des femmes. Tel est le point de départ de cet ouvrage, dont le fil rouge pourrait être que « Nul ne peut se croire autorisé à parler au nom des peuples tant que les femmes seront exclues de la vie politique des nations », selon la formule de la féministe et suffragiste française Marguerite de Witt Schlumberger.
Les femmes des pays engagés dans la Première Guerre mondiale, qui ont dû remplacer dans tous les domaines les hommes partis au front, ont « accompli de grandes choses » et pris conscience de leur valeur. Pour elles, « impossible de revenir en arrière ». La Conférence de la paix se devait de reconnaître pleinement leurs droits. Le combat sera long...
Très documenté et précis dans la relation des faits historiques, Artisanes de la Paix est parsemé de notations sur la personnalité et la vie des femmes dont Mona Siegel fait le portrait, retraçant leur parcours pour s'émanciper des normes imposées par la société et par leur milieu d'origine, mettant en valeur leur capacité à s'organiser dans leur lutte incessante pour les droits des femmes dans tous les domaines - droit de vote, travail salarié, travail domestique, etc. - tant au niveau national qu'au niveau international.
Le livre vient de recevoir aux États-Unis le prix Elise M. Boulding Prize in Peace History.
Luciana Peker a prononcé un discours mémorable au Congrès de la Nation, à Buenos Aires, en avril 2018, lors des débats ardus autour de la présentation du projet de loi pour l'Interruption volontaire de grossesse en Argentine. Soulignant la nécessité vitale pour les femmes de disposer de leur corps et de bénéficier d'une éducation sexuelle complète et adéquate, elle a salué le rôle majeur des plus jeunes et en particulier des adolescentes dans la prodigieuse transformation sociétale en cours. C'est là qu'elle a popularisé l'expression « La Révolution des filles » qui donne son titre à ce livre.
En partant de cet épisode, l'autrice déroule le lien historique et transgénérationnel entre les combats des grand-mères, des mères et des filles, pour valoriser chez ces dernières la place de sujet politique conquise en dépit d'une violente opposition des secteurs les plus conservateurs. Luciana Peker, mère de deux adolescent·e·s, passe au crible les enjeux intimes, politiques et stratégiques de la lutte pour le droit à l'IVG en Argentine, dans une perspective ouverte sur toute l'Amérique latine, tout en donnant la parole à des personnes issues de différentes classes sociales et des milieux les plus divers.
Dans cet essai d'une remarquable vitalité, elle brosse le portrait exhaustif d'un mouvement d'émancipation féministe de masse, jeune, laïc et inclusif, né dans un continent traversé par de profondes inégalités socioéconomiques, des féminicides endémiques et une tentative de contrôle de l'Église et de l'État sur le corps des femmes et sur leur sexualité.
« La révolution féministe ne peut être comprise que comme une révolution, une révolution des filles, politique, collective et singulière, qui va désormais plus loin. Les filles demandent, critiquent, objectent et racontent bien plus que ce que l'on pouvait imaginer. Elles ne supportent pas ce que nous, adultes, supportons. » L.P.
Au retour de l'expédition sur le Satellite de l'Amande (tome I de La Trilogie du Losange), Ariane amorce une enquête historique sur la guerre des sexes ayant conduit à la société gynocentrique, Anima, dans laquelle elle vit. Les fécondateurs masculins ne sont plus, d'où la question entêtante d'Ariane : « les enfants mâles, qu'avez-vous fait d'eux ? ». À contre-courant des discours officiels, la narratrice interroge cette société et ses mythes, retraçant une histoire apocalyptique qui fait largement écho à ce que nous vivons aujourd'hui. On découvre avec plus de profondeur et de détails l'univers prolifique posé par le tome I de la trilogie, Le Satellite de l'Amande. Dans cette épopée délirante à l'humour corrosif, Françoise d'Eaubonne, mêle avec finesse les genres, de la science-fiction à l'essai en passant par l'utopie et le postapocalyptique.
La présente édition est enrichie d'une postface de Nicolas Lontel, spécialiste de l'autrice, pour comprendre l'oeuvre de Françoise d'Eaubonne que l'on redécouvre actuellement, et mettre en perspective les trois tomes de sa saga, La Trilogie du Losange. Un bonheur viril, le troisième tome inédit, conservé à l'IMEC (Institut Mémoire de l'Édition Contemporaine), paraîtra en octobre 2022 afin de parfaire une année où l'écrivaine est mise à l'honneur dans de nombreux évènements.
« Mes filles, mes reines, mes Mères ! Moi, l'enfant sans mère, l'enfant de cinquante ans, je vous remets ma main de guide : guidez-la. Pourquoi craindre que je crache sur vous ? [...] Je vois l'an 10, et les Terreurs, et les Années Rouges ; je vois danser crever hurler flamber dévorer saigner fracasser siffler fendre trouer piétiner mutiler déchiqueter trépigner énucléer crépiter raser édenter galoper embraser dénuder rugir enfouir éventrer rougir et jouir l'Apocalypse de la lutte de sexes. Une seule question, Mères : les enfants mâles qu'avez- vous fait d'eux ? » F.d'E.
« J'ai été victime, j'ai été témoin, j'ai recueilli des témoignages. Je suis toutes ces femmes. Je peux parfois m'appeler Natacha, Sarah, Lucie ou avoir bien d'autres noms encore... » T. M. B.
Zaïre, 1996. Une guerre éclate dans les hauts plateaux, voisins du Rwanda, à l'est de la future République démocratique du Congo. Le début d'un cauchemar de près de trois décennies, hanté par le fantôme du colonialisme. S'y disputent des intérêts multiples pour les richesses minières du sous-sol. La population, désemparée, bascule dans l'horreur. Elle subit les exactions perpétrées par des rebelles, militaires, policiers, pillards, hommes ivres de la puissance conférée par les armes. Instrumentalisés comme armes de guerre, les viols et mutilations sexuelles ravagent les corps et imposent la double peine du silence; car les femmes, rejetées par leur famille ou la communauté, portent la honte et les enfants du crime. Tatiana Mukanire Bandalire parle, en son nom propre ainsi qu'au nom de toutes les victimes.
À l'orée du XXIe siècle, les femmes transmettent la vie par ectogenèse, sans le concours des hommes, et la civilisation du Losange maîtrise les voyages dans l'espace. Ariane, la narratrice, participe à une mission spatiale destinée à explorer la planète Amande. Sur place, les mystères se succèdent et les péripéties s'enchaînent, de l'auscultation de la planète à la découverte d'une société futuriste bien particulière. Françoise d'Eaubonne, de sa plume foisonnante à l'humour acéré, fait de son space-opéra un magnifique roman symbolique et poétique. Le Satellite de l'Amande, premier tome de La Trilogie du Losange, et sa suite Les Bergères de l'Apocalypse qui paraît simultanément, frappent par leur caractère visionnaire qui percute notre présent. Françoise d'Eaubonne, première écoféministe française, a vu plusieurs de ses oeuvres rééditées depuis 2020. Elle fera beaucoup parler d'elle en cette année 2022 avec, notamment, un colloque international qui lui sera consacré en novembre 2022, organisé à l'IMEC (Institut Mémoire de l'Édition Contemporaine). Cette édition est enrichie d'une préface d'Élise Thiébaut, autrice d'une biographie de référence, L'Amazone verte (Éditions Charleston, coll. Les Indomptées, 2021). Elle nous ouvre les portes de l'univers de Françoise d'Eaubonne, en nous éclairant sur les éléments de contexte de cette oeuvre très originale. Avant la publication prochaine du troisième tome de cette trilogie, Un bonheur viril, à paraître en octobre 2022.
« Une guerre pareille, de cette dimension, si elle avait été le fait des hommes, aurait laissé la terre exsangue. Mais comme elle fut menée et gagnée par des femmes, la cicatrisation se fit à une allure foudroyante. Les arts reprirent leur cours en même temps que les collèges se relevaient de leurs ruines et que la production des produits de première nécessité, accrue à une cadence galopante, se fixait pour but la fin du contingentement la plus rapide possible, pour limiter les dégâts moraux du marché noir. » F.d'E.
Dans les années 1930, Maya vit une enfance de pauvreté et de ségrégation à Stamps, dans l'Arkansas. Élevée avec son frère par leur grand-mère, elle désire retrouver la figure gracieuse de leur mère. Mais les retrouvailles s'entachent d'une nouvelle trahison : Mr. Freeman, son beau-père, viole la fillette. Quand ils l'apprennent, ses oncles assassinent le coupable relâché par la justice, traumatisme sur le traumatisme qui enferme Maya dans un mutisme profond. Qui pouvait deviner que cette petite fille blessée, muette, qui se méfie du pouvoir des mots et découvre en silence la lecture, deviendrait l'une des plus grandes voix de la littérature américaine ?
« Cette misérable petite confrontation n'avait aucun rapport avec moi, mon moi profond, pas plus qu'avec cette employée idiote. L'incident faisait partie d'un cauchemar à répétition, concocté des années auparavant par des Blancs stupides et qui revenait éternellement nous hanter tous. La secrétaire et moi étions comme Hamlet et Laërte dans leur scène finale où, sous le prétexte du tort causé par un ancêtre à un autre, nous étions condamnées à nous battre en duel jusqu'à la mort. » M. A.
Jeanne Boucher acceptera-t-elle de signer avec Christophe Lambert, fondateur des éditions Thanatographes, spécialisées dans les derniers textes, ce contrat faustien en diable par lequel elle renonce à écrire après lui avoir confié un ultime manuscrit ? Entière, en quête d'absolu et de sens, elle entretient un rapport vital à l'écriture ; face à elle, Christophe n'est-il qu'un dandy cynique qui fait commerce de la mort ? Jusqu'où ira-t-il pour la convaincre d'écrire ce texte - puis de disparaitre ?
Quel rapport ces deux-là entretiennent-ils avec Marie-Madeleine, une vieille dame impudente et truculente, qu'un autre contrat va également bientôt engager avec l'énigmatique et ténébreux réalisateur Achard Lebrument ?
Le contrat est un roman baroque, à multiples facettes, miroirs, chausse-trappes et faux semblants, qui poursuit la réflexion de son auteure sur le statut du réel et propose, outre l'histoire de ces quatre personnages :
- le pitch d'une web série sur la cuisine de l'amour - le programme drolatique d'un Festival du Dernier roman - quelques trésors de l'opérette française - un catalogue jubilatoire de derniers textes encore inédits (réels ou imaginaires) - une playlist de chansons à pleurer - des considérations étymologiques sur l'évolution de quelques mots latins et coquins - mais aussi une réflexion sérieuse sur le chant du cygne : la relation de la Littérature au Temps et à la Mort.
Qui signera ? Qui tire les ficelles ? Qui mourra ?
Dans une prison du Caire, une femme attend d'être pendue. La veille de son exécution, elle reçoit enfin dans sa cellule la psychiatre qui souhaite recueillir sa parole, et comprendre son crime. La détenue parle vite, sachant son heure venue et n'ayant plus rien à perdre. Elle s'appelle Ferdaous, « Paradis » en arabe, et sa vie n'a été qu'un enfer. D'inceste en violences conjugales, programmée pour devenir prostituée, elle fait payer les hommes pour le mal qu'ils lui infligent. Jusqu'au jour où l'un d'eux le payera de sa vie.
« J'ai eu recours à la police, mais je découvris que ses liens avec la police étaient plus puissants que les miens. J'ai eu recours à la loi, mais je découvris que la justice punit les femmes et ferme les yeux quand il s'agit des hommes. » N. E. S.
« Ne rien espérer, ne rien désirer, n'avoir peur de rien ! Tout ce qui peut arriver est déjà arrivé et, pour elle, le pire est déjà arrivé. » N. E. S.
Ce roman iconique de la grande voix du féminisme du Moyen-Orient est inspiré de faits réels : Nawal El Saadawi a recueilli en tant que psychiatre le récit de vie d'une détenue de la prison de Kanater et l'a restitué à l'écrit en une semaine, après sa pendaison. Paru en arabe en 1975, Ferdaous est pour la première fois publié en France en 1981 aux éditions des femmes.
L'autrice se trouve alors elle-même en prison, victime d'une vague d'arrestations arbitraires. La mobilisation internationale du Mouvement de libération des femmes oeuvre à sa délivrance, et suivront chez les mêmes éditrices : La face cachée d'Ève (1982), Douze femmes dans Kanater (1984), Femmes égyptiennes, tradition et modernité (1991).
La présente édition réunit les quatre premiers recueils d'Anne Sexton (1928-1977) publiés dans les années soixante, To Bedlam and Part Way Back (1960), All my Pretty Ones (1962), Live or Die (1966) et Love Poems (1969). Icône de la poésie américaine, Anne Sexton est un oiseau rare de l'histoire littéraire étasunienne. Autodidacte, elle mène dans un premier temps une vie conventionnelle d'épouse et de mère. Mais ce cadre se fissure rapidement, elle traverse alors une grave dépression nerveuse assortie de pulsions suicidaires qui la conduisent à l'hôpital psychiatrique, où elle fait une rencontre déterminante. Le docteur Martin Orne, se rendant compte du potentiel de sa jeune patiente, l'encourage à écrire. Son premier recueil, To Bedlam and Part Way Back (Retour partiel de l'asile), la place parmi les figures marquantes du confessionnalisme américain incarné par le poète Robert Lowell. Dans un style novateur et transgressif, d'une troublante beauté, Anne Sexton développe des thèmes absents de la poésie de l'époque, tels que les menstruations, l'avortement, le lien matriciel ou un regard féminin sur l'inceste et la psychanalyse. Durant la prolixe période des années 1960, elle publie des ouvrages reconnus par ses pairs comme des chefs-d'oeuvre, dont Live or Die (Tu vis où tu meurs) récompensé par le prix Pulitzer en 1967. Une longue exégèse littéraire féministe reconnaîtra à son tour tout l'apport de cette immense poétesse. Les oeuvres couvrant la décennie de sa venue à l'écriture paraissent pour la première fois en France, présentées par Patricia Godi, dans la remarquable traduction de Sabine Huynh.
Et nous sommes de la magie se parlant à elle-même, bruyante et solitaire. Je suis la reine de tous mes vices oubliés. Suis-je toujours égarée ?
Jadis j'étais belle. Maintenant je suis moi-même, comptant des mocassins rangée après rangée sur l'étagère muette où ils continuent d'espérer.
Après les éditions complètes des Chroniques (2019) et des Nouvelles (2017), voici celle de la Correspondance de Clarice Lispector, qui offre pour la première fois en un seul volume près de 300 lettres de l'une des plus grandes écrivaines de son temps. Cette nouvelle édition, publiée au Brésil en septembre 2020, rassemble la correspondance publiée par les éditions des femmes-Antoinette Fouque dans les recueils Mes Chéries (2015) et Lettres près du coeur (2016), celle publiée par les éditions Payot-Rivages en 2012 sous le titre Le seul moyen de vivre, dans une nouvelle traduction, à laquelle s'ajoutent plus de 70 lettres inédites à la valeur historique inestimable.
Ainsi l'on parcourt 37 années de vie d'une épistolière qui en vécut 57, dont une quinzaine loin de son pays.
Il y a d'abord les lettres adressées au premier cercle de ses proches : mari, soeurs, fils, apparenté·e·s. L'autrice y exprime la quotidienneté sans le moindre apprêt d'une existence expatriée d'épouse attentionnée, de mère attentive, de femme... L'écriture en est ici déconcertante par sa spontanéité et sa connexion directe au réel, chez une écrivaine réputée pour sa sophistication et son extrême auto-surveillance. « Vous voulez m'apprendre qu'il pleut ? Dites : « Il pleut ».
Il y a ensuite les lettres adressées à un deuxième cercle, celui de ses amitiés littéraires. Soit un nombre conséquent de destinataires contemporains de Clarice, qui ont illustré la vie littéraire brésilienne très brillante pendant ces trois décennies (Lúcio Cardoso, Fernando Sabino. João Cabral de Melo Neto et Lêdo Ivo, Mário de Andrade, ou encore Rubem Braga, Lygia Fagundes...). La vocation littéraire de Clarice, les angoisses et les mystères de la création, les servitudes de l'écriture, les certitudes et les impasses de la pensée nourrissent les interrogations qu'elle adresse à ces grands esprits.
Enfin, il y a les lettres pouvant être qualifiées de professionnelles, où l'on voit l'autrice se préoccuper, avec un acharnement émouvant, du sort de ses oeuvres, qui dépend d'abord des instances éditoriales, puis de ceux qui en sont les premiers récepteurs : les journalistes.
L'importance « énorme » (Clarice adore cet adjectif) qu'elle y attache se révèle, entre autres, par son échange, en français, de quatre lettres avec P. de Lescure, alors directeur des éditions Plon, à propos de la première traduction de Près du coeur sauvage. Par l'incroyable profondeur de l'interprétation qu'elle nous livre de son propre texte, l'autrice nous donne une exceptionnelle leçon d'autoexégèse.
Ainsi cette édition qui vient compléter le cycle de publication de ses oeuvres par les éditions des femmes-Antoinette Fouque, constitue une pièce essentielle du puzzle claricien.
Figure de proue du féminisme américain, Andrea Dworkin a été prise pour cible privilégiée de la haine antiféministe pour son franc-parler et ses partis pris sans compromis. Après la parution de Woman Hating (1974), son premier livre, elle se tourne vers l'art oratoire pour survivre. Le milieu éditorial américain lui reproche le manque de « féminité » de son écriture, combative et corsée, qui choque et décille les consciences. Mais elle sait qu'elle a trouvé son public et se déplace de campus en associations, où elle suscite l'admiration, la colère et le débat. Notre sang : Discours et prophéties sur la politique sexuelle (1976, 1981) rassemble en un recueil ses discours pour porter sa voix plus loin, plus haut. Neuf discours, sur des problématiques aussi diverses que l'art, sa mère, la chasse aux sorcières, le lesbianisme, la non-violence ou l'histoire « amérikaine », visent un même objectif :
Un appel à la sororité pour galvaniser les femmes dans la lutte contre la domination masculine jusqu'à son abolition totale.
« Ceux-là, les masculinistes, nous ont raconté qu'ils écrivent sur la condition humaine, que leurs thèmes sont les grands thèmes - l'amour, la mort, l'héroïsme, la souffrance, l'Histoire même. Ils nous ont raconté que nos thèmes - l'amour, la mort, l'héroïsme, la souffrance, l'Histoire même - sont insignifiants parce que, par nature, nous sommes insignifiantes. Je renie l'art masculiniste. Ce n'est pas un art qui éclaire la condition humaine - il éclaire seulement, et pour toujours à la honte éternelle des hommes, le monde masculiniste - et à bien regarder autour de nous, ce n'est pas un monde dont on peut être fier. »
République démocratique du Congo (alors appelée Zaïre), 1996. Une guerre éclate dans les hauts plateaux de l'Est du pays, voisin du Rwanda. La population bascule brutalement dans l'horreur, un cauchemar incessant, fait de conflits armés successifs depuis près de trois décennies. Les habitants, dans leurs villages et sur les routes, subissent frontalement le choc des violences de toutes sortes perpétrées par des rebelles, insurgés de l'armée, militaires, policiers, voleurs..., hommes ivres du pouvoir et de la puissance que leur donnent les armes. Parmi les exactions : les viols et mutilations sexuelles, au pouvoir de destruction ravageur, aggravé pour de nombreuses victimes par une obligation au silence. Mais Tatiana Mukanire parle, en son propre nom et au nom d'autres femmes victimes.
« Nous avons en nous cette envie de vivre. Nous l'avons prouvé en nous battant pour notre survie, en nous accrochant à la vie. Nous avons été esclaves sexuelles, nous avons été enterrées vivantes quand nous ne pouvions plus satisfaire les besoins de nos ravisseurs. Nous avons été ligotées à un arbre au fond de la forêt. Nous avons été violées presque chaque heure. Nous avons perdu connaissance. Plusieurs fois, nous nous sommes crues mortes, mais au fond de nous subsistait l'espoir de respirer à nouveau et de revivre. » T. M. B.
Rappelant les légendes traditionnelles et les contes initiatiques, Clarice Lispector mêle le monde de l'enfance aux destins d'animaux. Ces derniers se voient pris dans un tourbillon d'évènements aussi anodins que mystérieux, inspirés de la vie quotidienne. Ainsi, le titre éponyme de ce recueil revient sur la mort de deux poissons rouges que son fils Paulo lui avait demandé de garder en son absence. Dans Comme si c'était vrai, on croise le chien Ulysse au regard humain, fidèle compagnon de Clarice Lispector, qu'elle ne remplaça jamais après sa mort. C'est avec un mélange exquis d'humour et de simplicité, de douce ironie et d'amour maternel, que C. Lispector déploie l'appréhension sensible et émotionnelle du monde, la recherche du sens ou le renoncement à le trouver. La maternité et l'enfance sont au centre de son oeuvre : chez cette autrice incomparable, nulle opposition entre son rôle de mère et son travail d'écrivain. En témoigne son fils cadet, Paulo Gurgel Valente, qui se souvient de sa mère « avec une machine à écrire sur les genoux, tapant avec application au milieu de la pièce principale de la maison, au milieu des bruits des enfants [...] ».
Après avoir publié en 2004 La vie intime de Laura suivi du Mystère du lapin pensant, les éditions des femmes-Antoinette Fouque présentent une nouvelle édition de ces deux contes, réunis en un volume auquel viennent s'ajouter deux titres : une nouvelle traduction de La femme qui a tué les poissons (Ramsay, 1990 et Seuil, 1997) et un conte inédit en français et publié pour la première fois, Comme si c'était vrai. Ce recueil est illustré par l'artiste graveuse Julia Chausson.
« Parce qu'au début et au milieu je vais vous raconter des histoires sur les animaux que j'ai eus, pour vous montrer que je ne pourrais pas avoir tué les poissons autrement que sans le faire exprès. J'ai bon espoir qu'à la fin de ce livre vous me connaissiez mieux et que vous m'accordiez le pardon que je demande pour la mort de deux «tyrougets» - c'est comme ça qu'on les appelait à la maison, «tyrougets» ». C.L
Au sein d'un paysage lunaire et désertique, une femme s'échappe d'un camp où elle a été enfermée à la suite de l'explosion d'un Site qui l'a violemment contaminée. Elle y a subi des expérimentations scientifiques et s'est fait passer pour morte afin de s'évader. La narratrice à l'identité sibylline marche en quête de liberté et de remémoration. Au fil de son cheminement, les souvenirs refont surface par bribes nébuleuses.
Le texte est empreint d'événements tels que l'enfer de la Shoah ou encore le Tsunami qu'elle a relaté avec une grande justesse dans son ouvrage The Black Sunday, 26 décembre 2004 (des femmes-Antoinette Fouque, 2005). Sans être mentionnée, l'évocation de la pandémie du Covid-19 révèle l'humanisme profond et singulier de l'autrice. La rêveuse finit par se réveiller, mais le songe est d'une actualité percutante.
« J'ignore ce qu'est devenu le monde dont je me souviens.
De ma mémoire je me méfie aussi. Est-ce bien la mienne ? Suis-je vraiment celle que je pense être à cause d'images, de détails, de sensations, revenus si soudainement dans le camp ? Est-ce une guérison ou encore une manifestation de la contamination ? Suis-je encore sous surveillance ? Il faudrait que je puisse parler avec celles et ceux qui n'ont pas eu la tête lessivée. Alors je saurais que le monde dont je me souviens est réellement le monde où j'ai vécu. Ma seule certitude est que je marche, je marche, je marche mais où ? » J. M.
À Londres, ce soir, Clarissa Dalloway offre une fête ! La haute société anglaise a intérêt à s'amuser. Or, de vieilles connaissances ressurgissent des limbes et exhument des souvenirs comme on ouvre une boîte de Pandore. Ce mois de juin d'après-guerre n'en est pas moins radieux. Quant à Lucrezia, déracinée de son Italie natale, elle tente de retrouver son mari dans la froide Angleterre.
Septimus est là, mais absent. Pâle vétéran décoré, le jeune homme reste hanté par les tranchées et les bombes. Parfois, il entend la voix d'un de ses amis morts au front.
« Elle ne dirait plus jamais de personne, il est ceci, il est cela. Elle se sentait très jeune ; et en même temps, incroyablement âgée. Elle tranchait dans le vif, avec une lame acérée ; en même temps, elle restait à l'extérieur, en observatrice. Elle avait, en regardant passer les taxis, le sentiment d'être loin, loin, quelque part en mer, toute seule ; elle avait perpétuellement le sentiment qu'il était très, très dangereux de vivre, ne fût-ce qu'un seul jour. » V. W.
L'orpheline Giuseppa est surnommée « La Fortuna » pour la main généreuse qui a payé son éducation dans un couvent de Sicile. Elle vit toutefois une vie misérable au milieu de religieuses au coeur sec. Sa soif du monde et de liberté lui donne à l'âge adulte la force d'emmener mari et fils loin de la tyrannie de sa belle-famille, et loin de la terre natale. Avec pour seule boussole sa confiance en un avenir meilleur, elle entreprend de traverser la Méditerranée pour rejoindre les rives de la Tunisie, « Petite Amérique » de l'immigration italienne et pour se bâtir une nouvelle vie.
« J'ai un peu lu : Bible, contes siciliens, manuels de savoir-vivre français, traités de jardinage. Maigre bagage, pour un esprit qui s'éveille. Mais les soeurs craignaient que mon esprit ne caracole loin d'elles et limitaient mon horizon. Elles m'ont inculqué la peur de l'inconnu, pour faire de moi une fille docile, craignant de quitter la niche. Il fallait que je leur échappe, que je leur désobéisse pour vivre. » F. G.
Le récit retisse le fil de la vie de cinq générations de femmes en Tunisie. À travers l'émancipation des femmes et le retour de bâton de l'islamisme sous sa forme la plus extrême : le terrorisme enraciné dans la haine des femmes. Il y a toujours de l'espoir cependant, mais il vient surtout des femmes.
D'emblée, ce roman nous embarque avec Nojoum, vieille dame aveugle que sa petite-fille questionne sur son histoire. Nous savons, dès les premières pages, qu'elles sont liées par un « Évènement » qu'elles ont vécu ensemble quelques années plus tôt, en réalité, on l'apprendra un peu plus tard, l'attentat du musée du Bardo à Tunis, où elles se trouvaient en visite.
« Juste après l'Événement, Nojoum avait éprouvé l'irrépressible désir de faire le plus grand mal qu'on pût imaginer. Mais comment s'y prendre? Elle n'arrivait pas à pleurer, avait l'âme lourde de méchanceté, rêvait de se venger en griffant, mordant, étripant, entendait la colère souffler sans arrêt au-dedans d'elle. Il lui poussait des crochets, elle avait envie d'être féroce et s'agrippait à cette envie pour se prouver qu'elle n'avait pas été anéantie. Sentir la méchanceté crépiter en elle, c'était tuer l'Événement, s'en évader. » E.B.Y.
Ce roman suit la vie d'une femme, Cristina, éprise d'une autre femme et passionnée d'écriture, pendant la dernière décennie de la dictature communiste en Roumanie, dans les années 1980. L'histoire commence à l'adolescence de Cristina, lycéenne dans une ville de province. Elle tombe amoureuse de sa meilleure amie, Nana, lui déclare ouvertement ses sentiments et découvre une réciprocité.
Mais après un court moment d'euphorie, Nana s'éloigne brutalement et part à Bucarest pour devenir comédienne, coupant tout lien avec Cristina. Celle-ci, de son côté, suit le parcours balisé de la conformité sociale. Elle épouse Radu, le frère de Nana, et tente douloureusement de négocier sa fine marge de confort matériel et moral, en naviguant entre les contraintes familiales, sociales et politiques. Elle essaie d'écrire, tout en sachant qu'il serait impossible de publier un texte sincère sur ce qu'elle pense et ressent. Puis renoue avec Nana, qui fuit de nouveau la relation et part en France. À l'aube de la quarantaine, les deux femmes, réunies puis séparées, trouvent chacune le courage d'accepter et d'affirmer à voix haute leurs choix, leurs émotions et leur identité. Mais cet acte libérateur, par lequel Nana peut enfin vivre, ne suffit pas à sauver Cristina, toujours captive de l'étouffante société roumaine. Dans ce roman exceptionnel, les rouages de l'oppression sont mis à nu dans leurs aspects les plus subtils. L'un des rares romans roumains à traiter de l'homosexualité féminine sous Ceausescu.
J'avais vingt ans quand je suis montée dans le bus. Je portais ma salopette, un col roulé noir, et le vieil imper gris que j'avais acheté à Camden. Ma petite valise écossaise rouge et jaune contenait quelques crayons de couleur, un carnet, les Illuminations, quelques fringues, et des photos de mon frère et de mes soeurs. J'étais superstitieuse. Nous étions un lundi ; j'étais née un lundi. C'était un bon jour pour arriver à New York City. Personne ne m'attendait. Tout m'attendait. » P. S.
Les jeunes Patti Smith et Robert Mapplethorpe se rencontrent par hasard à New York à la fin des années 1960. "Just Kids", roman d'initiation bohème, retrace les débuts de ces enfants terribles, jusqu'au moment où la chanteuse enregistre son premier album, "Horses", et voit décoller sa carrière. Cette épopée mythique, histoire d'amour et d'amitié, qui s'ouvre et s'achève avec la mort du photographe, immortalise les instants incandescents d'une période décisive dans ces deux vies d'artistes et dans l'histoire de la musique américaine.
"Inventions du souvenir", autobiographie de l'enfance de Silvina Ocampo, figure majeure de la littérature argentine, est demeurée inédite du vivant de son autrice. Elle a été publiée à titre posthume en 2006 en Argentine, grâce au travail du critique et traducteur Ernesto Montequin sur les manuscrits laissés par l'écrivaine. Dans un entretien accordé à Luis Mazas pour le journal Clarin en 1979, Silvina Ocampo évoquait son attachement aux expériences de l'enfance et livrait l'origine et les clés de lecture d'une oeuvre alors déjà bien avancée : « Je suis en train de préparer une histoire que j'appelle prénatale, écrite en presque vers, mais qui n'est pas un poème. Il s'agit d'un livre où prédomine mon instinct. » Ce livre était "Inventions du souvenir", sur lequel elle travailla par intermittences depuis le début des années 1960 jusqu'en 1987. Il se présente comme un long « poème » en 95 fragments. On ne sait jamais cependant si l'on est en prose ou en poésie, tant ce livre intime et profondément original bouscule les genres. Loin de toute veine confessionnelle, fuyant une illusoire chronologie rigoureuse, l'écriture semble ici guidée par le désir de mettre au jour et de retenir un ensemble d'expériences précoces, secrètes, essentielles et parfois prématurées, qui ont forgé l'imagination et infléchi la sensibilité de l'autrice. L'histoire familiale de Silvina Ocampo est présente, à peine dissimulée. Au fil des pages se déploie le microcosme domestique d'une grande famille argentine du début du XXe siècle, vu à travers les yeux d'une enfant qui se sentait inadaptée : « l'et cætera de la famille » qui, souvent seule, recherchait la compagnie des domestiques et des mendiants ou scrutait son entourage et son environnement quotidien. On songe alors à Proust, et l'on s'émeut de cette conversation secrète qu'"Inventions du souvenir" entretient, par-delà les siècles et les langues, avec les plus belles pages sur l'enfance.
Le récit déployé dans La Retenue est le fruit d'un long travail de cicatrisation, mené par une femme qui a su trouver la force de briser le silence auquel toute victime d'inceste se trouve confrontée. Une omerta relayée par les membres d'une famille sans repères, et qui à chaque instant menace de détruire les ressources psychiques les plus vitales de l'enfant, de l'adolescente, enfin de la femme. L'autrice prend ici la parole en même temps que la plume : « C'est mon unique route vers la liberté tant la parole est l'arme pour s'extraire du mutisme », écrit-elle. Avec un courage lucide et une écriture incisive, elle revient sur les agressions sexuelles et viols commis à répétition par son oncle dans le silence assourdissant des adultes. Elle parvient à déconstruire l'étau resserré autour de la victime et s'engage, après avoir suivi une psychanalyse, dans un parcours professionnel orienté vers la protection de l'enfance. Car l'inceste irrigue en secret toute la société, des récits comme celui-ci ouvrent la voie vers une réflexion collective d'une absolue nécessité.